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Police (de petite) politique

L’annonce de la création de l’Unité permanente anticorruption (UPAC) avait été accueillie, rappelons-nous, avec un enthousiasme certain. Devant ce cancer qui semblait ronger maintes portions de l’administration publique, le gouvernement Charest donnait enfin suite, en février 2011, aux pressions médiatico-populaires.

Une bonne nouvelle. Notamment parce qu’il n’y a rien de mieux que de diviser les pouvoirs afin d’optimiser la probité des corps publics, même policiers. Le pouvoir corrompt, et le pouvoir absolu corrompt absolument, disait Lord Acton.

Cela étant dit, force est d’admettre l’échec, au moins partiel, de l’initiative. Enchaînement de basses manœuvres préparé à la sauce petite politique.

On se souvient, par exemple, de l’arrestation de l’ex-vice-première ministre Normandeau. Quel jour, déjà? Celui du dépôt du budget provincial. Idéal, avouons-le, si l’UPAC souhaitait attirer toute la lumière sur elle et maximiser la profondeur du précipice dans lequel balancer le gouvernement libéral.

Un autre hasard? Que cela survienne à l’échéance du mandat de son commissaire Robert Lafrenière. Impossible dès lors, vu l’arrestation de Normandeau et cie, de ne pas reconduire ce dernier. Définition même de l’abus de pouvoir, si vous voulez mon avis.

L’affaire Charest, maintenant. À l’instar de son ex-vice-première ministre, celui-ci serait également sous le coup d’une enquête. Très bien. Sauf que depuis combien de temps, déjà, dure tout ça? Quatre, cinq, six ans? Si complexe? On en doute. Ceci n’empêche pas, pourtant, ce cher Lafrenière de sortir ici et là dans les médias afin de couler de l’info, habituellement privilégiée. Comme celle propre aux méthodes d’enquêtes. Pas trop malin. Sauf que ça excite le média, lequel sort la nouvelle ipso facto. Et au diable la présomption d’innocence! Bien qu’aucunement accusé, Charest serait, aux yeux de la moyenne des ours, déjà coupable. Bel État de droit.

Et dites-moi, que se passe-t-il avec Guy Ouellette, finalement? Lafrenière n’avait-il pas promis des accusations dans un très proche avenir? On attend toujours, probablement du fait du refus du DPCP d’aller de l’avant. Mais Lafrenière aura encore réussi son coup. Utiliser les médias afin de beurrer un élu ou un ex-dirigeant. Le show habituel.

Question, d’ailleurs: comment l’UPAC pouvait-elle enquêter dans une affaire où Ouellette était soupçonné de vouloir couler de l’information sur… l’UPAC? N’est-ce pas la parfaite définition du conflit d’intérêts? Et qui aurait alors dû enquêter? La SQ. Sauf que, petit hic, le boss de celle-ci est le gendre de… Lafrenière, et la fille de celui-ci est enquêtrice spéciale à cette même SQ. Cute.

Ajoutons à cela que le ministre Coiteux demande actuellement des comptes à Lafrenière sur les comportements de son ex-bras droit, Marcel Forget, tant au sujet d’un prétendu délit d’initié que du mauvais climat de travail dans l’organisation. Dangereux jeu de ping-pong. Tu veux nous mettre dans le trouble, Robert? Ben, c’est à notre tour, maintenant. Jusqu’à la revanche.

Montesquieu a certainement, dans une tombe outre-mer, mal à sa séparation des pouvoirs.

PS: Selon Wikipédia, Lafrenière serait à la fois un policier, un ex-fonctionnaire et un homme… politique. Au moins, pour une fois, Wiki aura dit vrai.

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