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Eisode: un secret bien gardé d’Ahuntsic

L'artiste multidisciplinaire Line Nault, qui est aussi la directrice artistique de la galerie d'arts numériques Eisode. Photo: Sarka Vancurova

Une fois arrivé devant le 9634, rue Lajeunesse, il est difficile de ne pas vérifier l’adresse une seconde fois sans se demander: «C’est bien ici?»

Un sentiment d’interdit s’empare de nous alors qu’on s’approche de l’immeuble. Heureusement, un chemin tracé dans la neige nous invite à nous aventurer à l’intérieur de la cour résidentielle de parfaits inconnus. Les traces de pas se succèdent jusqu’à la bâtisse située au fond du terrain. Un panneau indique de grimper les escaliers qui mènent à la porte. Mais que se cache-t-il derrière cette porte?

Le mystère s’épaissit au sommet de l’escalier lorsque notre regard scrute les alentours: d’un côté, une voie ferrée, et de l’autre, un cimetière. Puis, la porte s’ouvre et balaie du même coup ce court instant de rêverie. Apparaît alors l’artiste multidisciplinaire Line Nault, qui est aussi la directrice artistique de la galerie d’arts numériques Eisode, ce secret si bien gardé d’Ahuntsic que Métro souhaite vous faire découvrir.

Eisode, un terme emprunté à la recherche sur l’électromagnétisme, signifie «la porte par où le courant entre». Comme quoi la galerie porte bien son nom. En entrant, on tombe sur des ordinateurs éclatés, tous interconnectés les uns aux autres par des câbles électriques. Des images multicolores en perpétuelles transformations sont projetées sur des écrans, qui, dans le cas de certains, surmontent des fauteuils humanoïdes. Sur le coup, on a l’impression de s’immiscer dans un univers de science-fiction.

Hôtesse accueillante, Line Nault nous présente aux esprits créateurs qui s’affairent à monter cette curieuse installation : Camille Bernard-Gravel et Johann Baron Lanteigne. «Cette exagération reflète un peu à quel point la technologie prend de la place dans nos vies», indique Mme Bernard-Gravel. De son côté, M. Baron Lanteigne ajoute que leur projet découle de réflexions autour de l’ergonomie au travail. «On voulait montrer que la technologie pouvait s’adapter au corps.»

«L’ordinateur» est le fruit d’une collaboration entre les artistes Camille Bernard-Gravel et Johann Barron Lanteigne. Photo: Sarka Vancurova

En présentation jusqu’au 23 février, c’est la seule œuvre à occuper l’ensemble de l’espace de la galerie, où jusqu’à quatre visiteurs pourront la contempler simultanément pendant une heure en toute intimité ou avec l’aide d’une médiation, agrémentée d’un service de thé. Le prix d’entrée oscille entre 5$ et 40$, en fonction du type de visite choisi (visite autonome ou guidée) et le nombre de visiteurs. Des activités gratuites sont également offertes aux visiteurs qui souhaitent discuter avec les artistes de leurs installations autour d’un breuvage thématique ou lors du démontage des œuvres.

Une ode à la contemplation

Pour Line Nault et son partenaire, Alexandre Burton, codirecteur artistique de la galerie et architecte de processus en art numérique actuel dans la vie, l’idée de créer Eisode a fait son chemin durant la pandémie. «Il y avait un manque de lieux significatifs pour présenter les arts technologiques dans un contexte de diffusion optimal, sans risque de contamination. Dans le cas d’une exposition conventionnelle, comme les œuvres sont souvent placées côte à côte, cela finit par brouiller notre lecture d’une œuvre parce qu’on entend un bruit extérieur ou qu’on voit la vidéo de celle d’à côté», souligne Mme Nault. Ses propos résonnent d’autant plus que, au même instant, le passage grinçant et bruyant d’un train rompt le silence censé autant régner dans la galerie que dans le cimetière avoisinant.

Pour libérer les artistes des contraintes de diffusion auxquelles la création est souvent soumise, la galerie ne présente qu’une seule œuvre à la fois. L’ambiance ainsi contrôlée implique que l’artiste n’a plus à se réfugier dans la représentation spectaculaire pour se démarquer de la masse, ce qui lui donne «la permission d’aller au fond de ses idées, de creuser un peu plus, de se dévoiler», ajoute Line Nault.

Il a aussi été question de donner une place plus grande à l’expérientiel afin de minimiser tout élément pouvant gêner la visite des néophytes de l’art numérique, lequel peut être intimidant pour certains. «Tu viens seul ou accompagné d’un maximum de quatre personnes et la galerie t’appartient pendant une heure», précise Line Nault. Cette plus grande intimité permet de vivre une expérience significative. «Tu as le temps de t’asseoir et de porter une attention particulière aux détails. Sans te censurer. Sans avoir à intellectualiser tout de suite l’expérience en raison de ce qu’il y a autour de toi ou de la présence d’autres visiteurs.»

Alimenter le secret

Si vous pianotez «Eisode» sur votre moteur de recherche préféré, il y a de fortes chances que vous tombiez sur la définition du mot «épisode» avant d’aboutir sur le site Web de la galerie. La galerie est aussi absente des plateformes des réseaux sociaux Instagram ou Facebook. «Ça alimente le secret», lance à la blague Line Nault.

Bien que la galerie soit à demi cachée, le bouche-à-oreille a déjà permis à plus de 450 personnes de la découvrir lors de sa première année d’activité en 2022. Un nombre de visiteurs qui devrait augmenter cette année à la faveur des quatre expositions prévues d’ici septembre. Quatre occasions uniques de vivre une première expo en solo.

Pour en savoir plus: https://www.eisode.art/

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