Au revoir

Chères lectrices et chers lecteurs,

Cela fait six ans et demi que j’ai l’immense privilège de m’adresser à vous. C’est donc avec un pincement au cœur que je le fais pour la dernière fois dans Métro.

Ma décision de quitter ce journal et ses artisans qui ont fait de moi un meilleur chroniqueur a malheureusement coïncidé avec l’horrible attentat de Sainte-Foy. Ce massacre m’a rappelé pourquoi j’ai pris la parole publiquement.

Dès mon arrivée au Québec, il y a presque 15 ans, je suis tombé dans la marmite de l’inclusion des immigrants. L’immense fossé qui sépare les nouveaux arrivants et la majorité francophone du Québec m’a dès lors sauté aux yeux.

Cinq ans après, en observant la représentation des Québécois d’origine immigrante, surtout au sommet de notre société, particulièrement dans les médias, une aberration m’a interpellé : celle de la quasi-absence de représentation positive de la diversité réelle de notre société dans l’imaginaire collectif, notamment dans le Grand Montréal. J’ai décidé alors de sauter dans la joute médiatique.

Dix ans après, j’ai parfois la fâcheuse impression que cette anomalie perdure. Or, dans cette terre d’accueil qui m’a offert une seconde chance, j’ai côtoyé énormément de Québécois qui défendent ardemment le vivre-ensemble partout, parce qu’ils sont consensuels, accommodants et l’autre fait partie intégrante de leur quotidien. Loin des manchettes incendiaires, c’est aussi ça le Québec.

Cela dit, le massacre du 29 janvier dernier nous rappelle que, malgré nos avancées dans l’édification d’un Québec juste pour tous, le chemin reste long et périlleux. Justement, ici, nous sommes friands des médias, des faiseurs d’opinions et de la création artistique de chez nous. En témoignent, par exemple, les cotes d’écoute astronomiques que génèrent certaines émissions prisées, plus que le Canada anglais ne peut égaler avec une population plus importante que celle du Québec. Or, nos médias et notre création artistique n’exposent pas assez ce métissage fécond entre Québécois d’origines différentes. Cette diversité ethnoculturelle réelle de notre société n’est instrumentalisée que pour les mauvaises raisons ou presque!

Pour preuve, les commentateurs et le grand public ont été étonnés par les qualités humaines et citoyennes des gens dont la vie a été injustement fauchée par la haine à la mosquée de Sainte-Foy. La grande majorité des Québécois a aussi été surprise par le discours rassembleur des leaders musulmans qui ont officié les cérémonies religieuses des défunts. Le Québec a ainsi découvert avec stupéfaction une minorité religieuse citoyenne dénigrée depuis une décennie, mais qui ne veut pas de chicane dans la cabane.

Une meilleure représentation de nos minorités visibles dans notre imaginaire collectif fait partie des remèdes qui pourraient nous immuniser contre la radicalisation qui guette à la fois et les Québécois issus du monde musulman, et les Québécois issus de la majorité francophone.

On a tous du pain sur la planche.

Ce n’est donc qu’un au revoir!

Mille mercis.

Mon
Métro

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