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L’escouade Quiétude du SPVM cible les Noirs, selon une étude

Même si le PDQ 13 a connu une baisse significative de la criminalité depuis les dix dernières années, il a enregistré une hausse des méfaits en 2019.
Une voiture de police du SPVM. Photo: Josie Desmarais/Métro

Près de trois personnes sur quatre arrêtées par l’escouade Quiétude du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) sont noires, selon les données obtenues et analysées par un professeur de l’Université Concordia, qui conclut que cette équipe profile «massivement» les personnes afrodescendantes.

Entre décembre 2019 et avril 2020, l’escouade Quiétude, censée lutter contre la prolifération des armes à feu illégales, a arrêté 31 personnes. Près de 75% d’entre elles sont noires. À Montréal, la population noire ne compte que pour 7% de la population. Après calculs, un Montréalais noir est 42 fois plus susceptible d’être arrêté par cette équipe qu’un Blanc.

«C’est exagéré et disproportionné, même pour le SPVM», commente Ted Rutland, professeur au département de géographie, d’urbanisme et d’environnement à l’Université Concordia. C’est ce dernier qui a analysé ces données obtenues en vertu de la loi d’accès à l’information. Celui qui travaille régulièrement sur le rôle de la police à Montréal s’attendait à y voir une certaine tendance, mais pas de cette ampleur.

Armes à feu : peu d’accusations

Autre constat du professeur Rutland: 70% des accusations portées par l’escouade quiétude ne sont pas liées aux armes à feu. Il note également que moins de 30% des Noirs arrêtés ont été accusés de crimes en lien avec des armes à feu.

«On a donné plein des ressources au SPVM pour résoudre le problème d’armes à feu, et on voit qu’ils ont utilisé les ressources pour cibler les personnes qu’ils aiment cibler» -Ted Rutland, professeur au département de géographie, d’urbanisme et d’environnement à l’Université Concordia

L’escouade Quiétude avait été déployée en décembre 2019, deux mois après la parution d’un rapport démontrant que les Noirs et les Autochtones étaient quatre fois plus susceptibles que les blancs d’être interpellés par le SPVM.

Cela correspond à un «schéma historique», soutient M. Rutland.

«Le SPVM a un historique de répondre aux critiques pour son racisme en lançant de nouvelles opérations ou des escouades qui ciblent une sorte de crime qui peut facilement être lié à des personnes racisées, surtout noires», explique-t-il.

Le professeur demande l’élimination de cette équipe «qui cible massivement les Noirs» afin de lutter contre le profilage racial.

Présence ressentie de l’escouade Quiétude

C’est dans le nord-est de Montréal que l’escouade Quiétude est la plus active, notamment à Montréal-Nord, où plus du tiers des arrestations de l’équipe a été effectué.

Ted Rutland a recueilli des témoignages de jeunes arrêtés à Montréal-Nord. Deux d’entre eux racontent avoir été «harcelés» par la police avant d’être fouillés à leur domicile et arrêtés pour possession de drogue.

Roberson Berlus est travailleur de rue pour l’organisme Café-jeunesse multiculturel. Il raconte que l’arrivée de l’escouade n’est pas passée inaperçue dans le quartier, pour les mauvaises raisons.

«On a senti une forte oppression. Il y avait un comportement inadéquat de la police et j’ai dû m’adresser à un sergent plus accessible pour corriger un peu le tir. Ils sont arrivés et ils étaient vraiment agressifs et ciblaient les gens.» -Roberson Berlus, travailleur de rue

M. Berlus aimerait que davantage de ressources soient investies pour embaucher plus de travailleurs de rue. Ils ne sont que trois dans le quartier, alors qu’il en faudrait dix, selon lui.

«Ce que beaucoup de groupes demandent, ce sont des investissements dans les programmes sociaux, en santé mentale, souligne M. Rutland. On a besoin d’activités pour les jeunes, qu’ils puissent finir leurs études. On a besoin de travailleurs de rue pour résoudre les conflits avant que ça tombe dans la violence.»

L’organisme Hoodstock demande quant à lui des rapports mensuels sur l’origine ethnique des personnes interpellées, arrêtées et accusées par le SPVM. «On doit s’assurer que la police n’utilise pas le prétexte de la prolifération des armes à feu pour harceler et cibler les personnes de couleur, pense la membre de l’organisme Stéphanie Germain. Si nous ne recevons pas régulièrement ces informations, il n’y pas de façon de les tenir imputables.»

Réaction du SPVM

Jeudi après-midi, le SPVM a réagi à l’étude en défendant le travail de l’escouade Quiétude.

«Les policiers et les policières affectés à la lutte contre les crimes par armes à feu, dont les membres de l’équipe Quiétude, s’assurent de toujours mener leurs enquêtes et leurs interventions en utilisant des méthodes éprouvées, sans discrimination et sans racisme», a déclaré le Service de police.

Ce dernier a notamment soutenu que «plus d’une trentaine» d’armes à feu avaient été confisquées par cette équipe depuis sa création.

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