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Quand va revoler le 737 MAX ? Les régulateurs aériens en débattent

Les avions Boeing 737 MAX 8 sont cloués au sol depuis plusieurs mois. Photo: Ted S. Warren/AP

Les autorités mondiales de l’aviation civile, réunies jeudi au Texas, examinaient le cas du 737 MAX immobilisé depuis plus de deux mois, avec une question lancinante: quand l’avion phare de Boeing va-t-il pouvoir revoler?

La veille, Dan Elwell, le chef intérimaire de l’agence fédérale américaine de l’aviation, la FAA, a jeté un froid en révélant que Boeing n’avait pas soumis pour évaluation la mise à jour du système anti-décrochage MCAS, en raison de questions additionnelles.

C’est le dysfonctionnement de ce dispositif, mis en cause dans l’accident d’un 737 MAX 8 d’Ethiopian Airlines le 10 mars dernier (157 morts) et d’un exemplaire similaire de Lion Air du 29 octobre en Indonésie (189 morts), qui a conduit à interdire provisoirement de vol cet avion, dernier né du constructeur américain.

L’avionneur avait pourtant affirmé la semaine dernière que le correctif était prêt pour la certification.

« Ça prend beaucoup plus de temps qu’anticipé, peut-être veulent-ils s’assurer qu’ils font bien les choses », relève Richard Aboulafia, expert chez Teal Group. « Il y a beaucoup de choses en jeu, notamment la première impression des régulateurs mondiaux » en examinant le correctif.

Pour Michel Merluzeau, « on s’oriente vers un retour en service qui risque de s’étaler dans le temps ». Selon cet expert chez Air Insight Research, on peut imaginer une levée de l’interdiction aux États-Unis vers la fin de l’été et dans « plusieurs mois » dans les autres pays.

Les compagnies aériennes américaines exploitant le 737 MAX — American Airlines, Southwest et United Airlines — espéraient remettre l’avion dans leurs programmes de vol vers la mi-août au plus tard.

Le nouveau retard accusé par Boeing est dû au fait que la FAA — qui essaie de montrer son indépendance vis-à-vis du groupe américain — a adressé de nouvelles questions au constructeur, a expliqué M. Elwell.

Une fois que Boeing aura soumis toute la documentation au régulateur, il devra franchir d’autres étapes: la FAA va par exemple effectuer un essai en vol et une analyse poussée pour éprouver la sécurité de l’appareil.

« Ça pourrait prendre un mois, deux mois voire plus (…) ça dépendra de ce que dira notre analyse », a indiqué jeudi Dan Elwell sur CNBC.

En outre, la FAA n’a toujours pas déterminé quelle sera la formation adéquate pour les pilotes, selon Dan Elwell.

Les États-Unis et un grand nombre de pays dont le Canada divergent sur ce point: les premiers estiment qu’une formation sur ordinateur ou iPad est suffisante pour des pilotes chevronnés quand Ottawa veut rendre obligatoire le passage des pilotes sur simulateur de vol.

L’Union européenne via l’AESA (agence européenne de la sécurité aérienne), le Canada ou encore le Brésil ont déjà indiqué qu’ils allaient effectuer leur propre évaluation du correctif du MCAS.

La Chine, premier pays à avoir cloué au sol le 737 MAX, est également une inconnue en plein regain de tensions commerciales entre Pékin et Washington.

Près d’une soixantaine de représentants de trente-trois pays, où volait le 737 MAX avant son immobilisation au sol il y a plus de 70 jours, ont accepté l’invitation de la FAA, dont la crédibilité a sérieusement été écornée dans cette affaire.

Dan Elwell et ses équipes vont tenter, durant la réunion, qui se tient à huis clos sur un site de la FAA, de jouer « la transparence » en expliquant à leurs pairs les éléments de sécurité sur lesquels ils vont évaluer le 737 MAX modifié.

Ils vont également détailler leurs procédures et solliciter les avis de leurs homologues.

« Nous allons discuter de la meilleure manière de rendre l’ensemble du processus (de recertification) transparent et de comment regagner la confiance du grand public », a déclaré M. Elwell.

Le retour de la confiance sera long, des enquêtes d’opinion menées par Southwest montrant qu’un grand nombre de passagers ne sont pas prêts à monter tout de suite à bord d’un 737 MAX.

Et les pilotes, un des piliers, avec les personnels navigants, sur lesquels les compagnies, Boeing et la FAA entendent s’appuyer ne semblent pas disposés à leur signer un chèque en blanc.

« Avant que le MAX ne retourne en service: nous avons besoin de réponses et de transparence », a ainsi réagi jeudi l’ECA, la fédération européenne des pilotes, ciblant la conception et la philosophie de cet avion.

Au-delà de la réputation, la crise du 737 MAX a un coût financier important alors que cet avion représentait près de 80% du carnet de commandes à fin avril.

Boeing, qui a suspendu les livraisons, ne perçoit plus d’argent des compagnies aériennes qu’il devra aussi indemniser pour leur manque à gagner.

« Il y a aussi des coûts supplémentaires liés aux modifications dans la maintenance, aux procédures et à la formation des équipages », dit Michel Merluzeau.

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