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Les jarrets de l’espoir

Mes hommages. Il s’en est passé, de la lourdesse et du pas joli, ces deux dernières semaines. C’est pourquoi j’ai envie, en ce vendredi, de faire plus léger. De faire fi des birdies de Sam Hamad, de la police qui s’est trempé le pinceau à Haïti et de l’usine de chapeaux d’âne en feutrine que Trump s’apprête à inaugurer pour couvrir le crâne des médecins qui osent pratiquer l’avortement sans se sertir la cuisse d’un cilice en pics-pics pour se punir l’hérésie (et essentiellement tacher leurs culottes de cuir).

Gentilshommes et damoiselles, n’ayez crainte: l’espoir subsiste. Absolument. Et sa lueur, quoique parfois discrète comme les sourcils de Liza Minnelli, s’est matérialisée mercredi aux mollets d’un citoyen. Un brave. Un irréductible festivalier qui n’a que faire que la marmotte ait levé les pattes sans avoir vu son ombre. Vous le connaissez. Vous le croisez même chaque année.

Mais il est de ces gens qu’on oublie. Des gens qui, quand ils ressurgissent, ont cette familière aura de chalet en bois rond et de soupe servie dans un bol en pain, pur réconfort pour l’âme meurtrie par les équinoxes qui jouent rough.

Le gars en bermuda au mois d’avril.

Ce gars que, au moindre signe de redoux, je honnis pourtant avec mon index gelé dans mes petits gants de moto en me demandant à qui diable il tente d’en faire accroire. Ne voit-il pas, ne sent-il pas la bise? Tout le monde se promène prostré vers l’avant, wrappé dans une couette retenue par des élastiques à homard, le facteur vent au cul. Mais pas lui. Oh! pas lui. Paré de ses shorts de ska, il pavane du jarret. Il appelle le printemps. Il sent le coconut et le pur noisetier.

Règle générale, l’impétueux individu use pourtant de prudence et ne s’expose les cannes qu’en cas de ciel dégagé. Eh! bien, cette année, mon premier gars en bermuda se tenait debout, juste là, droit comme un beam, dans la tempête. La tempête du siècle. La dernière. Celle qui a frosté tes verres Crizal et qui t’a mis en beau tabarli, ce mercredi. Celle qui t’a fait rédiger ce vilain statut Facebook contenant un «zut» et un «trou de pet». Celle qui, chaque année, te fait oublier que malgré tes petits poings crispés et ta fourche noircie, l’été reviendra. Il revient toujours, Cécile.

Et le fait de voir ces deux grands jarrets cyanosés, dont chaque poil rendait hommage au grand verglas de 1998 (je vous jure que j’y ai vu des pylônes affaissés), plantés dans des Converse saumon qui s’ennuyaient de leur mère, m’a chavirée. Il y avait plus de résilience dans son refus de l’hiver que dans les sept saisons de Yamaska. Jeune homme, qui que tu sois, sache que tes engelures aux tibias, petits Mel Gibson au visage mi-bleu, mi-Paramount, m’ont rallumé la torche. Merci.

Je terminerai sur cette vivifiante phrase entendue ce même mercredi à L’Épicerie : «En hiver, on n’aime pas tellement le grésil. Au restaurant, on aime que ça grésille.»

Ce sera tout. La bise.

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