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Mettre sa vie au service des autres

Félicidades Joseph tient fièrement son prix Artisan de la Fête nationale du Québec, qui lui avait été remis en 2018. Depuis maintenant 37 ans, son association organise chaque année une fête de la Saint-Jean-Baptiste à Saint-Léonard. Photo: Félix Lacerte-Gauthier

Après 38 ans à la tête de l’association Haïtiano-canado-québécoise de promotion culturelle et artistique d’aide aux démunis (AHCQAD), qu’elle avait elle-même fondée, Félicidades Joseph a dévoilé qu’elle préparerait sa relève.

« Attention, je n’annonce pas ma retraite, nuance d’entrée la femme de 92 ans. Je suis encore là, je me sens encore jeune. Je prépare ma relève. La personne qui voudra prendre ma place devra passer un an avec moi, à se familiariser avec l’organisme et les enjeux, avant que je ne lui passe la clé. »

L’aîné d’une famille de 10 enfants, Mme Joseph a grandi en Haïti, où elle est par la suite devenue infirmière. C’est en 1971, à l’âge de 42 ans, qu’elle est venue au Québec, afin de retrouver son fils, qui était avec l’une de ses sœurs. Elle est rapidement tombée sous le charme de l’hiver et de la neige.

« L’adaptation et la transition avaient été difficiles pour moi », révèle-t-elle. Infirmière et privilégiée en Haïti, elle a dû travailler dans une manufacture à ses débuts au Québec. « Là-bas, il n’y a que les patients qui m’intéressaient. À mon arrivée ici, j’ai été obligé de coudre des manteaux. C’est seulement après avoir suivi les cours pour être infirmière auxiliaire, en 1979, que je suis redevenue ce que j’étais. »

Utiliser son parcours pour aider
C’est d’ailleurs dans l’objectif d’aider les gens de sa communauté à ne pas vivre les mêmes difficultés et traverser le même choc culturel qu’elle a fondé l’AHCQAD, en 1981, avec l’aide notamment du maire Michel Bissonnet. « Le but était d’aider la communauté haïtienne à se sentir Québécoise à part entière », souligne Mme Joseph.

 Ici, on ne veut pas parler de racisme. Je ne veux rien en savoir, car j’ai vécu la ségrégation en Haïti, où les Blancs avaient certains privilèges. À mon arrivée, j’ai vu que ce n’était pas du tout la même chose ici. – Félicidades Joseph, directrice de l’AHCQAD

À travers ses années d’implications, Mme Joseph a d’ailleurs pu observer une certaine évolution au sein de la communauté haïtienne. « Avant, les Haïtiens ne sortaient pas, ne se mélangeaient pas avec les autres ; ils faisaient leur ghetto, pense-t-elle. Mais maintenant, ils embrassent les Québécois comme si on était chez nous, c’est un grand changement que j’apprécie. »

Malgré ses « jeunes » 92 ans, Mme Joseph est encore bien fringante. Elle se voit d’ailleurs rester encore longtemps auprès de l’association, qui représente pour elle toute sa vie. Néanmoins, elle espère que l’organisme communautaire poursuivra ses activités bien après son départ et sera capable de relever les défis financiers qui l’accablent. « Le financement que nous recevons n’est pas suffisant, se désole-t-elle. Je suis parfois obligé de prendre de mes propres poches pour aider l’association. »

Quoi qu’il en soit, elle espère que la personne qui prendra sa relève sera à la hauteur de ces défis et qu’elle comprenne bien ce qui fait l’essence de l’association.

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