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Claude Julien parle le flou

journalistes Canadien
Jean-Philippe Pleau - Le Sportnographe

Bon, je sais, Canadien te donne la frousse ces jours-ci. C’est que tu as commencé depuis un boutte à dire à tes enfants que Canadien ferait les séries – en fait, tu leur as garanti qu’il les ferait –, et là, t’as peur de passer pour un père épais.

Rassure-toi; dans les annonces de tv, les pères ont l’air encore plus caves que ça quand on leur fait jouer des rôles de tatas dans une cuisine. Ah, c’est aussi ton cas? Désolé.

N’empêche que c’est vrai, on ne sait pas trop si Canadien fera les séries. Qu’importe, Canadien est somme toute une bonne équipe cette année et j’ai eu envie de m’essayer ici avec une énième hypothèse pour expliquer pourquoi. Vous me direz ce que vous en pensez.

Oui, Claude Julien parle n’importe comment. Enfin, c’est la conclusion à laquelle on peut arriver. Prenons par exemple cette citation de Claude, tirée d’un point de presse cette saison: «Ne pas trouver le gars libre et puis un but totalement ouvert ousse qui lance, c’est des erreurs qui reflètent beaucoup sur nous devant lui plus que c’est lui à part comme j’ai dit du cinquième but.»

En fait, Claude donne l’impression d’être toujours flou, tel ce personnage-acteur interprété par Robin Williams dans le film Harry dans tous ses états et qui apparaît flouté à l’écran malgré que le réalisateur s’acharne sur le plateau à faire le focus. À l’image de ce personnage flou imaginé par Woody Allen, Claude Julien est un humain confus, désorienté, qui doute et dont la vulnérabilité transparaît, comme presque assumée. Mais c’est beau, je trouve.

Il est vrai que le flou a mauvaise presse dans la vie quotidienne; en revanche, il ne faudrait pas passer à côté du fait que, dans le monde des arts, le flou a plutôt bonne réputation. Et ma foi du bon Dieu, Canadien jouant presque comme des artistes cette saison, y’a donc qu’un pas à franchir pour dire que le hockey est de l’art; et je vais le franchir à l’instant.

Le hockey étant de l’art, moi je pense que, quand Claude Julien parle flou, ses joueurs font comme des spectateurs devant une œuvre d’art: ils se disent que Claude, à la manière de Monet et les impressionnistes, s’est affranchi du discours rationnel, froid et carré, et ils cherchent donc, dans les zones d’ombre et les parts de flou de son discours, tout ce qui peut se comprendre. Ainsi, chaque joueur se fait sa propre interprétation de ce qu’il a essayé de dire. Pour eux, «voir flou» devient paradoxalement «voir plus clair», car le flou démultiplie la vision.

Ça marche moins bien pour Charles Hudon et Antti Niemi, que je vous entends me dire. Vous avez raison. Mais vous savez, y’a des gens qui n’ont jamais ressenti quoi que ce soit devant les toiles abstraites des automatistes dans les années 1940, alors que ceux qui ont alors baissé leur garde et accepté d’ouvrir les yeux en dehors du cadre de la logique rationnelle frette ont vu dans ce flou l’annonce de la fin de la grande noirceur.

Y commence à faire clair chez Canadien. Claude Julien est un artiste. Le Borduas du coaching.

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