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Opioïdes: les Québécois de plus en plus conscients de la problématique

Un intervenant social montre comment utiliser un kit d'injection de drogues dures au site d'injection supervisée Le Cactus. Photo: Josie Desmarais/Métro

Une étude met en lumière la grandissante acceptabilité sociale de la population québécoise à l’égard des personnes qui consomment des substances psychoactives (SPA) et des programmes de «réduction des méfaits» de cette consommation. 

Pour le réseau de mobilisation sur la prévention et les surdoses (OPEN) qui a mené l’étude, les Québécois sont de plus en plus concernés par la problématique et la crise des opioïdes au Canada.

«Il y a une évolution de la perception qui se passe depuis plusieurs années. On est passé du “junkie de fond de ruelle” à la personne dépendante, malade puis je l’espère vers une personne qui à sa dignité, qui fait ses choix.»

David-Martin Milot, Professeur adjoint à l’université Sherbrooke

Du chemin reste à faire

La consultation des différents groupes révèle toutefois des réticences sur les méthodes de réduction des méfaits. Pour certains d’entre eux les mesures sont perçues comme facilitant la consommation de SPA notamment en ce qui a trait aux prescriptions médicales ou l’accès à des sites d’injection.

«Les gens pensent que si l’on prescrit des opioïdes, cela encourage la consommation. Ce n’est pas du tout l’intention, on accompagne ces personnes et cela contribue à réduire les risques», explique David-Martin Milot.

La dénomination «réduction des méfaits» vise à réduire la consommation de substances psychoactives (SPA) mais n’encourage pas la consommation, ni ne la décourage. 

Cela englobe les tests de contenu et pureté des drogues, les programmes d’accès au matériel d’injection et d’échange de seringue, les services de consommation supervisés, l’offre gratuite de naloxone (qui renverse l’effet d’un opiacé), les prescriptions médicales de méthadone ou d’héroïne et l’accès à des logements supervisés.

De plus, les Québécois sont conscients de la responsabilité sociale envers les personnes consommatrices mais le fameux «pas dans ma cour» subsiste. Les participants évoquent du malaise, de l’inquiétude, de la menace ou de la peur à l’idée qu’un lieu de consommation ou logement supervisé s’installe dans leur secteur.

Le professeur David-Martin Milot explique que cette perception s’est ancrée dans les esprits du fait de la prohibition mais aussi des discours existants autour de ces substances. «Le caractère illégal joue beaucoup sur comment les gens perçoivent les consommateurs et les substances. Les campagnes à ce sujet jouaient beaucoup sur la peur. Cela a créé une division dans la population qui s’est ancrée et perpétuée.»

Il semble qu’une partie du panel pense que l’abstinence et les mesures des méfaits sont liées. L’abstinence est le mot qui est le plus ressorti des discussions. Il y a donc une méconnaissance de ces mesures de réduction des méfaits qui ne visent pas l’abstinence mais plutôt la réduction des risques. «Certains participants aux groupes de discussions pensaient que certaines mesures de réduction des méfaits tendaient vers la désintoxication», explique Armelle Lorcy, professeure au Centre de recherche du CHU de Québec – Université Laval.

Une problématique accentuée par la COVID-19

Selon OPEN, les surdoses de drogue constituent une crise de santé publique en forte croissance au Canada, ce qui justifie un effort concerté de la part de divers intervenants du milieu de la santé.

«La situation s’est aggravée en raison de la pandémie de COVID-19. D’avril à juin 2020, les décès liés à des stimulants ont augmenté de 65%, comparativement à la période de janvier à mars 2020.»

OPEN

On tend vers un modèle de décriminalisation car on est dans une situation d’urgence, note David-Martin Milot.

Dès la fin des années 80, des mesures de «réduction des méfaits» ont été mises en place au Québec. À cette époque déjà, les consommateurs avaient accès à du matériel d’injection, d’échange de seringue et un service de consommation supervisé voyait le jour à Montréal.

Le réseau de mobilisation sur la prévention et les surdoses (OPEN) a procédé à l’organisation de 10 groupes de discussion entre mai et juin 2020, rassemblant 54 personnes. L’actuelle étude permet de compléter le sondage réalisé en 2019 auprès de 3000 personnes.

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