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Encore un sondage difficile à interpréter

Businessman and businesswoman in a meeting Photo: Métro

IPSOS, une société internationale de marketing d’opinion, vient de livrer un nouveau sondage dont quelques questions portent sur l’immigration.  Un résultat en particulier m’a laissé perplexe et donne à penser que la perception négative face à l’immigration, telle que mesurée dans le sondage, serait quelque peu exagérée.

Voyons-y de plus près. Ce sondage, rapporté dans La Presse du 27 mai dernier, a été réalisé entre le 29 avril et le 2 mai 2018 auprès de 2001 personnes. Tel que rapporté par La Presse, 76% des personnes interviewées ont répondu que «les immigrants imposent trop souvent leurs valeurs et leur religion». Ce chiffre est pour le moins surprenant.

Dans un autre sondage Léger & Léger, effectué pour le Bureau d’intégration des nouveaux arrivants à Montréal (voir mon blogue), seulement 42% des répondants de la région de Montréal étaient d’accord avec l’énoncé suivant: «les immigrants cherchent à nous imposer leur culture». C’est le mot «imposer» qui rend les deux questions fort similaires. Or, si l’on retient ce 42% pour la région de Montréal, même en supposant que le reste du Québec a répondu «oui» à 100%  (ce qui est improbable), on n’arrive pas au pourcentage de 76%.

Comment réconcilier cette différence? Faisons l’hypothèse que les deux sondages sont valables. Trois facteurs peuvent intervenir pour expliquer les écarts. (1) Il s’agit de deux entreprises de sondages différentes avec leur propre méthodologie, en particulier en ce qui concerne le choix des répondants (échantillonnage). (2) Le vocabulaire est différent: dans un cas (IPSOS), on parle de «trop souvent»; dans le cas de Léger & Léger,  on ne mentionne pas de fréquence. On peut penser que la notion de «trop souvent» est très subjective et est comprise de façon variable selon les personnes. (3) Les opinions peuvent changer dans le temps: il y a environ 5 mois de délai entre les deux sondages (23 novembre -2 décembre 2017 versus 29 avril – 2 mai 2018).

Même si les trois facteurs peuvent avoir joué, j’opterais personnellement pour le deuxième facteur. En ce qui concerne l’échantillonnage, les deux entreprises de sondages sont généralement reconnues pour leur rigueur. Et je ne pense pas que les opinions peuvent changer autant en 5 mois, sauf s’il y avait eu un évènement catastrophique pouvant durcir les opinions. Je n’en vois pas.

Ceci dit, je ne voudrais pas minimiser l’importance des perceptions négatives face à l’immigration au Québec. Celles-ci existent et concernent une partie suffisamment importante de la population pour que l’on en tienne compte.

Un autre résultat m’a également frappé dans le sondage d’IPSOS. Le taux de confiance envers les scientifiques (chercheurs et professeurs d’université) est de 85%, comparé à 18% pour les politiciens! Comment comprendre alors que les perceptions soient si négatives quand on constate que les analyses scientifiques donnent généralement une vision positive de l’immigration? Peut-on penser que les discours politiques présentant l’immigration comme un problème plutôt que comme un atout ont fait leur œuvre?

Un point est rassurant: les perceptions des Montréalais sont généralement positives en matière d’immigration. Ne faudrait-il pas laisser à ceux-ci l’initiative de «gérer leur diversité»?

Bref, le travail de déboulonnement est donc loin d’être terminé.

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