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Les déterminants de la santé «au rouge depuis longtemps» à Montréal-Nord

Photo: Olivier Faucher - Métro Média

Il aura fallu une crise sanitaire majeure pour que la question de la santé à Montréal-Nord se retrouve sous les projecteurs. Pourtant, bien avant l’arrivée de la COVID-19, plusieurs enjeux de santé publique auraient mérité d’attirer l’attention.

«Les déterminants de la santé publique sont au rouge depuis longtemps à Montréal-Nord», déplorait la mairesse de Montréal-Nord, Christine Black, lors de la séance du mois de mai du conseil d’arrondissement.

De 2012 à 2016, la Direction régionale de la santé publique a mené une étude pour mieux connaître l’état de santé des résidents du secteur qui comprend Ahuntsic et Montréal-Nord.

Le portrait est inquiétant; 37% des personnes de plus de 15 ans qui y vivent ont au moins une maladie chronique. Le taux est de 34,7% pour l’ensemble de Montréal.

On y recense aussi plus d’obésité et plus d’hypertension artérielle.

Une autre étude de la santé publique, réalisée en 2012, indiquait que ce même territoire avait l’un des taux de diabète les plus élevés de la métropole. Près de 10 personnes de 20 ans et plus sur 100 en étaient atteintes.

Le facteur génétique peut également peser dans la balance puisque la communauté haïtienne est fortement représentée.

«Si on les compare avec les Caucasiens, les Noirs ont un taux plus élevé d’hypertension et de diabète», fait remarquer la présidente de la Fondation des Médecins Canado-Haitiens, Yolande Charles.

Ce sont des maladies chroniques qui, si elles ne sont pas bien traitées, peuvent donner des complications graves.

Problèmes structurels

En point de presse à la fin du mois d’avril, la directrice régionale de la santé publique, Mylène Drouin, avait évoqué plusieurs facteurs structurels comme explication au plus haut taux d’infection de COVID-19 dans le quartier, comme la densité de population et le nombre élevé de travailleurs essentiels.

Ces problématiques structurelles accentuent également la vulnérabilité de la population lorsqu’elle contracte la maladie.

La moins grande accessibilité aux soins, la nourriture de qualité, à l’activité physique en sont des exemples. Dans une entrevue accordée au Guide, il y a trois semaines, le chercheur en Santé publique Grégory Moullec avait expliqué que ces facteurs, qu’on retrouve dans les quartiers défavorisés, rendaient plus à risque de développer des maladies chroniques.

En 2017, l’arrondissement avait adopté une politique visant à instaurer des environnements plus favorables à des choix santé dans l’arrondissement. Elle comprenait l’amélioration de l’offre alimentaire dans les établissements publics, l’agriculture urbaine et la promotion de l’utilisation des transports collectifs.

Des propositions nobles, mais qui ont un impact pour le moins limité, ne se cache pas la mairesse. «Les financements majeurs et importants doivent arriver des autres paliers de gouvernements pour pouvoir faire une réelle différence», dit-elle.

Un exemple récent est celui du complexe sportif que l’arrondissement souhaite faire construire depuis plusieurs années. Pour que celui-ci voie le jour, l’arrondissement dépend d’investissements gouvernementaux de dizaines de millions de dollars. Des investissements qui ne sont pas encore acquis.

Montréal-Nord, densément peuplé, est aussi le secteur ayant proportionnellement le moins d’espaces verts. On y compte 5149 m2 de parcs par 1000 habitants. À Ahuntsic, par exemple, c’est 32 911m2.

Accès aux soins déficient

Dre Charles coordonne annuellement une foire santé à Montréal-Nord, où les personnes peuvent rencontrer des professionnels de la santé pour faire de la prévention et répondre aux questions des visiteurs.

Cette foire, unique à Montréal, est devenue un événement important dans le quartier. L’an dernier, près de 700 personnes ont été touchées par celle-ci, un chiffre qui témoigne d’un accès difficile aux infrastructures de santé. «La population de Montréal-Nord est beaucoup plus affectée par le manque de médecins que les autres communautés», note Dre Charles.

Un constat confirmé par la mairesse Christine Black. «Il y a des zones qui actuellement, sont des déserts médicaux», dit-elle. Dans l’arrondissement, on trouve un CLSC, mais aucun hôpital.

Le secteur nord-est, dont la densité de population est trois fois plus élevée que la moyenne nord-montréalaise, est un exemple de désert médical.

Actuellement, un projet de clinique privée sur le boulevard Léger pourrait partiellement desservir ce secteur.

Une solution encore plus accessible et inclusive aurait toutefois dû voir le jour en 2017: celle d’une clinique de proximité. Or, le projet n’a pas eu l’appui escompté du milieu de la santé.

«C’est très difficile pour une organisation comme la nôtre de porter un projet comme ça, explique la coordonnatrice de Parole d’excluEs, Bochra Manaï. Il faut absolument un partenaire du milieu de la santé.»

Au départ, la FIQ était cette partenaire clé, mais il s’est désisté. Aujourd’hui, le projet est porté par la Table de quartier de Montréal-Nord, qui dit avoir l’appui du CIUSSS du Nord-de-l’Île-de-Montréal pour le faire aboutir. «Le projet demeure une priorité pour le milieu à court terme», a communiqué le directeur de la TQMN, Steves Boussiki.

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