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Lorsque tragédie devient norme

Frontière
Andréanne Bissonnette - Métro

Le 27 avril dernier, un homme est entré dans une synagogue de Poway, en Californie, et a ouvert le feu sur les membres de la congrégation, réunis pour célébrer la dernière journée de Pessa’h. Le bilan : un mort, trois blessés. À 3 300 km de là, à Indianapolis, la National Rifle Association organisait un défilé de mode visant à présenter les nouvelles créations vestimentaires vous permettant de cacher le fait que vous portez une arme. Trois jours plus tard, un tireur actif fait deux morts et plusieurs blessés sur le campus de l’université de Caroline du Nord à Charlotte, ce qui devient le 41e cas de tuerie par arme à feu sur un campus scolaire… uniquement en 2019.

Les nouvelles entourant la violence par armes à feu aux États-Unis affluent, tout comme celles entourant le débat sur le deuxième amendement – qui protège le droit du port d’arme. «Une autre tuerie», «seulement deux morts», «les dernières fusillades dénotent»… Les fusillades font l’objet d’une couverture médiatique continue – aux États-Unis et au-delà –, mais les mots utilisés illustrent le glissement du phénomène vers la normalisation. Et comment faire autrement lorsque chaque année, depuis 2015, il y a plus de 300 tueries de masse recensées par le Gun Violence Archive, une organisation formée en 2013 afin de suivre la progression de la violence par armes à feu aux États-Unis? Depuis l’attaque de Sandy Hook en 2012, 2 035 tueries ont été recensées, faisant 2 313 morts et 8 461 blessés.

Pour plusieurs, l’insécurité­ devient la norme. Les tueries de masse sont des nouvelles parmi d’autres. Tragiques, oui; choquantes, plus tellement.

Ces chiffres obscurcissent une autre réalité : les victimes collatérales. Un an après les événements à la Marjory Douglas High School à Parkland, en Floride, deux survivant.e.s se sont enlevé la vie. Une semaine plus tard, le père d’une victime de Sandy Hook a été retrouvé sans vie à son domicile. La culpabilité du survivant, le choc post-traumatique­, la dépression… et surtout, l’absence de soutien psychologique, d’accès à une aide efficace et sans date d’expiration après un délai prédéterminé par l’État se cachent derrière les statistiques­.

La violence par armes à feu est rendue un aspect du quotidien, et des lieux autrefois sûrs sont aujourd’hui porteurs d’une constante insécurité. Les étudiant.e.s se soumettent à des simulations de tireur actif, le chemin de l’école revêtant chaque jour une possibilité de danger. Les enseignants de la Floride peuvent maintenant être armés sur le campus – tout comme les étudiant.e.s sur les campus dans une pluralité d’États. Les lieux de culte – indépendamment de l’affiliation religieuse – font l’objet d’attaques nourries par des discours haineux, en hausse selon le Southern Poverty Law Center, qui recense les crimes et discours haineux. Pour certain.e.s, il y a un avant et un après qui sont fondamentalement différents l’un de l’autre. Pour d’autres, il s’agit de se soulever contre le statu quo et pour un meilleur contrôle des armes. Et pour plusieurs autres, puisqu’il faut continuer, l’insécurité devient la norme. Les tueries de masse sont des nouvelles parmi d’autres. Tragiques, oui; choquantes­, plus tellement.

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