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Quelle limite au temps passé devant les écrans?

TORONTO – Le temps consacré par les enfants et les adolescents aux télévisions, ordinateurs et gadgets numériques est la source de bien de questionnements chez les parents: combien de temps est-il raisonnable de passer devant des écrans dans une journée? Et est-ce nuisible pour le développement et la santé des enfants de vivre en partie dans ce monde virtuel?

La réponse, selon les experts: «ça dépend».

L’âge des enfants est une importante donnée, explique Matthew Johnson, le directeur de l’éducation chez Habilo Médias, un organisme canadien d’éducation aux médias et de litéracie numérique.

«La plus grande préoccupation touche les enfants très jeunes», dit-il. «Bien sûr, ils sont vraiment absorbés par les écrans. Mais cela ne les stimule pas… Pour ce groupe d’âge, il n’y a aucune preuve que les médias peuvent avoir une bénéfice éducatif.»

Le Société canadienne de pédiatrie et l’Académie américaine de pédiatrie recommandent toutes deux de ne pas du tout exposer les enfants de moins de deux ans aux écrans. L’organisme américain est toutefois en train de revoir ces lignes directrices et de nouvelles recommandations seront émises l’an prochain.

Le docteur Michael Rich, directeur du Centre sur les médias et la santé des enfants de l’Hôpital pour enfants de Boston, indique qu’à la place d’investir du temps de manière passive devant les écrans, les jeunes enfants devraient être stimulés par d’autres activités pour assurer leur développement cognitif.

«Même de regarder des gouttes d’eau tomber le long d’un rideau de douche pendant que sa maman se lave est plus stimulant pour l’enfant que s’il est placé devant la télévision», illustre-t-il.

Pour que le cerveau d’un bambin se développe de manière optimale, il doit entrer en interaction avec d’autres personnes et avec le monde physique, sans oublier les périodes de jeu libre.

«Donc une page blanche et un crayon, c’est mieux qu’un iPad», laisse-t-il tomber.

Jennifer Rollins, une mère d’Edmonton qui tient un blogue sous le pseudonyme Tech Mommy, se rapelle d’avoir déjà laissé sa fille de deux ans Tenesea utiliser son téléphone pour la calmer dans un restaurant.

Lorsque Tenesea avait trois ou quatre ans, Mme Rollins lui passait son iPad pour ne pas qu’elle entende ses parents se chicaner.

«Elle l’utilisait beaucoup, probablement trop», admet la maman de 39 ans. ��J’étais vraiment en faveur des écrans, grandement parce que ça devenait comme une gardienne, alors qu’il y avait beaucoup de bouleversements autour d’elle.»

La nouvelle mère monoparentale a toutefois complètement changé d’approche. Tenesea, qui a maintenant 7 ans, et sa soeur Azalee, 3 ans, sont restreintes à une heure de jeux électroniques ou de vidéos YouTube par jour.

Bien qu’elle croie toujours qu’il est important pour les enfants de se maintenir à jour avec les technologies, Mme Rollins tente elle-même d’être un modèle pour ses enfants en laissant de côté son téléphone portable.

«Il y avait des journées où je pouvais envoyer 100 messages par jour. C’était devenu comme une échappatoire. Maintenant, j’envoie peut-être six messages par jour. J’essaye de ne pas trop utiliser mon téléphone pour avoir plus de temps de qualité avec mes filles et être vraiment là pour elles.»

Dr Rich s’accorde pour dire que l’image que donnent les parents à leurs enfants a une réelle incidence.

«Une des choses que j’observe est non seulement du temps de paix acheté en donnant un gadget à un enfant, mais des parents qui balancent leurs enfants au parc en regardant leur téléphone et en textant plutôt que de connecter véritablement avec leurs enfants.»

Dr Rich et M. Johnson sont toutefois en faveur de l’utilisation des technologies — particulièrement celles qui ont un contenu éducatif — pour les enfants d’âge préscolaire jusqu’à l’adolescence.

«Les médias électroniques nous offrent des possibilités que nous n’avions pas avant», explique M. Johnson. «Lorsque nous les utilisons de manière appropriée, elles peuvent s’avérer extrêmement intéressantes.»

Mais il est bien difficile de déterminer les limites au temps d’utilisation des écrans, soutient Dr Rich, qui ajoute que les parents devraient les voir comme des outils qui ont des côtés positifs et des aspects négatifs.

«Un iPad est un outil magnifique pour qu’un enfant puisse voir ce que c’est de grimper le mont Éverest… mais ce n’est pas le meilleur outil pour apprendre à dessiner, par exemple», observe-t-il.

Il recommande aux parents de prendre le temps de discuter avec leurs enfants du temps à consacrer aux écrans de même qu’à d’autres activités, telles que les devoirs, les activités physiques, la socialisation et le sommeil.

Une approche qui permet au parent de ne plus être confiné au rôle de policier. «L’enfant est encore le pilote de l’avion, mais le parent l’aide à décoller et à atterrir comme il faut», illustre-t-il.

Pour les adolescents, les médias numériques leur offrent un «environnement très fertile», croit Dr Rich.

La responsabilité d’un parent n’est pas d’interdire à ses enfants d’utiliser toutes les moyens technonologiqes qui sont à leur disposition, mais de les aider à bien discerner la qualité des différents contenus auxquels ils sont exposés.

«Plutôt que de voir la télévision, l’ordinateur ou les applications comme Facebook en tant que vecteurs du bien ou du mal, nous devons comprendre qu’il s’agit de l’environnement dans lequel les enfants vivent et grandissent et nous devons davantage les voir comme l’air qu’ils respirent, l’eau qu’ils boivent et la nourriture qu’ils mangent», lance Dr Rich.

«Parce que de toutes façons, ils vont en manger et en boire.»

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