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Console Wars : un documentaire maîtrisé qui met les formes

Console Wars est disponible et mérite d’être vu

Comme on l’a vu ces dernières semaines, c’est tout un art de faire un documentaire sur le jeu vidéo et son histoire. Certains se sont cassés les dents à vouloir trop en faire, trop vite (High Score qui réécrit l’Histoire) et d’autres réussissent avec brio mais reste très austères (From Bedrooms to Billions – The PlayStation Revolution). Console Wars se place dans la seconde catégorie mais y met les formes et devient plus intéressant à suivre surtout pour des néophytes. CBS All Access a vu juste en misant sur ce contenu. Mais voyons en détails comment ce documentaire réussit ce tour de force. D’autant plus, je le rappelle, que le livre éponyme dont il s’inspire, n’hésite pas à prendre des libertés pour recréer des dialogues non vécus par son auteur, Blake J. Harris.

SEGA vs. Nintendo

La fin des années 80 n’a pas été tendre avec SEGA. Le constructeur américano-japonais peine à se faire voir du grand public tant l’hégémonie de Nintendo est grande. La firme de Kyoto a tout raflé sur son passage grâce à sa Famicom, renommée NES en occident. Mais ce n’a pas été une mince affaire. STOP. Je vais un peu trop vite en besogne et c’est là que Console Wars me plait et me parle. L’équipe a choisi de se servir de l’introduction avec les crédits pour faire intervenir Ralph Baer via des vidéos d’archive. Il n’en faut pas plus pour contenter l’historien que je suis. C’est pourtant ce que High Score n’a pas réussi à faire une seule fois, étant pourtant six fois plus long. Quoi qu’il en soit, le père de l’industrie du jeu vidéo fait une démonstration de Ping-Pong et dit en substance qu’il y a un marché. Entrent ensuite en scène les différents acteurs de Nintendo, puis SEGA et la conversation est lancée.

À l’image de The PlayStation Revolution, Console Wars est racontée uniquement par des intervenants présents au moment des faits. Vous reconnaitrez que même si ce n’est pas parfait (la mémoire peut nous jouer des tours surtout trente ans après les faits), c’est mieux qu’une voix off, aussi célèbre soit-elle, qui rapporte l’Histoire sans se soucier des éventuelles erreurs. On peut compter sur la présence, entre autres, de Shinobu Toyoda, Vice Président Exécutif de SEGA of America ; Tom Kalinske, PDG de SEGA of America ; Al Nielsen, Directeur Marketing de SEGA of America ; Ellen Beth Van Buskirk, Directrice des Communications, SEGA of America ; Peter Main, Vice Président Senior Marketing de Nintendo of America ; Howard Lincoln, Vice Président Senior de Nintendo of America ; et Howard Philips, le Game Master de Nintendo of America.

Cette séquence de name dropping est utile car on pourrait s’interroger sur l’absence d’intervenants japonais. Après tout, les deux entreprises ont leur QG sur l’archipel. Sauf que l’histoire de Console Wars, et cela fait partie de son coup de génie, concerne surtout, voire seulement, les branches américaines. C’est cette compétition qui est restée dans les esprits. Cette course à la puissance avec des publicités comparatives, introduites dans le secteur par Coleco rappelons-le, des inventions (le Blast Processing) et des tournées dans les centres commerciaux. Sans faire fi de la question japonaise, Console Wars raconte son histoire de manière claire et structurée avec des passages en pixel art rappelant ceux de High Score. Mais là encore, dans le cas de la série Netflix, ils prenaient rapidement le pas sur le reste et étaient utilisés à outrance. Là on est dans un bien meilleur équilibre.

Transfuges et trahisons

Autre point sur lequel Console Wars est encore plus intéressant : les transfuges. En effet, certains des intervenants ont commencé à un endroit avant de passer à la concurrence. On pense notamment à Bill White, ancien de Nintendo of America qui a fini par rejoindre les rangs de SEGA of America ; ou bien encore Steve « 299 » Race qui est passé de SEGA of America à Sony Computer Entertainment of America. C’est un coup du sort dont bénéficie et profite Console Wars. L’histoire est de ce fait plus palpitante avec un soupçon de drama. Mais évidemment après 30 ans les animosités ne sont plus forcément présentes.

Mon seul grief (il en faut bien un) avec ce documentaire, c’est l’absence notable de l’issue des audiences de Nintendo et SEGA (entre autres) devant le Congrès américain. Il s’agit tout de même d’un événement important puisqu’il a conduit, en 1993, à la création de l’ESRB (Entertainment Software Rating Board), l’organisme de classification des jeux en Amérique du Nord. Dans Console Wars, on a bien évidemment quelques passages mais aucun mot sur l’ESRB. C’est dommage et quelque peu incompréhensible. Mais il n’est pas remplacé par autre chose ou quoi que ce soit, donc on s’en contentera.

Quoi qu’il en soit, Console Wars est un excellent documentaire que je conseille à tous. Que vous soyez passionné de jeux vidéo, d’histoire, ou complètement nouveau dans ce secteur, c’est à peine 1h30 qui vous en apprendra beaucoup sur cette industrie par la bouche de ceux qui l’ont, en partie, construite.

Un texte de Antoine Clerc-Renaud de Jeux.ca

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