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Allemagne : acte d’extrême droite suspecté dans le meurtre d’un élu pro-migrants

Walter Lübcke a été retrouvé mort sur la terrace de sa résidence le 2 juin dernier. Photo: Sean Gallup/Getty Images

Le meurtre d’un élu local promigrant en Allemagne, pour lequel un suspect a été arrêté ce week-end, est très probablement lié à « l’extrême droite », a annoncé lundi le parquet antiterroriste national.

Au cours du week-end, un homme de 45 ans a été arrêté dans cette enquête sur le meurtre par balle, début juin, d’un élu local de la région de Hesse, Walter Lübcke, membre du parti de centre-droit de la chancelière. Le haut fonctionnaire territorial a été retrouvé mort le 2 juin sur la terrasse de sa maison à Wolfhagen, dans la banlieue de Kassel (centre). Il avait reçu une balle tirée à bout portant et baignait dans une mare de sang. Membre du parti de centre droit d’Angela Merkel, il avait été visé par des menaces de mort depuis 2016 pour avoir défendu avec force l’accueil des migrants, décidé en 2015 par la chancelière. Son décès avait déclenché sur les réseaux sociaux une avalanche de commentaires, dont de nombreux saluant ce meurtre.

En 2009, le suspect avait été interpellé avec quelque 400 autres militants néonazis pour s’être attaqué le 1er mai à Dortmund (ouest) à un rassemblement de la Fédération allemande des syndicats (DBG), a indiqué lundi sur son site Der Spiegel. Il avait écopé de sept mois de prison. Il est connu des services de police pour d’autres faits de violence ou de détention d’armes, ajoute l’hebdomadaire.

« Dans l’état actuel des investigations, nous partons du principe que nous avons affaire à un arrière-plan d’extrême droite » pour expliquer les motivations de cet assassinat qui a choqué le pays, a déclaré à la presse le porte-parole du parquet. Le parquet général de Karlsruhe, compétent en matière terroriste ou de crime organisé, s’appuie notamment, pour étayer cette thèse, sur le passé du suspect, un homme de 45 ans proche de la mouvance néonazie et déjà condamné pour des faits de violences, notamment contre un foyer de migrants.

Les enquêteurs tentent de déterminer s’il avait des complices, mais, a précisé le parquet, pour le moment « il n’y a aucun élément montrant que le suspect ait pu » agir dans le cadre d’un « groupuscule d’extrême droite » formé à cet effet. Une référence au groupuscule néonazi allemand NSU, responsable du meurtre d’une dizaine d’immigrés en Allemagne au début des années 2000.

L’arrestation a été menée sur la base de traces ADN retrouvées sur les vêtements de la victime. Après avoir exploré la piste privée, les enquêteurs se penchent désormais sur celle d’un mobile politique.

Une première depuis les années 1980 

Si le mobile politique devait être confirmé, il s’agirait du premier meurtre de cette nature depuis les attentats de la Fraction armée rouge à partir des années 1970. En 1981, ce groupe d’extrême gauche avait tué un ministre régional de l’Économie, membre du parti libéral FDP.

Il s’agirait en outre du premier homicide d’un élu motivé par des idées radicales de droite depuis le Second conflit mondial. En Grande-Bretagne, une députée travailliste avait été mortellement poignardée en 2016 par un sympathisant d’extrême droite.

Haine sur les réseaux sociaux 

En octobre 2015, après la décision d’Angela Merkel d’ouvrir les frontières à plusieurs centaines de milliers d’Irakiens et Syriens, il avait défendu les droits des réfugiés, s’attirant les foudres de l’extrême droite et des menaces de mort.

«Vous devez défendre les valeurs. Et quiconque ne représente pas ces valeurs peut quitter le pays à tout moment s’il n’est pas d’accord. C’est la liberté de tout Allemand», avait-il lancé lors d’une réunion publique.

Les hommages et articles consacrés à son décès ont suscité sur les réseaux sociaux une avalanche de commentaires, dont de nombreux saluant ce meurtre.

Un internaute s’était ainsi réjoui de la mort de « ce traître », un autre prévenant : « voilà ce qui arrivera à Merkel et aux autres ». Ces commentaires ont suscité des réactions outrées jusqu’au sommet de l’État.

« Voir quelqu’un susciter à ce point la haine, juste parce qu’il défend des opinions humanistes, marque pour moi le déclin des valeurs morales humaines », s’était ainsi alarmé le ministre conservateur de l’Intérieur, Horst Seehofer, pourtant très critique de la politique migratoire généreuse de la chancelière Merkel.

Le président de la République fédérale, Frank-Walter Steinmeier, avait lui pointé la « responsabilité » des plateformes de réseaux sociaux, sur lesquelles est « répandue cette haine ».

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