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La grande déception

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Nous voulons que nos jeunes demeurent motivés. Nous leur dressons donc un portrait trop positif de l’emploi qui les attend après leurs études.

Il y a quelques années, j’ai participé avec d’autres professionnels à un panel organisé par Hydro-Québec. Le but était de recueillir nos impressions sur leur publicité destinée aux jeunes. À l’époque, Hydro craignait de manquer de relève et voulait encourager les candidatures de nouveaux diplômés.

Plusieurs d’entre nous ont exprimé l’opinion que la publicité devrait donner une idée juste de la nature de l’emploi et ne pas encourager les fausses impressions. Nous nous étions montrés particulièrement critiques à l’égard d’une publicité destinée à l’imprimé. Elle montrait une jeune alpiniste affrontant la montagne et comparait cette aventure excitante à celle qu’expérimenterait un jeune dans une nouvelle carrière chez Hydro-Québec.

Voilà est un exemple simple de notre désir collectif de présenter aux jeunes une image positive du marché du travail, de peur qu’ils ne se découragent et quittent leurs études. C’est compréhensible lorsqu’on sait que le taux de décrochage peut atteindre quasiment 30 % dans certaines régions du Québec.

Ce n’est pas seulement la publicité donc, mais aussi les enseignants, les parents et les conseillers qui annoncent aux jeunes que leurs études leur permettront d’obtenir un emploi intéressant et d’atteindre leurs objectifs. Il ne faut donc pas être surpris si les jeunes subissent un choc lorsqu’ils accèdent à leur premier emploi, un phénomène relevé par un avis récent de la Commission des partenaires du marché du travail.

En effet, le début de la carrière a toujours été un moment difficile. Il faut commencer en bas de l’échelle et exécuter les tâches les moins intéressantes. Tout le monde a plus d’expérience que nous et se sent libre de nous donner des conseils non voulus ou des ordres voilés. La liberté relative de la vie d’étudiant est remplacée par un horaire strict et une obligation de résultat à laquelle on nous a mal préparés. Tout ça, pour moins d’argent que ce qu’on avait espéré, car il faut bien payer ses dettes scolaires et devenir autonome.

Ajoutez à cela que, de nos jours, plusieurs jeunes ne travaillent pas dans un domaine d’activités qu’ils ont choisi, qu’ils héritent souvent d’emplois précaires. Il n’est pas surprenant de constater qu’ils se montrent déçus et sautent d’un emploi à l’autre, des comportements que les employeurs réprouvent.

Mais ce sont nous, les adultes, qui sommes les grands responsables de cette situation. Nous avons «vendu» aux jeunes l’emploi et la formation comme s’il s’agissait de biens de consommation. Les jeunes les «achètent» donc, comme tout autre bien de consommation, pour les bénéfices qu’ils peuvent en tirer. Lorsque les bénéfices ne se concrétisent pas, ils se comportent bien évidemment en consommateurs trompés et retournent la marchandise.

Choisir une formation ou une carrière n’est pourtant pas un geste de consommation. C’est le premier pas vers l’apprentissage de ce que signifie, justement, devenir un producteur plutôt qu’un consommateur.

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