Élections présidentielles américaines : qu’arriverait-il si un candidat mourait?

La Maison-Blanche Photo: Manuel Balce Ceneta/AP Photo

WASHINGTON — À un mois de l’élection présidentielle, le président américain Donald Trump est hospitalisé après avoir contracté un virus qui a déjà tué plus de 209 000 Américains. Mais que se passerait-il si son état de santé se détériorait à un moment où le processus électoral est bien avancé?

Si le président n’est pas en mesure de remplir ses fonctions, en raison d’une maladie grave ou d’un décès, le 25e amendement de la Constitution américaine prévoit clairement que les pouvoirs présidentiels seraient transférés au vice-président Mike Pence jusqu’à ce que le M. Trump soit en mesure de reprendre ses fonctions.

Mais qu’arriverait-il si un candidat à la présidence décédait tout juste avant le jour de l’élection? Ou tout de suite après? Qu’arriverait-il si le président désigné mourait avant le jour de son assermentation?

Jamais dans l’histoire des États-Unis un président élu n’est décédé avant le jour de son entrée au pouvoir le 20 janvier suivant l’élection présidentielle. La Constitution, les lois fédérales et locales régissant les élections aideraient les Américains à prendre une décision sur la manière de procéder dans une telle situation. Toutefois, sans aucune jurisprudence, il est difficile de prévoir ce qui se produirait.

La Chambre des représentants des États-Unis a le dernier mot pour déclarer le vainqueur d’une élection présidentielle. Cependant, avant que la Chambre ne puisse se prononcer, plusieurs autres acteurs auront un rôle à jouer : les partis politiques, les autorités des États, le Collège électoral, les juges et, finalement, les électeurs.

Voici donc une série de questions-réponses qui tenteront d’expliquer ce qui arriverait si un candidat à l’élection présidentielle décédait avant ou après l’élection.

Les partis politiques peuvent-ils nommer un nouveau candidat si leur candidat perdait la vie?

Oui, mais pas à une date aussi près du jour de l’élection. Près de 63 millions de bulletins de vote ont déjà été envoyés aux électeurs, dont trois millions ont déjà été retournés. Par ailleurs, la date limite à laquelle un candidat peut retirer sa candidature a déjà été dépassée dans presque tous les États — les candidats peuvent encore retirer leur candidature en Caroline du Sud et au Connecticut pour quelques jours.

De son côté, la date de l’élection est fixée par une loi fédérale, qui stipule que l’élection doit se tenir le mardi suivant le premier lundi de novembre — d’où la date du 3 novembre pour l’élection de 2020. Seul le Congrès peut changer cette date.

«Il serait impossible de changer tous les bulletins de vote à temps pour l’élection sans repousser la date du vote et sans recommencer au complet le processus de distribution des bulletins», souligne le professeur à l’École de droit de l’Université de la Californie à Irvine, Richard Hasen.

Il est cependant important de noter, qu’au cours d’une élection présidentielle, les électeurs ne cochent pas directement le nom d’un candidat sur leur bulletin de vote. Ils inscrivent plutôt leur choix pour les grands électeurs qui, à leur tour, choisissent le président et le vice-président. Pour devenir président, un candidat doit avoir l’appui de la majorité des grands électeurs — soit 270 — au Collège électoral.

Dans l’histoire moderne des élections américaines, la réunion du Collège électoral a pris la forme d’une cérémonie de confirmation du choix effectué par les électeurs. Cette année, cet évènement aura lieu le 14 décembre. Mais si le candidat gagnant n’était plus en vie à cette date, le processus régulier serait totalement chamboulé.

Qu’arriverait-il si le candidat gagnant décédait après l’élection?

Le 20e amendement de la Constitution stipule que le mandat d’un président en fonction se termine le 20 janvier à midi. Il n’existe aucune disposition pour repousser cette date. Cet amendement précise également que si le président élu mourait, le vice-président élu serait nommé président pour le début du nouveau mandat.

Par contre, le candidat gagnant au scrutin ne devient pas président élu tant que le Congrès n’a pas compté les votes des grands électeurs du Collège électoral et n’a pas déclaré le vainqueur, rappelle le professeur en droit constitutionnel à l’Université de New York, Richard Pildes.

Selon la loi, le Congrès doit recevoir les bulletins de vote du Collège électoral le 6 janvier. Le nouveau Congrès, élu en novembre, entre en fonction le 3 janvier. Les membres de la nouvelle mouture du Congrès ont donc la responsabilité de nommer le président élu.

Qu’arriverait-il si le candidat gagnant mourait avant que le Congrès ne le déclare vainqueur?

«Il s’agit du pire moment, là où il y a le plus de confusion, affirme le directeur des études gouvernementales au Bipartisan Policy Center, John Fortier. Ils [les élus] devraient déterminer quoi faire avec les votes des grands électeurs pour un candidat décédé.»

Si le candidat gagnant mourait avant la rencontre du Collège électoral, les grands électeurs devraient accepter d’endosser un nouveau candidat recommandé par le parti, qui pourrait être le candidat à la vice-présidence.

«La plupart des grands électeurs sont choisis parce qu’ils ont une grande loyauté envers le parti, avance M. Fortier. Il pourrait y avoir quelques résistants dans le groupe, mais les grands électeurs ne sont pas des rebelles.»

La pression serait forte sur eux afin qu’ils votent pour le candidat recommandé par le parti, parce qu’ils ne voudraient pas contribuer à donner la victoire à l’adversaire en raison d’une dispute interne. Il n’y a toutefois aucune garantie qu’ils voteraient tous pour le nouveau candidat.

Certains États ont déjà des lois qui obligent leurs grands électeurs à voter pour le candidat choisi par le vote populaire dans leur État. D’autres États pourraient choisir de se réunir rapidement pour adopter de nouvelles lois qui obligeraient les grands électeurs à agir d’une certaine façon si un candidat mourait.

«Le parti pourrait décider de ce qu’il veut, mais ce sont les États qui ont le contrôle sur les grands électeurs», mentionne le professeur Richard Hasen.

La Cour suprême a rendu une décision unanime en juillet qui stipule que les États ont le droit de forcer les grands électeurs à voter pour le candidat choisi par les électeurs. La Cour n’a toutefois pas précisé ce qui arriverait si un candidat n’était plus en vie.

Et le Congrès dans tout ça?

Selon le 12e amendement de la Constitution, le Congrès a le dernier mot sur le choix du président élu et du vice-président élu. Le Congrès peut décider d’accepter ou de rejeter les bulletins de vote des grands électeurs et peut déterminer si un candidat a obtenu les 270 votes nécessaires au Collège électoral pour devenir président.

Sur ce point, il faut préciser que la Chambre des représentants et le Sénat doivent tous deux accepter pour rejeter le bulletin d’un grand électeur pour l’invalider.

Si aucun candidat ne reçoit les 270 votes nécessaires, la Chambre des représentants va choisir le président, tandis que le Sénat choisira le vice-président, dans un processus qui est dicté par la Constitution.

Les experts ont affirmé qu’il est peu probable que les cours de justice jouent un rôle à cette étape, puisque la Constitution donne une procédure claire au Congrès pour résoudre un tel litige.

La Cour suprême a bien joué un rôle dans l’élection de 2000, alors qu’elle avait donné la victoire au républicain George W. Bush après un nouveau dépouillement en Floride, mais cette décision était survenue avant que les votes des grands électeurs ne soient présentés au Congrès.

«Après le vote des grands électeurs, la décision est entre les mains du Congrès», dit John Fortier.

Stephen OhlemacHer, The Associated Press

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