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À la dérive

Photo: Archives
Coalition des psychologues du réseau public québécois - Collaboration spéciale

Certains adolescents ont réussi à conserver leur équilibre psychologique pendant la pandémie. Malheureusement, pour plusieurs, cet équilibre est une histoire ancienne. Ces jeunes sont partis à la dérive, parfois malgré un environnement soutenant. Est-ce que nous en faisons assez pour eux, pour ceux qui ne présentent pas seulement de la détresse, mais bien des difficultés psychologiques affectant leur fonctionnement et, dans certains cas, menaçant leur vie? Comme psychologues, nous voyons régulièrement des jeunes qui tentent si bien que mal d’aider leurs ami(e)s déprimé(e)s ou suicidaires qui n’ont pas accès aux services appropriés. Certains nous expliquent qu’ils passent des nuits blanches à texter avec eux pour ne pas les laisser seul(e)s au moment où leurs idéations suicidaires augmentent au point de les rapprocher dangereusement d’un passage à l’acte. Certains adolescents qui tentent d’aider les plus souffrants s’épuisent et développent eux-mêmes des difficultés psychologiques.

Il ne fait nul doute que les jeunes ayant développé un trouble alimentaire, des idéations suicidaires sérieuses, des excès de violence ou des problèmes de dépendance ont besoin d’aide spécialisée incluant celle d’un psychologue. Comme la vaste majorité des problèmes cardiovasculaires exigent l’implication d’un cardiologue, la majorité des difficultés psychologiques sérieuses exigent l’apport d’un psychologue. L’implication du psychologue permet d’identifier la source du problème et de la traiter, de faire en sorte que la personne retrouve son équilibre et redevienne fonctionnelle. Le psychologue, tout comme le cardiologue, travaille avec plusieurs autres professionnels essentiels dans ces situations complexes. Toutefois, il ne peut en aucun cas être remplacé par un autre professionnel. Malheureusement, c’est ce qui se passe sur le terrain depuis plusieurs années, et les problèmes psychologiques se complexifient et se chronicisent. Des postes de psychologues sont souvent transformés et remplacés par d’autres titres d’emploi. De plus, dans plusieurs secteurs du réseau public, les postes de psychologues restent vacants en raison des piètres conditions de travail. Tranquillement, mais sûrement, la profession de psychologue disparaît de nos hôpitaux, de nos centres de réadaptation, de nos CLSCs, de nos écoles, de nos cégeps, de nos universités et de nos centres jeunesse. Il manque présentement plusieurs centaines de psychologues dans le réseau et le gouvernement estime qu’il manquera près du tiers des effectifs d’ici deux ans. Les plus grands perdants sont les Québécois.

Certains nous trouveront peut-être alarmistes, mais les chiffres des hôpitaux pédiatriques appuient nos dires. On note entre autres une augmentation des jeunes hospitalisés en raison d’idéations suicidaires ou de blessures importantes résultant d’une tentative de suicide. Certains en garderont malheureusement des séquelles avec lesquelles ils devront composer pour le reste de leur vie. Les hôpitaux sont également remplis de jeunes ayant développé de l’anorexie, une maladie qui menace leur vie.

Certains baisseront les bras devant le nombre impressionnant de Québécois qui ont actuellement besoin d’aide psychologique. Sachez que d’aider une jeune

personne très souffrante a un impact positif sur une multitude de gens qui l’entoure : ses parents, ses ami(e)s, ses enseignants. Pour les adultes: sa/son conjoint(e), ses enfants et ses collègues de travail. Ainsi, améliorer l’accessibilité des psychologues aux gens les plus souffrants peut aider indirectement plusieurs personnes. Les psychologues sont également formés pour agir comme consultant auprès d’équipes. Un(e) seul(e) psychologue peut donc avoir un impact positif significatif dans une école, dans un groupe de médecine familiale, dans un CLSC ou dans une équipe médicale dans un hôpital. De plus, le Québec a, de loin, le ratio de psychologues par habitant le plus élevé comparativement à toutes les autres provinces. Alors, ne perdons pas espoir. La solution est à notre portée!

Afin que les Québécois puissent avoir accès aux psychologues dans des délais raisonnables, la Coalition des psychologues du réseau public québécois vous invite à signer sa pétition que vous trouverez sur son site web (https://www.coalitionpsy.org/petition). Ensemble, nous serons porteurs de changements et nous pourrons évoluer vers une société moins empreinte de souffrance psychologique, de violence, de problèmes de dépendance et de prise d’antidépresseurs. Une société où la santé psychologique sera considérée dans toute sa complexité. Et rappelons qu’en rendant les psychologues plus accessibles, le Québec économisera énormément d’argent en diminuant les coûts associés aux médicaments psychotropes, aux hospitalisations, aux visites à l’urgence, aux congés de maladie et aux appels à la police. Moins de souffrance et moins de dépenses!

Karine Gauthier, M.Ps., Ph.D., psychologue et présidente de la Coalition des psychologues du réseau public québécois

Catherine Serra-Poirier, Psy. D., Ph.D., psychologue et vice-présidente liaison de la Coalition des psychologues du réseau public québécois

Béatrice Filion, D.Psy., psychologue et vice-présidente secrétaire de la Coalition des psychologues du réseau public québécois

Connie Scuccimarri, Ph.D., psychologue et administratrice de la Coalition des psychologues du réseau public québécois

Marc-André Pinard, D.Ps., psychologue et administrateur de la Coalition des psychologues du réseau public québécois

Loredana Marchica, Ph.D., psychologue et responsable des communications de la Coalition des psychologues du réseau public québécois

Youssef Allami, Ph.D., psychologue et administrateur de la Coalition des psychologues du réseau public québécois

Vickie Beauregard, Ph.D, psychologue et administratrice de la Coalition des psychologues du réseau public québécois

Au total, 501 psychologues ou doctorants en psychologie, membres de la Coalition des psychologues du réseau public québécois, ont signé cette lettre

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