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Dans la froidure de novembre

Photo: Josie Desmarais/Métro

On a battu des records de froid pour un mois de novembre au Québec la semaine passée. Dans des cas comme ceux-là, un Québécois qui se respecte ne dit pas simplement qu’il fait très froid mais bien «qu’y fait frette en TA». Si j’en vois un seul me dire que ce n’est pas une formulation française correcte, je lui fais manger ses mitaines. Il n’y a aucun autre moyen d’exprimer le feeling qu’on ressent quand notre corps se crispe sous notre manteau parce que le vent glacial rentre dedans, alors qu’on sait que l’autobus n’arrivera pas avant cinq interminables minutes, ou que le chauffage de l’auto ne chauffera pas vraiment avant qu’on ait presque la moitié du chemin de fait. 

Quand on arrive enfin au bureau autour de la machine à café, pour aller chercher notre récompense toute chaude parce qu’on est convaincus qu’on vient de traverser l’équivalent de la Sibérie nus pieds, on entend juste ça: «Ouin ben coudonc, on s’est fait voler l’automne c’t’année! Ça commence rough cet hiver-là!» C’est vrai qu’on les a sorties tôt nos mitaines et nos bottes, parce qu’on est en novembre et l’hiver n’est techniquement pas encore arrivé, mais on a déjà les deux pieds tout mouillés dans la slush. 

Je ne sais pas pourquoi, malgré mon positivisme habituel, je ne suis pas capable de m’enlever de la tête qu’effectivement, ça commence rough. Je me répète que c’est niaiseux, qu’on chiale toujours pour rien en ce qui concerne la météo au Québec et qu’il faudrait en revenir… mais rien n’y fait. L’été, c’est la canicule, la sueur nous coule dans le bas du dos et on n’en peut plus de se faire répéter aux nouvelles qu’il faut boire de l’eau. L’hiver, on surveille la marmotte en se croisant les doigts pour qu’elle nous annonce le printemps, parce qu’on reste enroulés dans une couverte sur le sofa dès qu’on entend les mots «refroidissement éolien». 

Mais en novembre? Ce n’est ni l’hiver ni l’été, pourtant on a encore besoin de chialer, particulièrement cette année. Le fait de nous plaindre à tous nos collègues ou à nos amis Facebook qu’on gèle ne va certainement pas nous réchauffer, ça c’est vrai. Mais ce qu’il y a de bon dans la froidure de novembre, les Cowboys Fringants le chantent: «elle nous permet de nous coller plus ensemble». C’est que dans ce chialage collectif, pour une fois, presque tout le monde est d’accord et mine de rien, ça fait du bien. On ne s’acharne sur personne sauf Mère Nature et la maudite météo du Québec et ça tombe bien, elles ne le prennent pas personnel. Alors au fond, si on peut déverser notre fiel sur lui, ce novembre froid et morose nous fait à tous le plus grand bien, particulièrement quand on se rappelle qu’il n’est pas éternel.

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