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Comment Quadriga a sombré dans l’illégalité

Gerald Cotten, le fondateur de Quadriga Photo: Capture d'écran/YouTube

Cela ressemble à un règlement de compte ou un dédouanement moral par média interposé mais n’en mérite pas moins d’attention. Dans une tribune intitulée «Du légalisme à l’anarchie», Christine Duhaime, avocate vancouvéroise spécialisée dans la criminalité financière, dit dévoiler «des pans de l’histoire secrète de QuadrigaCX».

Elle entend surtout rétablir la vérité alors que, selon elle, la majorité de ce qui a été écrit à propos de la plateforme d’échange déchue repose davantage «sur la fiction que sur les faits». Christine Duhaime s’estime assez bien placée pour le savoir puisque, en 2015, elle était l’avocate chargée des aspects réglementaires de Quadriga.

Mais l’aventure ne durera pas longtemps, l’entreprise crypto mettant fin aux services du cabinet après six mois. L’avocate ne s’en cache pas, se félicitant au contraire de la tournure des événements parce que «QuadrigaCX a délité son management du jour au lendemain, ce qui l’a placée sur une pente glissante vers l’illégalité».

À l’époque, la cryptobourse canadienne, véritable pionnière de l’industrie, collaborait non seulement étroitement avec les différents gendarmes financiers du pays (Canafe, etc.), mais bénéficiait des conseils de quatre cabinets juridiques distincts, employait un comptable agréé responsable des états financiers, recourait à un auditeur indépendant et disposait même d’une assurance pour ses systèmes de stockage à froid de cryptoactifs.

L’avocate Duhaime explique en conséquence que, contrairement à ce qui a été précédemment affirmé, il existerait bien «quantité de documents», rapports comptables, judiciaires ou encore bancaires répertoriant les faits et gestes de la direction de la plateforme.

Créée en 2014, forte d’une base clients grossissant à vue d’oeil, QuadrigaCX avait pour ambition de devenir la première Bourse de cryptomonnaies au monde, cotée, régulée et dominante.

«Mais aucune histoire de Quadriga n’est complète sans comprendre que l’entreprise a été atomisée en trois sociétés, avec pour conséquence d’hériter d’une pléthore d’actionnaires dont elle ne connaissait absolument rien», souligne l’avocate Christine Duhaime.

D’avis d’experte, l’équipe des ambitieux geeks de Quadriga a ainsi été emportée par le marché de capitaux auquel elle n’était pas non plus familière et s’est retrouvée impliquée, à son insu, dans un des ces fameux «pump and dump de Vancouver».

Parmi les actionnaires, certains auraient d’ailleurs été laissés pour compte, évoque Christine Duhaime, n’étant jamais conviés aux assemblées générales et n’ayant jamais reçu le dividende de 1$ par action promis.

La spécialiste en lutte contre le blanchiment se penche alors en des termes peu flatteurs sur le cas du fondateur de Quadriga, Gerald Cotten, désormais connu de par le monde pour avoir emporté dans sa tombe l’accès aux fortunes investies en cryptomonnaies par les clients.

D’après elle, Cotten, qui ne voulait plus faire de Quadriga une société cotée, a soudainement licencié ceux qui, à ses yeux, étaient «les représentants de l’ordre» et a ainsi géré l’échange «comme s’il n’y avait pas d’investisseur, d’actionnaire, de régulateur et de loi».

Christine Duhaime termine son témoignage par un aveu d’ignorance, en énumérant une longue liste de questions restant en suspens à propos de QuadrigaCX. Elle assure ne pas savoir si des centaines de millions de dollars sont cachées sur d’autres comptes, ni pourquoi les adresses Bitcoin sont vides depuis un an, et pas plus «pourquoi les actionnaires n’ont pas tokenisé la plateforme» pour permettre aux clients de retrouver au moins une partie de leurs placements.

Autant d’interrogations qui prouvent que l’affaire Quadriga est loin d’être close et ne permettent pas de dissiper les craintes d’escroquerie dite exit scam, expliquait récemment à Métro une cryptoenquêteuse de l’autorité québécoise des marchés.

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