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Gangs de rue: la mort pour ressusciter le débat

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Photo: 123RF

Les fusillades des derniers jours à Montréal-Nord et Rivière-des-Prairies ont laissé derrière elles une mère endeuillée et deux jeunes hommes blessés par balle. D’après plusieurs experts, il est grand temps de réévaluer l’approche répressive adoptée face à ces groupes criminalisés.

«Rien a changé depuis [la crise qui a éclaté au sein de] l’Escouade Éclipse du SPVM en 2016. Le nord-est de l’île est encore, au sens large, victime des mêmes violences sociales et économiques», affirme Benoit Décary-Secours, chercheur postdoctoral s’intéressant à la construction sociale des gangs de rue au CREMIS (Centre de recherche de Montréal sur les inégalités sociales, les discriminations et les pratiques alternatives de citoyenneté).

L’Escouade Éclipse, groupe choc du SPVM appelé à intervenir dans les points chauds de la ville, a connu de grands chamboulements en 2016 sur un fond de scandale de profilage racial.

Depuis l’été dernier, le nord-est de Montréal a été durement éprouvé par une série de fusillades sanglantes. Trois ont éclaté le 28 août sur le boulevard Henri-Bourassa Est et quatre évènements impliquant des coups de feu sont survenus à Montréal-Nord et Rivière-des-Prairies le 28 novembre dernier.

«À court terme, c’est certain qu’il faut que la police intervienne, mais à long terme, les résultats des grandes opérations du SPVM des dernières années n’ont pas eu l’effet escompté. Les preuves empiriques sont là», déclare M. Décary-Secours.

Deux plans d’interventions québécois sur les gangs de rue ont été déployés par la sécurité publique de 2007 à 2014. Les effets et retombées de ces initiatives sur le milieu du crime organisé divisent certains observateurs.

«À défaut de stigmatiser les quartiers touchés, au moins on reconnaissait l’ampleur du phénomène. Ce n’est pas parce qu’on en parle plus à présent que c’est disparu. Les jeunes de ces quartiers vivent encore beaucoup de difficultés», souligne René-André Brisebois, praticien-chercheur au centre d’expertise délinquance et trouble du comportement au Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal.

«On n’avait pas les bonnes approches face à la délinquance, les solutions apportées étaient trop centrées sur la répression. Il faut travailler beaucoup plus en amont, s’attaquer à la pauvreté et aux inégalités», ajoute M. Décary-Secours.

Intervention

Le SPVM compte actuellement sur l’équipe Quiétude, et bientôt, sur l’équipe de lutte contre le trafic d’armes (ELTA) pour combattre la contrebande et la violence par arme à feu. Pour la députée libérale Paule Robitaille, la guerre contre le crime organisé doit cependant se mener sur plusieurs fronts.

«Le milieu communautaire doit avoir davantage de moyens, il y a un travail énorme à faire du côté humain. Ça prend des investissements en santé, en éducation, en employabilité. Il faut aider les jeunes marginalisés car ces groupes criminels ont tendance à profiter des secteurs défavorisés», mentionne la députée de Bourassa-Sauvé.

Le Café-Jeunesse multiculturel, un organisme visant à soutenir les jeunes en difficulté de Montréal-Nord, intervient depuis plus de 30 ans dans le quartier. Son coordonnateur Slim Hammami soutient que les besoins dans la région sont encore très importants.

«Il faut collectivement être beaucoup plus courageux face à cette vague de violence. C’est une situation qui perdure et qui est très stressante pour les résidents. Ce n’est pas en y allant de petites actions qu’on va réussir à faire un gros changement.»

La mairesse Valérie Plante devait rencontrer mercredi les policiers et les organismes communautaires du secteur afin de parler stratégie.

*Une version précédente de cet article indiquait que l’Escouade Éclipse a été démantelée en 2016, ce qui est faux.

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