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Le fils de Doris Day

Sylvain Ménard

Mettons immédiatement une chose au point : je ne suis pas le fils de Doris Day et elle ignorait absolument tout de mon existence. Moi, pas mieux qu’elle, j’ai su qu’elle était encore en vie au moment où j’ai appris son décès. Désormais et pour l’éternité, mon histoire avec Doris Day est celle d’un rendez-vous manqué.

Enfant, quand je regardais Cinéma Kraft le jeudi soir au Canal 10, j’aurais payé cher pour que Doris Day soit ma mère. Rieuse et enjouée dès le saut du lit, elle enfilait des peignoirs bien pressés et la mise en plis de sa blonde coiffure était toujours im-pec-ca-ble. Équilibrée, à la fois distinguée et un peu fofolle, maman-Doris aurait fait mon bonheur, j’en suis convaincu.

Dans son monde à elle, tout était parfait. Les journées étaient gorgées de soleil, tout était toujours en ordre dans des maisons décorées avec goût, et chaque déjeuner digne de ce nom commençait avec un grand verre de jus frais. Des lits jumeaux meublaient sa chambre à coucher, le gars des vues la mariait tout le temps à Rock Hudson, et personne ne se posait la moindre question.

Dans une Amérique qui se montrait propre et sans reproche, Doris Day représentait l’ultime fantasme. Qui n’avait, bien entendu, rien à voir avec la réalité du commun des mortels.
L’univers de Doris Day remonte au temps où la télé et le cinéma nous renvoyaient des images plus que parfaites de ce que nous étions. Avec des parquets lustrés, des voitures chromées et des pelouses manucurées. À une époque où les gens se mettaient beaux pour prendre l’avion et où il eut été impensable de faire l’impasse sur la messe du dimanche. Un monde qui, finalement, n’était pas du monde, mais qui faisait quand même du bien à voir. Même le poste de président des États-Unis était une fonction prestigieuse…

Doris Day est décédée et je vis mon deuil. Avec elle, c’est une dernière parcelle de perfection qui s’échappe dans l’éternité.

Ce n’est pas un hasard qu’elle soit décédée le lendemain de la fête des Mères. Elle aura au moins pu la célébrer, une dernière fois, en compagnie de ses millions d’enfants.

Connus ou inconnus.

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Imaginez qu’à quelques mois de la prochaine rentrée scolaire, on manque de place pour accueillir des milliers d’enfants de l’est de Mont­réal. C’est exactement ce qui se passe présentement à la Commission scolaire de la Pointe-de-l’Île, où les locaux débordent tellement qu’il n’est plus possible d’y faire entrer un élève de plus.

Imaginez maintenant que la Commission scolaire English-Montreal, qui dispose de plusieurs espaces vides, refuse de répondre au souhait du ministre de l’Éducation, qui veut reprendre trois de ses écoles dépeuplées afin de résoudre le problème de surpopulation que vit la clientèle francophone. Ça vous fait quel effet, vous?

Juste pour le fun, imaginez maintenant la situation inverse. Imaginez la réaction d’une certaine frange de la population et des médias de langue anglaise si une commission scolaire francophone refusait de céder des espaces vacants pour répondre aux besoins des enfants de la communauté anglophone…

Imaginez le portrait d’horreur qu’on dessinerait en un claquement de doigts et les accusations génocidaires qui viendraient avec. Imaginez ça, juste deux minutes…

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Entendu: l’album Counterglow du montréalais Reno McCarthy. Une superbe leçon de pop, onze chansons toutes bien tournées, bien écrites et d’une étonnante maturité pour un premier album. Aucune idée ce que bouffent les artistes d’ici depuis quelques années pour atteindre un niveau d’expertise pareil, mais, on le répète, il se passe quelque chose d’assez extraordinaire par les temps qui courent.

On vous suggère de constater la chose par vous-mêmes mercredi soir alors que Reno McCarthy montera sur la scène de la Casa Del Popolo sur St-Laurent pour vous présenter son nouveau matériel.

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J’ai essayé de regarder le gala Artis dimanche soir à la télé. Je dis bien «essayé». J’ai arrêté quand on a demandé à Dave Morissette de fesser à grands coups de batte de baseball sur une piñata pour révéler l’identité d’un finaliste.

Vient le moment où la modération a bien meilleur goût et où la retenue fait office de festin…

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