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L’impact économique de l’immigration: de nouveaux résultats 

Les travaux sur l’impact économique de l’immigration ont produit jusqu’à récemment des résultats mitigés, parfois contradictoires. Deux lacunes méthodologiques fondamentales limitaient fortement les recherches antérieures. La plus importante est la nature transversale des données. L’intégration économique des immigrants est un processus qui se déroule dans la durée, processus qui implique nécessairement des approches longitudinales. Une autre lacune importante était liée à l’impossibilité de faire des analyses au niveau de l’entreprise lorsqu’on s’intéressait à l’impact de l’immigration sur l’économie et donc la nécessité d’utiliser des données agrégées.

La conférence organisée par le CIQSS (Centre interuniversitaire québécois de statistiques sociales) en octobre 2018 s’était donné comme objectif d’examiner dans quelles mesures le jumelage de plusieurs sources d’informations dans de nouvelles bases de données longitudinales pouvait permettre d’apporter un éclairage nouveau sur une question fortement débattue, à savoir l’impact économique de l’immigration.

Basées sur ces nouvelles données liant entreprises et employé-e-s, les études présentées lors de cette conférence se sont attaquées à l’impact de l’immigration sur l’entrepreneuriat, la productivité, le commerce international et les exportations. Dans tous les cas, les résultats montrent un impact positif de l’immigration (voir le rapport de synthèse de la conférence disponible sur le site WEBB du CIQSS).

Ceci dit, les effets demeurent faibles. Doit-on s’en étonner? Pas vraiment. Il faut réfléchir à ce que signifient des effets « faibles » dans le cas spécifique de l’immigration. D’une part, l’argument démographique est important ici : au niveau global (par exemple au niveau national), lorsqu’on examine l’impact du nombre d’immigrants, mesurée comme la proportion d’immigrants sur la population totale, le dénominateur (la population nationale) est très élevé de sorte que l’ajout d’immigrants au numérateur ne peut que donner des résultats faibles. C’est pourquoi les analyses au niveau des entreprises, maintenant possibles grâce aux nouvelles bases données comme on l’a vu dans les études présentées à la conférence, donnent de meilleurs résultats.

D’autre part, on pourrait invoquer un autre type d’argument pour mieux comprendre la portée réelle des effets. Prenons l’exemple d’une entreprise de 20 employés qui embauche deux travailleurs immigrants. Le résultat usuel prédirait que ces deux travailleurs auraient un effet positif, mais faible, sur les indicateurs de performance de l’entreprise (productivité, profits, etc.). Pourtant, l’embauche de ces deux travailleurs pourrait avoir permis à l’entreprise de survivre et/ou d’éviter la décroissance. Les méthodologies actuelles ne permettent pas de mesurer ce type d’effet. Bref, dans ce contexte, l’idée d’un «effet statistique faible» prend tout son sens et pourrait constituer au contraire un résultat significatif.

En fait, c’est la question inverse qu’il faudrait poser: qu’est-ce qui arriverait si l’on retranchait les travailleurs immigrants des entreprises (le passé) ou si les entreprises n’arrivaient pas à recruter les travailleurs requis (le futur)? Il n’existe pas véritablement de méthodologie pour mesurer ce type d’effet. Pour le moment, une approche possible serait de poser la question aux employeurs de travailleurs immigrants, en leur demandant ce qui serait arrivé sans l’apport de ces travailleurs. De plus, au-delà de l’entreprise, d’autres effets non mesurés pourraient affecter par ricochet les emplois des travailleurs natifs (pertes d’emploi) et les autres entreprises de service (transports, produits intermédiaires, etc.).

La table est mise pour d’autres études novatrices.

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