La haine n’est pas une fatalité!

La dernière année de mon secondaire, à l’âge de l’éveil des sens et de la quête identitaire, la rencontre d’un professeur tombé du ciel marqua ma vie à jamais.

À l’époque, sur ma planète d’origine, on introduisait pour la première fois le cours d’art plastique dans les classes des finissants. Le professeur était différent des autres. D’abord, par le ton calme de sa voix, à l’opposé des autres maîtres qui ne s’imposaient que par les décibels élevés de leurs cordes vocales. Ensuite, son cours était l’occasion d’explorer le monde autrement.

Ce qui m’a le plus marqué dans ce prof étrange, c’est sa facilité à vulgariser des sujets complexes, même les plus tabous. Un jour, au détour d’un échange sur l’impasse du conflit israélo-palestinien, il m’a offert une allégorie ingénieuse.

Pour poursuivre ses études supérieures, mon nouveau professeur a dû s’expatrier en Belgique avec femme et enfants. Il a dû faire face aux affres d’une installation à l’étranger. Sans l’aide d’un camarade de classe, lui aussi Marocain, mais de confession juive, il aurait pu abandonner son rêve académique.

Les épreuves de la vie loin des leurs ont rapproché les deux familles marocaines de confessions religieuses différentes. Les deux foyers se fréquentaient assidûment. Un jour un incident a mis à l’épreuve cette entente sincère.

Lors d’un souper organisé par la famille musulmane, les enfants des deux couples n’arrêtaient pas de se chamailler quand le fils des hôtes a dépassé les bornes. Excédée, sa maman l’a grondé en lui hurlant : «Arrête, le juif!» Traiter un musulman de juif est l’insulte suprême dans le monde arabo-musulman.
Un froid glacial est tombé sur le salon, quand, sourire complice aux lèvres, l’ami juif a lancé à son hôte musulman : «Nous sommes aussi capables des pires injures sur les Arabes et les musulmans.» D’un coup, tout le monde a éclaté de rire.

Des siècles durant, les musulmans et les juifs se sont côtoyés en paix au Maroc. Ils ont même traversé sans heurts le tumulte de la Seconde Guerre mondiale, alors que les nazis faisaient les yeux doux au Palais pour qu’il se retourne contre son colonisateur français et leur livre les juifs du royaume.

Une cohabitation séculaire somme toute relative a existé entre juifs et Arabes dans des pays à majorité musulmane, même après l’avènement de l’État hébreu et ses guerres contre les Arabes.

Pourquoi Israël n’arrive-t-il pas à envisager un avenir de paix avec un voisin palestinien indépendant? Pourquoi le fossé ne cesse-t-il de se creuser entre juifs et musulmans de la région? La haine n’est pas une fatalité!

Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.

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