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Asie: la guerre au plastique des pays occidentaux

Cette photo, prise le 16 juillet 2018, montre des volontaires triant des bouteilles en plastique dans un centre de recyclage géré par une organisation bouddhiste à but non lucratif de Taipei, à Taïwan. Photo: Chris Stowers/AFP
Rédaction - Agence France-Presse

Que faire de nos déchets de plastique? C’est l’épineuse question que les pays occidentaux ont longtemps contournée en envoyant leurs rebuts dans des pays d’Asie. Ces derniers refusant désormais d’endosser le rôle de poubelle planétaire, des solutions doivent émerger rapidement.

L’incinérateur ou la décharge:les pays occidentaux ont peu d’options pour gérer les déchets de plastique qu’ils ne peuvent ou ne veulent pas recycler, et qui sont désormais indésirables en Chine et dans plusieurs pays d’Asie du Sud-Est.

Depuis que la Chine a fermé ses portes à certains déchets venus de l’étranger, le circuit du recyclage mondial peine à retrouver l’équilibre. Plusieurs pays d’Asie du Sud-Est, qui s’étaient placés sur le créneau laissé vacant par Beijing, sont en train de renoncer.

«Le problème, c’est que les quantités en cause sont extrêmement importantes», explique Arnaud Brunet, directeur général du Bureau international du recyclage (BIR) basé à Bruxelles.

Il y a eu un «engorgement des capacités techniques». Ces autres pays asiatiques «ont été dépassés» ; ils ont également subi des «importations illégales», qui concernent notamment des «matières difficilement ou non recyclables», a-t-il détaillé.

En effet, si les pays européens par exemple recyclent eux-mêmes certains déchets de plastique considérés comme rentables, en particulier les bouteilles en PET transparent, ils comptent sur l’exportation pour traiter les matières de «mauvaise qualité et à faible valeur», voire tout simplement «non recyclables», pointe un récent rapport du réseau d’ONG Alliance globale pour les alternatives à l’incinération (GAIA).

La Malaisie, qui autorise l’importation de déchets de plastique propres et homogènes, figure parmi les premiers pays concernés. Elle vient d’avertir qu’elle renverra à l’envoyeur des centaines de tonnes de plastique contaminé venant de différents endroits dans le monde.

«Les mesures prises par le gouvernement malaisien soulignent l’importance du recyclage responsable, de l’utilisation des cahiers des charges et de la gestion des processus en aval», commente Adina Renee Adler, de l’ISRI, qui regroupe les acteurs américains du secteur.

Comme la Chine et la Malaisie, la Thaïlande a pris des mesures pour restreindre les importations de déchets de plastique. Ces derniers ont été redirigés vers des pays moins stricts, comme l’Indonésie et la Turquie, selon ce rapport.

«Certains pays deviennent malheureusement les nouvelles­ décharges du monde. Les nations les plus pauvres vont absorber des déchets pour lesquels elles touchent des revenus, mais elles subissent un coût environnemental et social», indique Vincent Aurez, expert en économie circulaire du cabinet EY.

Matériaux problématiques
Face aux portes closes, les pays occidentaux disposent dans l’immédiat de peu de solutions pour gérer les déchets de plastique considérés comme trop coûteux à recycler sur place. Autre problème: le manque de débouchés locaux pour la matière recyclée, auparavant incorporée dans les productions chinoises.

Les acteurs du recyclage occidentaux, qui subissent une accumulation de matières, vont certainement devoir incinérer ce surplus ou le mettre en décharge.

À plus long terme, «la solution, c’est de sortir par le haut, d’investir dans la recherche et le développement pour avoir des processus de tri plus fins, plus efficaces, afin de gagner en qualité et d’atteindre des niveaux acceptables par certains pays», a expliqué M. Brunet, du BIR.

«Cependant, il faut aussi que les producteurs fassent leur part d’efforts en produisant plus en vue du recyclage», a-t-il ajouté, et ce, au moment où l’industrie du plastique reste florissante, malgré les critiques et les mesures contraignantes.

Penser à la fin de vie du produit dès sa création, incorporer des matières recyclées dans sa fabrication ou encore en privilégier une seule pour réaliser un emballage sont autant de solutions qui simplifieraient la gestion des déchets.

Alors que les taux de recyclage du plastique varient fortement – 31% en Europe contre 10% aux États-Unis –, la recherche doit également permettre de développer des techniques supplémentaires.

Cependant, pour nombre de défenseurs de l’environnement, le recyclage ne suffira pas si la consommation de plastique n’est pas bridée.

«Même si on parvient à créer de nouvelles filières, certains matériaux poseront toujours problème. Il faudrait arrêter de les produire et de les utiliser», a estimé auprès de l’AFP Laura Chatel, responsable de campagne auprès de l’association environnementale Zero Waste France. Sont visés en particulier certaines pellicules de plastique et certains matériaux composites.

«Il va falloir avant tout travailler à la réduction d’emballages, ce qui implique de distribuer les biens différemment», notamment en vrac, a complété Mme Chatel.

Greenpeace Canada croit que les pays qui envoient des ordures ont également le devoir d’enquêter de leur côté.

Les Canadiens produisent 3,25 millions de tonnes de déchets de plastique chaque année. Moins de 10% des plastiques sont envoyés au recyclage, et ils ne sont pas tous recyclés dans les faits. L’interdiction de plastiques difficiles à recycler et le développement de matières réutilisables semble être l’issue la plus durable.


Initiatives écolo au Sénégal
Qu’il s’agisse de projets d’associations citoyennes ou d’initiatives privées à but lucratif, les Sénégalais s’organisent pour lutter contre la prolifération des ordures et pallier le manque de moyens des pouvoirs publics, alors que le président Macky Sall vient d’annoncer un ambitieux objectif de «Sénégal zéro déchet».

Le chef de l’État n’a pas fixé d’échéance ni précisé comment y parvenir, mais le plan a commencé à être débattu à l’échelle locale, selon des responsables.

En parallèle, des journées de nettoyage sont organisées ponctuellement par des associations comme Sénégal Entraide, Bon Vivre Sénégal ou Save Dakar. Des habitants ont aussi lancé de petites affaires dans le secteur informel et ramassent les sacs-poubelle des habitants éloignés des grands axes, contre rémunération.

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