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Le quinoa, super aliment mais…

Toute médaille a son revers. Toujours. Ainsi, le quinoa est à la fois une «graine d’or» sortant des milliers de paysans andins de la misère, mais aussi une «pseudo céréale» si prisée par les Occidentaux que les pauvres des villes du Pérou et de Bolivie ne peuvent plus en manger.

Les Nations unies ont décrété 2013, année internationale du quinoa, avec pour objectif de promouvoir cette plante herbacée riche en protéines comme une réponse à la malnutrition dans le monde.

Ses qualités nutritionnelles sont si grandes que le «super aliment» va se retrouver à bord des voyages spatiaux longue durée de la NASA.

Cultivé depuis 5000 ans dans l’altiplano, les plateaux semi-arides des Andes, le petit grain rond entouré d’un germe blanc a conquis les tables occidentales. Résultat: les prix ont explosé.

Les agriculteurs boliviens et péruviens se frottent les mains. Mais dans les supermarchés, le quinoa coûte désormais cinq fois plus que du riz importé.

«Il y a une ironie cruelle à voir l’aliment de base des paysans andins devenir trop cher pour eux, parce que des étrangers fortunés lui ont assigné un statut de produit héroïque», avertissait The Guardian en janvier dernier.

Le quotidien britannique a non seulement sonné le tocsin, mais a invité ses lecteurs à ne plus acheter du «chisihuaymama» («mère de tous les grains» en aymara langue surtout parlée en Bolivie).

Avec la demande toujours croissante de quinoa, sa culture plus moderne met en péril l’équilibre environnemental des hauts plateaux andins. Des conflits autour de l’accès à la terre et à l’eau sont monnaie courante. En Bolivie, premier exportateur mondial de la «graine des Incas», une trentaine de blessés ont été signalés cette année dans des affrontements entre cultivateurs.

Alors faut-il culpabiliser? Avoir mauvaise conscience n’aidera sûrement pas les petits paysans à mieux manger tous les jours et à freiner leur exode vers les villes. Ancien cultivateur de quinoa, Evo Morales, le président bolivien, le rappelle dans ses discours.

La prudence est donc de mise, précise Marc F. Bellemare, économiste agricole à l’Université Duke, en Caroline du Nord. «Il est loin d’avoir été prouvé» que la consommation de quinoa en Occident «a de hauts coûts environnementaux et sociaux».

«Il est encore moins clair que les gens doivent arrêter d’en manger, puisque nous ne savons même pas quel est l’effet de notre consommation de quinoa sur le bien-être des gens qui le cultivent dans l’altiplano» (échange de courriels).

Passé du statut d’élément de subsistance à une culture d’exportation, devenu un «produit bio chic» en Occident où il commence à être cultivé, le quinoa nourrira peut-être un jour les affamés de la planète.

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