Instrumentaliser les musulmans

Comme il fallait s’y attendre, après le niqab – du bonbon pour les conservateurs, d’après Gérard Deltell, leur candidat québécois dans Louis-Saint-Laurent –, les troupes de Stephen Harper accentuent l’exploitation de la «peur des musulmans»!

Après avoir voulu «libérer» les Canadiennes du port du niqab – une pratique qui toucherait moins d’une centaine de femmes d’un océan à l’autre –, les conservateurs s’attaquent à leur prochaine cible : les «pratiques culturelles barbares», comme les crimes d’honneur et les mariages précoces ou forcés.

Entre les lignes, on comprend que cette nouvelle bataille vise principalement la communauté musulmane d’ici et d’ailleurs, même si des études sérieuses ont démontré que les mariages précoces ou forcés touchent aussi d’autres communautés!

Habilement, les conservateurs détournent l’attention du public. Ils ne précisent pas l’ampleur de ces pratiques, mais ils lui taillent sur mesure tout un arsenal de promesses en pleine campagne électorale. Et si quelqu’un ose leur faire remarquer qu’il y a peu de cas, leur réponse est toute prête : «Un seul cas est un cas de trop!»

À titre d’exemple, ces «barbaries» sont-elles aussi importantes que la tragédie qui frappe les femmes autochtones? L’an dernier, un rapport de la GRC a révélé que près de 1 200 femmes autochtones avaient été tuées ou avaient disparu de 1980 à 2012. