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Les prédictions de l’inspecteur viral pour 2017

Young man wearing a hoodie breaking through his computer with his fist Photo: Getty Images/iStockphoto

Bonne année!

Si 2016 a été l’année où les fausses nouvelles sont devenues un sujet d’actualité, cela ne veut pas pour autant dire qu’elles disparaîtront en 2017. Voici quelques prédictions de l’inspecteur viral en ce qui concerne les fausses nouvelles (et, non, l’inspecteur n’est ni aveugle, ni Bulgare).

Le terme «fausse nouvelle» s’effritera encore plus

Non, mais, c’est quoi, un fausse nouvelle? Il y a quand même beaucoup de confusion à ce sujet. Pour l’inspecteur, une fausse nouvelle est une fausse information, inventée de toutes pièces ou du moins tellement exagérée qu’elle ne correspond plus à la réalité, présentée comme une vraie nouvelle dans le but de tromper le lectorat, soit pour les clics ou pour pour faire avancer une cause quelconque.

Donc, quand un petit blogue invente une histoire comme quoi les garderies ne pourront plus mentionner Noël, c’est une fausse nouvelle.

Quand des sites reprennent des fausses rumeurs qui circulent sur les réseaux sociaux à propos d’une célébration de membres du Ku Klux Klan à la suite de l’élection de Donald Trump, ce n’est pas une fausse nouvelle. C’est du mauvais journalisme (ce qui très est grave, mais pour d’autres raisons).

Attendez-vous à ce que le concept de «fausse nouvelle» soit encore plus exploité en 2017. C’est déjà commencé.

L’entourage du président-désigné des États-Unis, Donald Trump (et lui-même – sur Twitter bien sûr), prend un malin plaisir à traiter de «fausse nouvelle» tout reportage qui ne lui convient pas. Une Fraternité policière aux États-Unis a aussi traité de «fausse nouvelle» un reportage de Vice qui lui avait déplu. Voici une vidéo de Vice où on voit graduellement, en l’espace de quelques semaines, le terme «fake news» (fausses nouvelles) perdre tout son sens dans le discours médiatique américain:

En gros: les gens ont entendu parler des fausses nouvelles, donc on utilisera cette expression pour balayer tout travail journalistique qui nous agace, ce qui augmentera encore plus la confusion. Chouette…

Tous les yeux seront rivés sur Facebook

mark zuckerberg

Après une valse-hésitation (l’inspecteur a toujours adoré cette expression – non, mais, faut tu être mauditement pas bon en danse pour hésiter quand on valse?) Facebook a finalement admis l’existence du problème des fausses nouvelles, et a annoncé toute une gamme de mesures assez intéressantes pour le combattre. Mais ceux qui pensent que Facebook fera automatiquement disparaître le problème seront déçus.

D’une part, la volonté de limiter les revenus publicitaires des sites de fausses nouvelles est louable, mais ne fera rien pour contrecarrer ceux qui font de la fausse nouvelle dans le but de faire de la propagande. Ils s’en foutent pas mal, eux, de l’argent.

D’une autre part, le système qui sera déployé par Facebook, quoique mieux que l’inspecteur aurait pu espérer, contient quelques problèmes. En gros, on va faciliter le signalement des fausses nouvelles. Celles-ci seront vérifiées par un consortium de journalistes. Si une nouvelle a été certifiée fausse par les journalistes, tout utilisateur qui tentera de la partager recevra un avertissement. Très cool. Sauf que:

  1. Encore faut-il que les gens signalent les fausses nouvelles. Cela fait presque deux ans que la fonction existe, et très peu de gens le font.
  2. Pour le moment, seuls des journalistes anglophones américains font partie du consortium (l’inspecteur viral a appliqué pour en faire partie et n’a pas obtenu de réponse). Vous voulez signaler une fausse nouvelle en français sur Jean-François Lisée? Bonne chance pour la faire certifier fausse par Facebook.
  3. Les trolls. L’inspecteur viral peut s’imaginer un scénario où des partisans de M. Trump pourraient décider de systématiquement signaler toutes les publications du New York Times, par exemple. Le consortium n’aura donc pas le choix de vérifier chaque article du quotidien. S’il n’effectue pas de vérifications en se basant sur la bonne réputation du journal new-yorkais, c’est la crédibilité du consortium qui est en jeu. Les trolls pourraient donc facilement étirer les ressources limitées du consortium.

