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Des services en santé mentale chamboulés par la pandémie

Sylvie Rodrigue a travaillé fort pour adapter les services de l'Alternative. Photo: Coralie Hodgson/Métro Média

Depuis mars 2020, le Centre de jour en santé mentale l’Alternative a dû réduire son offre de services et se réorganiser complètement. Une situation qui chamboule plusieurs usagers qui fréquentent cette ressource de Pointe-aux-Trembles afin de lutter contre l’isolement et la solitude.

Pour Stéphane, qui souffre de dépression majeure, ne plus pouvoir voir ses enfants comme il le voudrait depuis mars 2020 a été dur à encaisser. Une réalité encore plus difficile alors que l’Alternative, qu’il fréquente depuis 18 ans, a dû fermer ses portes de mars à juin 2020, et en janvier et février de cette année.

«C’était catastrophique. C’est comme notre deuxième famille. C’est ça qui nous tient unis, qui nous tient en vie», lance-t-il.

Depuis sa réouverture, le Centre de jour offre des places limitées pour quelques ateliers et groupes de soutien en présentiel. Mais les activités et les rituels qui permettaient la socialisation lui manquent cruellement, comme les dîners communautaires ou le party de Noël.

«Un moment privilégié, pour les gens en santé mentale, c’est beaucoup. Le côté humain, on n’a pas idée à quel point ça vient nous affecter quand on vient nous enlever ça», laisse-t-il tomber.

Le virtuel: pas un succès

Si Stéphane a pu fréquenter l’Alternative pendant ses mois de réouverture, plusieurs usagers du centre vivant en ressources intermédiaires ou en foyer de groupe n’ont pas eu cette chance.

Jusqu’à ce qu’ils soient vaccinés il y a quelques semaines, beaucoup de ceux-ci ont été strictement confinés chez eux. D’ailleurs, plusieurs d’entre eux le sont encore, explique Sylvie Rodrigue, directrice de l’Alternative.

Pour rejoindre les usagers en période de fermeture et tous ceux qui ne pouvaient pas fréquenter le centre, l’organisme a développé une offre virtuelle et proposé des tablettes aux usagers. Or, la pratique a eu un très faible succès et plusieurs ont délaissé les ateliers.

«On pensait que les gens se jetteraient sur ce projet, mais non. Ils n’ont pas l’habileté [avec la technologie], et ça les stresse beaucoup», indique Mme Rodrigue.

C’est le cas de Renée, atteinte de schizophrénie. Les groupes de soutien pour les entendeurs de voix l’aident normalement à trouver des stratégies pour repousser les «voix du diable» qu’elle entend constamment.

Pourtant, elle s’est sentie très déconcentrée durant les sessions par téléphone pendant son confinement. «Je n’aime pas ça par téléphone. Tu ne suis plus vraiment le monde. Tu ne sais pas quand parler. J’aime ça quand je vois le monde.»

Un stress qu’a aussi connu Anna Maria, qui souffre de schizophrénie paranoïde.

«À la longue, je paranoïais beaucoup de me voir sur l’ordinateur. Je n’aimais pas d’avoir l’attention de tout le monde sur l’ordinateur sur moi, c’était gênant.»

Santé mentale

Si l’année dans le rétroviseur a été éprouvante, Mme Rodrigue croit que les usagers du centre s’en sortent beaucoup mieux qu’on aurait pu croire. Peu ont décompensé ou ont eu des crises suicidaires.

Malgré tout, la situation a eu nombreux effets pervers. «Ils ont hâte de sortir, ils s’ennuient, et c’est long. Ils deviennent moroses. L’anxiété a aussi monté», observe-t-elle.

Bien que la crainte d’un nouveau reconfinement soit présente chez certains, plusieurs voient le 24 juin, date à laquelle le premier ministre François Legault a promis que tous ceux qui le souhaitent pourraient être vaccinés, comme une lumière au bout du tunnel.

«Dans la situation où on est, le mot espoir prend toute son importance. Il faut s’accrocher à quelque chose», conclut Stéphane.

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