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Montréal-Nord: voir plus loin que les grands titres

De nombreux citoyens de Montréal-Nord considèrent que leur expérience du quartier comme milieu de vie contraste grandement avec celle dépeinte par les médias.
De nombreux citoyens de Montréal-Nord considèrent que leur expérience du quartier comme milieu de vie contraste grandement avec celle dépeinte par les médias. Photo: Josie Desmarais/Métro

Voyeurisme et sensationnalisme: la couverture médiatique du «phénomène Montréal-Nord» continue d’exaspérer de nombreux acteurs locaux qui constatent les effets négatifs de la stigmatisation sur la population. Le jeudi 18 mars, l’organisme Paroles d’excluEs tentera d’encourager les citoyens à se réapproprier leur trame narrative dans un webinaire intitulé Le spectacle de Montréal-Nord: image, média & sécurité.

Des jeunes qui évitent d’inscrire l’arrondissement sur leur curriculum vitae par peur d’être vite écartés des processus d’embauche, Will Prosper en a côtoyé plusieurs au cours des dernières années. Pourtant, de nombreux citoyens de Montréal-Nord considèrent que leur expérience du quartier contraste grandement avec celle dépeinte par les médias.

«La couverture est souvent en lien avec les gangs de rue, la violence, l’insalubrité. C’est continuel, c’est ce qui attire l’attention et ça finit par marquer l’imaginaire des gens comme quoi les citoyens ici sont dangereux», affirme l’activiste.

Aux côtés de M. Prosper dans ce webinaire, Benoit Décary-Secours, chercheur postdoctoral au Centre de recherche de Montréal sur les inégalités sociales, les discriminations et les pratiques alternatives de citoyenneté (CREMIS), souligne que les médias sont des vecteurs importants dans «la façon que nous modelons notre conception de la sécurité».

«Par leur ampleur, les médias parviennent parfois à monter des nouvelles formes de menaces sociales. C’est le phénomène de la panique morale. L’enjeu des gangs de rues revient constamment.»

À force de faire les manchettes depuis les années 1980, le sujet des gangs de rue à Montréal-Nord a marqué l’imaginaire des Québécois et attisé la peur collective envers l’arrondissement selon Benoit Décary-Secours. Toutefois, les experts ne s’entendent toujours pas sur une définition claire du phénomène, donnant lieu à un emploi arbitraire du terme «gangs de rue».

Tout dans le même panier

À cause de son nom, Montréal-Nord semble souvent s’attirer le blâme des violences du nord de l’île. Cette situation a été observée lors de l’assassinat de Meriem Boundaoui à Saint-Léonard au début du mois de février.

«On lisait qu’une jeune fille avait été abattue à Montréal-Nord alors que ce n’était pas du tout le cas. Tout le monde du quartier écope, peu importe où ces violences arrivent. Les gens finissent par tenir pour acquis que c’est toujours négatif», fait remarquer Will Prosper.

Habitué par la presse négative dépeignant l’arrondissement comme un «Far West», Nomez Najac de Paroles d’excluEs souhaite que la couverture médiatique de Montréal-Nord soit davantage représentative.

«Il y a une routine de mettre l’arrondissement dans les grands titres à chaque coup qu’il se passe quelque chose de mauvais. Entre temps cependant, c’est silence radio», affirme-t-il.

Réappropriation

De belles histoires proviennent de Montréal-Nord. La communauté y est pluriethnique, multiculturelle et soudée, mais malheureusement, une peur de la sphère médiatique freine plusieurs citoyens à raconter leur histoire, selon Paroles d’excluEs.

«La communauté est souvent sollicitée quand la situation va mal afin de montrer que le quartier est différent du reste de l’île. Mais il faut qu’elle surmonte cette peur et profite des médias pour donner du contenu autre que les évènements violents», souligne Nomez Najac.

Le webinaire du 18 mars, comme l’organisation de la marche du comité des Mamans contre la violence au mois de novembre, sont des moyens pour Paroles d’excluEs d’outiller les citoyens à prendre parole, à raconter leurs histoires.

«Cela s’inscrit dans une continuité de redorer le blason des gens de Montréal-Nord. On crée nos propres espaces de discussion parce qu’on ne peut pas toujours compter sur les médias et le politique pour conter notre réalité, nos difficultés et notre travail», mentionne Will Prosper.

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