Alors voilà. Ne vous attendez pas à ce que Facebook règle tous les problèmes. C’est aussi à vous de faire preuve de discernement et de sensibiliser vos amis.

Des sites de faux fact-checking

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Bon, ceci est plus une prédiction qu’une analyse, mais l’inspecteur est convaincu qu’on verra émerger en 2017 des sites de faux fact-checking (vérification des faits).

Les plateformes de fact-checking (l’inspecteur viral inclus, bien humblement) connaissent un certain succès. Les internautes sont à la recherche de points de repère dans cet océan de désinformation. Qu’est-ce qui empêche des petits comiques d’usurper la crédibilité de sites de fact-checking pour faire de la fausse vérification de faits, dans le but de tromper les gens?

Par exemple: le New York Times publie une énorme enquête sur la corruption dans les services policiers de l’État de New York. Un site de faux fact-checking écrit un article intitulé: «Non, les services policiers de New York ne sont pas corrompus». Cet article utilise de faux «faits» pour «démentir» l’article du New York Times. Et – paf! – ça devient viral. Les lecteurs avertis verront bien que ça ne tient pas debout, mais est-ce que les «gens ordinaires un peu trop pressés» sauront faire la part des choses?

Notons que le concept n’est pas extraterrestre: l’inspecteur a trouvé en 2015 un site qui démentait des rumeurs qui n’existaient pas.

La confiance envers les médias d’information continuera de dégringoler

media-mensonge

Beaucoup de gens ne font plus confiance aux journalistes (voir: le mot-clic Twitter #TousPourris). On affirme que les médias font tous partie d’un genre de complot visant à désinformer les populations de la planète (cet argument ne tient tout simplement pas debout, mais bon).

Certes, les journalistes sont loin d’être parfaits. Mais si on jetait aux poubelles tout système imparfait plutôt que d’essayer de l’améliorer, il ne nous resterait pas grand-chose.

Dans l’ère des réseaux sociaux, il est trop facile de trouver un «média» qui nous raconte ce qu’on veut entendre. On veut croire que les changements climatiques n’existent pas? On peut s’abonner à un «média» qui nous le dira. On n’aura plus jamais besoin d’être confronté à des avis contraires. Et quand on verra un article qui nous dit que nous avons tort, on aura juste à traiter «les médias» de menteurs!

En 2017, comme en 2016, non seulement tout le monde a droit à son opinion, mais tout le monde juge avoir le droit à ses propres faits, taillés sur mesure pour se conformer à ses opinions.

Ça, c’est mauvais pour les médias d’information sérieux, qui tentent tant bien que mal de comprendre le monde et de relayer de l’information de manière nuancée et professionnelle, mais c’est aussi ultra-mauvais pour la société. Ne vous demandez pas pourquoi les opinions sont plus polarisées que jamais.

La civilisation occidentale s’effondrera

Apocalyptic scenery with destroyed city

HA HA – ben non, c’est une farce. Ça prendra beaucoup plus qu’un an pour que les sociétés modernes, formées d’électeurs emmitouflés dans des bulles de pseudo-informations polarisantes et dépourvus de tout point de repère, cessent d’être le théâtre de débats chauds, mais sensés, et laissent plutôt place à des confrontations de plus en plus violentes entre des parties absolument convaincues du bien-fondé de leurs opinions parce qu’elles ne consomment que de l’information de piètre qualité ou même carrément mensongère, qui leur confirment ce qu’elles savent déjà!

Probablement!

Bonne année!

 

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