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Notre réponse à la pandémie pourrait-elle nous aider à éliminer l’hépatite C?

La Journée mondiale contre l’hépatite C (28 juillet), chaque année, m’incite à l’expliquer à tout le monde qui veut bien m’écouter: l’hépatite C est une infection virale affreuse qui peut endommager sévèrement le foie et même causer la mort, mais qui est évitable et guérissable. Et il n’y a aucune raison pour que nous ne puissions pas l’éliminer du Canada. De fait, notre gouvernement s’est engagé en 2016 à le faire, précisément, mais nous sommes loin du but.

La nouvelle maladie à coronavirus (COVID-19) pourrait-elle changer la donne?

Nous savons déjà que l’hépatite C peut être éliminée. En donnant des médicaments aux personnes qui ont l’hépatite C, on peut guérir plus de 95 % des cas. Les programmes de proximité et de dépistage peuvent nous aider à trouver les personnes qui ont besoin de ces médicaments. De plus, des programmes de réduction des méfaits, comme ceux d’aiguilles et de seringues et les sites d’injection supervisée peuvent empêcher la transmission de l’infection, ce qui sauve des vies et économise les ressources en soins de santé.

Pourtant, il y a un écart frustrant entre ce que la recherche indique que nous pouvons accomplir et ce que font concrètement les décideurs politiques.

L’Australie, la France, le Japon, la Corée du Sud et le Royaume-Uni ont tous mis en œuvre de solides stratégies pour prévenir, dépister et traiter l’hépatite C. Ils sont sur la bonne voie pour éliminer cette infection d’ici 2030 en tant que menace pour la santé publique. L’Italie et l’Espagne, en dépit de leurs difficultés dans la réaction à la pandémie de COVID-19, sont également sur la bonne voie pour éliminer l’hépatite C. Le Canada est en retard sur tous ces pays, en dépit de son système de soins de santé de première classe.

C’est une nouvelle déprimante pour une personne dont le travail consiste à aider ce pays à éliminer l’hépatite C. Mais la pandémie de COVID-19 et notre réponse de santé publique à celle-ci ont ouvert des avenues que l’on pourrait mettre à profit pour atteindre cet objectif.

Les laboratoires de diagnostic ont reçu un afflux de ressources pour répondre à la demande de dépistage du coronavirus. Mais ce n’est pas qu’une question d’argent. Les appareils, les effectifs et les pratiques de notification ont également été renforcés et perfectionnés, et certaines de ces améliorations dureront longtemps après la pandémie de COVID-19.

Ce renforcement de notre capacité de diagnostic peut également être utile à la lutte contre l’hépatite C. Après la pandémie de COVID-19, les appareils, les laboratoires et le personnel mis à l’échelle pour diagnostiquer la COVID-19 pourraient être redirigés vers le diagnostic de l’hépatite C. Plusieurs de ces ressources pourraient être partagées avec les services communautaires de santé, où des projets pilotes ont démontré que le dépistage de l’hépatite C peut être effectué avec précision, rapidement et aisément.

L’hépatite C touche plusieurs groupes différents, au Canada, mais les personnes sans abri et les personnes vivant dans la rue sont plus vulnérables. La stigmatisation et la longue période d’incubation de l’hépatite C posent des obstacles au diagnostic, mais la situation est encore plus compliquée lorsqu’une personne n’a pas accès régulièrement à des services de santé ou est confrontée quotidiennement à des dilemmes plus pressants, comme trouver un endroit pour dormir.

Le travail de proximité et de dépistage par les pairs est une stratégie conçue pour surmonter ces défis. Plutôt qu’attendre que les personnes sans abri et autres personnes marginalisées se présentent dans ses locaux, la clinique leur envoie des pairs comme prestataires communautaires de services. Ceux-ci effectuent eux-mêmes des dépistages dans leur milieu de vie.

La possibilité que la COVID-19 se propage dans les refuges et campements où vivent des personnes sans abri a suscité une réponse de santé publique comme on n’en avait jamais vue au Canada pour une population aussi marginalisée. Les services fournis par des pairs dans ces milieux incluent à présent le dépistage de la COVID-19; certains prestataires de services profitent de l’occasion pour offrir également le dépistage de l’hépatite C.

Rien de tel qu’une pandémie pour démontrer l’interdépendance en santé publique.

Notre santé dépend de celle des membres les plus vulnérables de la société. L’omission de tenir compte de la santé des autres aura des conséquences pour nous tous.

La COVID-19 démontre à quel point la santé publique est un bien collectif: nous sommes tous touchés par les risques d’une mauvaise santé et les avantages d’une bonne santé, que nous soyons malades ou non.

Cela renforce les demandes de garantir l’accès aux soins de santé pour tous les nouveaux arrivants, à des congés payés pour les personnes malades et à un logement immédiat pour les personnes sans abri. J’espère que cette compréhension améliorée fait partie des changements qui nous accompagneront au-delà de la pandémie de COVID-19.

Éliminer l’hépatite C et améliorer la santé de chacun, ce n’est pas seulement la bonne chose à faire: c’est une stratégie de santé publique intelligente qui profitera à tous.

Laurie Edmiston, de l’organisme CATIE, source canadienne de renseignements sur le VIH et l’hépatite C

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