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Gros bémols pour ce «vaccin contre le cancer du poumon» mis au point à Cuba

Photo: capture d'écran

Il y a certaines phrases qui font naturellement réagir les lecteurs. «Miley Cyrus nue» semble (malheureusement) être l’une d’entre elles. «Ce qu’il fait ensuite est absolument incroyable! WOW!!!» figure aussi parmi ces petites bêtes noires de l’inspecteur viral.

Pour des raisons tout à fait légitimes, «vaccin contre le cancer du poumon» a suscité bien des réactions lorsque le web s’en est épris cette semaine.

La nouvelle a fait le tour du monde: dans le cadre de la normalisation des relations entre Cuba et les États-Unis, il semble que les Américains veulent mettre la main sur le CimaVax, un vaccin contre le cancer du poumon inventé à Cuba.

Et tous les blogues «scientifiques» de s’emporter:

Un vaccin contre le cancer du poumon: voilà quelque chose de majeur, qui mérite de défrayer les manchettes… si seulement c’était de cela qu’on parlait.

Le CimaVax semble en effet ralentir la progression des tumeurs cancéreuses dans les poumons. Sans trop tomber dans les détails, le traitement utilise le système immunitaire de la personne atteinte d’un cancer du poumon pour bloquer une protéine liée à la multiplication des cellules. L’effet est donc de stopper la progression des tumeurs.

Deux études ont été menées à Cuba sur le CimaVax. La plus récente a déterminé que, sur un échantillon de 80 patients, 12 d’entre eux ayant moins de 60 ans et étant atteints d’un cancer du poumon ont vu leur espérance de vie augmenter à 15 mois lorsque traités au CimaVax, comparé à 7,5 mois pour des personnes similaires n’ayant pas reçu le traitement.

On met toutefois en garde: «Un échantillon de 12 personnes est beaucoup trop petit pour tirer des conclusions fortes».

La Food and drug administration (FDA) américaine entend évaluer le CimaVax pour que le vaccin puisse éventuellement être prescrit aux États-Unis. C’est une bonne nouvelle. Petite question, par contre: quel pourcentage des traitements évalués par la FDA passent tous les tests pour devenir des traitements officiellement reconnus?

50% ?

30% ?

15% ?

C’est plutôt 8%. Moins d’un traitement sur 10 réussit à recevoir l’approbation de la FDA. De plus, le processus prend en moyenne entre 6 et 13 ans. Ce n’est pas parce qu’ils sont méchants. La FDA n’évalue pas seulement l’efficacité d’un traitement, mais tous les risques qu’il encourt et ses effets sur la santé.

Donc, oui, le CimaVax a certainement du potentiel, mais ce n’est pas encore le temps de mettre le feu aux rideaux.

Soyons clair: un nouveau traitement qui double l’espérance de vie d’un patient atteint d’un cancer mortel serait une excellente nouvelle. Mais les articles qui en ont parlé donnent plutôt l’impression qu’il s’agit d’un vaccin comme on le connaît, c’est à dire, qui immunise une personne contre une maladie. Il n’y pas de preuves que le CimaVax protège une personne contre le cancer des poumons.

Il n’y a pas non plus de preuves que le CimaVax guérit le cancer du poumon. Il ne fait que ralentir sa progression.

Certains des articles mentionnent ce fait… mais on le cache bien sûr plus bas dans le texte. Par exemple le magazine Wired écrit: «En toute honnêteté, ce traitement ne changera pas vraiment la donne dans sa composition actuelle», mais l’enterre au 7e paragraphe, après la publicité.

Wired affirme qu’on pourrait peut-être envisager d’utiliser le CimaVax comme traitement préventif, mais on parle «d’explorer ce potentiel». Ce n’est pas chose faite.

Mais bon, «Les Cubains ont mis au point un traitement qui pourrait potentiellement allonger l’espérance de vie des personnes atteintes d’un cancer du poumon», ça vend moins que «Les Cubains ont un vaccin contre le cancer du poumon».

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