Montréal n’a pas besoin de hockey

Quelqu’un m’a dit hier que les gens qui recommençaient à regarder le hockey étaient comme des fumeurs qui reprenaient leur mauvaise habitude juste au moment où ils commençaient à s’habituer. C’est à peine exagéré.

Ça fait des mois qu’on entend les fans maugréer que le lock-out n’est qu’une chicane de millionnaires qui se fichent de leur public. Et que font les fans lorsque les millionnaires ont fini de se chicaner? Ils en redemandent.

Pour la fierté, on repassera. Un chroniqueur sportif a écrit qu’il avait honte d’admettre qu’il était content que le hockey recommence. L’étape après ça, c’est la cure de désintox…

La prochaine fois que la Sainte-Flanelle remportera une ronde des séries, des éditorialistes habituellement sérieux tenteront encore de justifier l’injustifiable en glorifiant le caractère rassembleur du Canadien, qui dépasse les classes sociales et la langue.

En effet. On est là, quelques millions d’âmes et de corps ordinaires à se réjouir ou se désoler des hauts et des bas d’un groupe de surhommes qui ne font que passer, à espérer quelques victoires afin qu’il se passe quelque chose qui nous fasse tous rêver.

Ça en dit long sur nos aspirations collectives, et même sur l’estime qu’on porte à nos leaders politiques, qui peuvent avoir un impact autrement plus important sur nos vies…

Ben non Déry, tu capotes, le hockey c’est un divertissement, arrête de t’énerver.

Ça fait longtemps que ça a arrêté d’être divertissant. Le Canadien n’inspire plus grand-chose depuis presque vingt ans, mais on continue à le suivre comme un mauvais téléroman, en espérant une meilleure fin. Et on est incapable de débrancher par soi-même. Ça prend un lock-out. Mais on a raté l’occasion d’en tirer des leçons.

Contrairement à ce qu’affirme Geoff Molson, Montréal n’a pas besoin de hockey. Pas du sien, en tout cas. L’énergie collective qui est mise en latence non seulement les soirs de matchs, mais la veille et le jour d’avant, à supputer le scénario de la joute ou à décortiquer son résultat à l’infini, est une pure perte. La métropole hiberne 80 soirs par année, plus encore si le CH fait les séries. Qu’on en met donc du temps sur ce projet improductif qu’est le hockey professionnel, et qui ne nous donnera jamais plus qu’une chance sur 30 d’avoir un vrai party à la fin de la saison!

Regardez Québec. La capitale ne s’est jamais si bien portée depuis que les Nordiques ont foutu le camp pour Denver. Les Remparts et le Rouge et Or – des athlètes plus accessibles, et dont la plupart poursuivent des études  – ont pris une place qu’ils n’auraient jamais eue si les Bleus étaient restés. Des terrains de soccer ont poussé un peu partout.

L’économie de la ville se porte très bien, merci. Rien ne se perd, rien ne se crée, l’argent est allé ailleurs. Pour rêver, Québec s’est donné d’autres projets. Son dynamisme fait maintenant l’envie des Montréalais, qui peuvent critiquer sa radio un peu débile et son maire hyperactif, mais qui ne peuvent néanmoins que constater le succès.

Le pire, c’est que Québec, ragaillardie, essaie maintenant de ramener une équipe de hockey professionnel et de se doter en même temps d’un nouveau colisée. Pas facile d’arrêter de fumer…

Note : À ceux qui pensent que l’auteur est un intello frustré qui déteste le hockey, sachez que j’en suis à ma troisième opération aux genoux, juste pour pouvoir continuer à goûter le plaisir de jouer. Et je vais regarder des matchs même quand le Canadien sera éliminé…

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