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«Nouvelle Cuisine Nordique»: des chefs danois contestent cette dénomination

Photo: AFP Relaxnews

Certains chefs qui figuraient en tête de proue du manifeste culinaire énonçant les piliers de la Nouvelle Cuisine Nordique (NCN) il y a une dizaine d’années voudraient voir évoluer cette appellation qu’ils trouvent désormais désuète.

C’est pourquoi ils ont rédigé un long article sur le blog du célèbre Nordic Food Lab, une association qui rassemble de nombreux chefs, conseillers et chercheurs culinaires danois.

«Bon nombre d’entre nous sommes fatigués d’être décrits comme “Nouvelle Cuisine Nordique” par des observateurs qui pour la plupart ne savent pas vraiment ce que signifie cuisiner et vivre en Scandinavie aujourd’hui», peut-on lire sur le blog.

«Il n’est pas surprenant que même les chefs et les personnalités clés qui se sont engagés pour codifier l’idéologie NCN ont depuis essayé de se débarrasser de ce terme, parfois en le reniant complètement».

Pourquoi ce rejet lexical ?

Le principal grief qui anime ces cuistots est l’adjectif “Nouvelle” apposé devant la cuisine nordique. Ils pensent en effet que les principes du manifeste originel devraient être mis à jours et revisités.

Selon eux, les notions de «pureté» des ingrédients utilisés et d’«autosuffisance» soulignées il y a dix ans doivent être revues car elles peuvent être prises pour du fascisme culinaire voire même parfois de la xénophobie.

En 2004, sous l’impulsion du Conseil nordique des ministres, des chefs du Danemark, Groenland, Finlande, Norvège et Suède ont mis leurs idées en commun pour rédiger un Manifeste culinaire qui visait à l’origine à doper la production et la consommation d’aliments traditionnels de cette région. Le texte a été adopté en 2005.

Mais aujourd’hui, une décennie après la rédaction de ces préceptes, les chefs danois semblent se poser encore plus de questions qu’avant.

Authenticité nordique

Sur le billet de blog, ils s’interrogent : «Quels sont les attributs de la cuisine nordique? Est-ce le recours à certains ingrédients, ou certaines techniques, ou à un terroir, ou à une combinaison de ceux-ci? (…) Est-il encore utile de s’aventurer dans une discussion fumeuse sur l’authenticité?»

Pour illustrer le casse-tête culinaire auquel ils doivent faire face, le groupe de chefs évoque leur rejet de la demande d’un entrepreneur turc qui voulait ouvrir un restaurant de Nouvelle Cuisine Nordique à Istanbul. On lui a rétorqué que les menus ne pourraient pas être les mêmes en Turquie et en Scandinavie du fait de l’aspect locavore de la cuisine nordique.

En effet, les cuistots qui souscrivent à la cuisine nordique utilisent des ingrédients très locaux. Mais les chefs se demandent tout naturellement : la cuisine nordique est-elle exportable ?

Si les cuisines coréenne, mexicaine et vietnamienne peuvent être exportées partout dans le monde, pourquoi est-ce que l’inauguration d’un établissement estampillé cuisine nordique à Londres poserait problème ?

L’exemple de René Redzepi, le chef du célèbre Noma élu meilleur restaurant du monde à plusieurs reprises, permet de mieux comprendre ce phénomène.

Il y a quelques mois, Redzepi a délocalisé sa cuisine et sa brigade pour ouvrir un restaurant éphémère au Japon un mois durant.

Le chef étoilé a cependant choisi à ne faire figurer aucun ingrédient traditionnel de la cuisine nordique au menu du Mandarin Oriental de Tokyo. A l’époque, il a expliqué sur son site internet : «Même si toute notre brigade déménage à Tokyo, nous laisserons nos ingrédients à la maison».

«En revanche, nous adapterons nos sensibilités et notre façon de penser aux meilleurs produits d’hiver présents à travers le Japon.»

Le manifeste originel de la Nouvelle Cuisine Nordique est consultable (en anglais) sur http://bit.ly/1PTRwBD.

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