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Centre Galileo : là où l’enseignement se conjugue à l’inclusion sociale

Photo: Olivier Faucher / Guide de Montréal-Nord

Depuis 15 ans, le Centre d’éducation aux adultes Galileo offre trois programmes ayant comme objectif partagé l’inclusion sociale. Alors que l’établissement est menacé d’être relocalisé par sa propre commission scolaire, ses intervenants craignent de perdre des acquis aujourd’hui essentiels à sa population étudiante particulièrement vulnérable. Le Guide a visité les lieux en compagnie de membres du personnel afin de mieux comprendre ce qu’ils craignent perdre.

Installé dans une ancienne école secondaire de Montréal-Nord, le Centre Galileo regroupe un programme d’intégration sociale pour étudiants avec besoins spéciaux, un programme pour venir en aide aux décrocheurs et des programmes linguistiques pour apprendre le français et l’anglais aux nouveaux arrivants. Des populations étudiantes qui «sont toutes vulnérables», souligne la commissaire de l’établissement, Sylvia Lo Bianco.

Au premier étage, l’énergie y est contagieuse. Dès notre arrivée, des étudiants du programme de besoins spéciaux viennent nous saluer. Plusieurs d’entre eux sortent régulièrement des classes parce qu’ils en ont envie. Ici, on ne reste pas assis à un pupitre à écouter un professeur pendant des heures, comme on le verrait dans n’importe quelle école.

Ce sont 140 étudiants confrontés à des difficultés psychologiques, intellectuelles, sociales ou physiques qui sont à ce programme dont le nom officiel est Service d’intégration sociale (SIS).

«Ce programme a une clientèle très autiste, indique le professeur Alain Tourigny. Le simple fait de regarder droit devant est un apprentissage à long terme, pour certains».

Besoins spéciaux
Pour ces étudiants, l’enseignement va bien au-delà des matières académiques.

«Nous enseignons des choses de tous les jours que ces étudiants n’apprennent pas à l’école, explique Alain Tourigny. On travaille la confiance en soi, les habiletés sociales et la mémorisation».

L’année passée, il y avait un jeune qui se promenait la tête basse et qui ne regardait personne au début. À la fin de l’année, il regardait tout le monde et avait développé sa confiance.
-Mary Pettinicchio, mère d’un étudiant au programme pour besoins spéciaux

Les intervenants dans ce programme ont des formations de toutes sortes. Alain Tourigny, par exemple, est professeur de théâtre, intervenant social et zoothérapeutre. Il combine ses compétences pour bâtir des activités qui favorisent le développement des étudiants. «Beaucoup de choses ici passent par les arts, dit-il. C’est la façon qu’on a trouvée pour eux de s’exprimer».

Il a ainsi recommandé à l’administration de faire l’achat de marionnettes. À travers celles-ci, les étudiants expriment des choses qu’ils ne sont pas nécessairement capables de dire normalement.

Des marionnettes sont utilisées pour aider les étudiants aux besoins spéciaux à s’exprimer

L’un des objectifs du programme d’aide aux adultes ayant des besoins particuliers est l’intégration au marché du travail, lorsque possible. Le programme possède un partenariat avec certaines entreprises du quartier pour permettre à ces étudiants de faire leurs premiers pas dans le monde professionnel.

Les étudiants de tous les programmes du Centre Galileo sont âgés de 21 ans ou plus. «Les services aux adultes, c’est un gros manque à Montréal, observe un intervenant, rencontré pendant la visite. Il n’y a pas beaucoup de services comme les nôtres dans la région».

S’enrichir les uns les autres
Malgré les objectifs différents que visent les programmes du Centre Galileo, une harmonie s’est installée entre ceux-ci. En effet, les populations étudiantes inscrites dans ces programmes se côtoient et apprennent les unes des autres.

Pour Alain Tourigny, cela bonifie l’intégration des nouveaux arrivants qui sont surtout là pour apprendre la langue, par exemple. «Dans certains pays, les personnes avec des déficiences intellectuelles sont cachées. Lorsque nos nouveaux arrivants issus de ces pays voient un spectacle joué par ces personnes ici, ils sont surpris, car ils les sous-estimaient».

Les professeurs du Centre Galileo mettent de l’avant la cohabitation et l’entraide entre les différents programmes grâce à certaines initiatives. «Les décrocheurs nous aident pour les activités du programme de besoins spéciaux, explique M. Tourigny. L’an passé, ils ont monté un spectacle avec nous».

Des acquis en péril
Or, malgré les multiples exemples de succès qui font la fierté des intervenants, une ombre plane au-dessus du Centre Galileo.

À deux reprises, la Commission scolaire English-Montreal (CSEM), qui chapeaute le Centre Galileo, a voté son déménagement comme solution à la requête de 156 classes supplémentaires pour la rentrée scolaire 2019 de la Commission scolaire de la Pointe-de-l’île (CSPI). Dans la proposition, la CSEM diviserait le Centre Galileo pour envoyer le programme pour décrocheurs au Centre John F. Kennedy dans Saint-Michel, et les programmes pour nouveaux-arrivants et étudiants aux besoins spéciaux au Centre St. Pius X dans Ahuntsic.

«Plusieurs étudiants m’ont dit qu’ils abandonneraient si nous devions déménager» -Sylvia Lo Bianco, commissaire du Centre Galileo

La direction du Centre Galileo craint de ne pas pouvoir remettre en place des ressources au Centre St. Pius X. Actuellement, 30 étudiants aux besoins spéciaux qui souhaitent intégrer le programme sont sur une liste d’attente, car l’administration ne peut leur promettre une place, faute d’espace dans le nouveau bâtiment.

À Galileo, une grande cuisine a été aménagée dans ce qui était autrefois une salle de classe pour que les étudiants du programme pour besoins spéciaux apprennent à être plus autonomes. «Reconstruire cette cuisine ailleurs coûterait 350 000$ aux contribuables», calcule Mme Lo Bianco.

D’autres préoccupations de logistique rendraient difficile pour le centre de s’établir aux endroits votés par la CSEM, estime le professeur Alain Tourigny. «Le Centre St. Pius X est un vrai labyrinthe et, pour beaucoup de nos étudiants, c’est important d’avoir un chemin simple pour se rendre partout, comme on a ici. C’est impossible pour nous d’accompagner chaque étudiant aux toilettes, par exemple».

Un local destiné à la botanique

Les nombreux locaux du Centre Galileo sont utilisés à de multiples dispositions. Salles de théâtre, salle de zoothérapie, salle d’art comprenant une section pour initier les étudiants à la lessive, laboratoire pour créer des savons, salle de botanique.

 

Après une visite du Centre St. Pius X, la mère d’un étudiant du programme de besoins spéciaux, Mary Pettinicchio, a constaté qu’il n’y a «pas assez d’espace» pour que toutes ces salles soient réaménagées.

 

L’administration attend toujours des nouvelles sur son avenir. Jusqu’ici Le conseil de la commission scolaire English-Montreal a voté son déménagement à deux reprises, malgré le refus du ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, d’aller en ce sens.

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