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Les bonnes causes

A Qom (Toba) native stands next to a sign reading "Land is our life. Qom people in struggle", during a protest on April 27, 2011 in Buenos Aires. Qom people from Formosa are blocking the 9 de Julio and de Mayo avenues intersection after being camping for four months demanding the restitution of their lands, from which they were evacuated last November following clashes with the police which left two dead. AFP PHOTO / Daniel GARCIA (Photo by DANIEL GARCIA / AFP) Photo: Daniel Garcia/AFP

Nous aimons être solidaires. Encore faut-il choisir la bonne cause.

Appui moral et argent vont aux causes les moins controversées, selon les critères du moment.

Nous déplorons tous l’exil forcé du dalaï-lama, un leader religieux sorti d’un autre temps. Nous ne connaissons pas trop ses visées politiques, mais le trouvons fort sympathique et avenant.

En revanche, le drame du peuple Qom, survivant de peine et de misère en Argentine, n’est sous le radar de personne. Ses doléances sont ignorées même par les militants de gauche.

Pourquoi paye-t-on le prix fort pour écouter le chef déchu d’une théocratie moyenâgeuse? La réponse courte : le dalaï-lama sait plaire aux auditoires occidentaux en leur parlant de droits de la personne et d’éveil spirituel. Ses propos sont toujours de bon ton et les couleurs de sa tunique, joliment agencées.

Les Qom, c’est le contraire. Ils n’ont pas de représentant photogénique, aucun auteur n’a publié un livre en anglais vulgarisant leur ordalie – qui dure depuis des siècles – et leurs revendications sont carrément subversives. Les Qom réclament la propriété de leurs terres ancestrales.

Les goûts et les tendances du marché de la solidarité changent plus rapidement qu’on le croit. Pour être aujourd’hui vendable, une cause sociale ne doit agiter ni les démons de l’appropriation culturelle ni ceux de l’immigration. Les radicaux de gauche et de droite en profitent rapidement pour crier au scandale.

La réussite dépend également de la capacité du porte-parole à faire disparaître tous les irritants. Le groupe dont on défend le droit à l’autonomie est-il autoritaire, misogyne et homophobe? Cache-moi vite ces peccadilles.

Notre vie trépidante ne nous laisse même pas le temps de penser à ces enjeux trop subtils où s’entremêlent solidarité, idéologie et politique sur fond de traditions que nous connaissons à peine.

Voilà pourquoi les causes les plus lisses et la solidarité en solo finissent par s’imposer. Un petit geste, aimons-nous croire, compte. C’est simple, rapide et on se dédouane pour un bon bout de temps. Nos amis nous en félicitent sur les réseaux sociaux.

Protester pour changer des conditions structurelles, c’est moins glamour. L’engagement est à long terme et ne se limite pas à une contribution ponctuelle avec sa carte de crédit. Il faut être prêt à se joindre à un groupe de militants, à supporter des dirigeants égocentriques, des camarades trop sensibles et des frustrations à la tonne. De plus, nous risquons l’incompréhension de nos proches, et même leurs moqueries ou leur méfiance.
Aider les pauvres à l’autre bout du monde, oui, à condition qu’ils ne soient pas revendicateurs et qu’ils ne nous jugent pas. Sauver la planète, oui, si le prix du carburant demeure bas et la municipalité s’occupe de trier mon bac de recyclage.

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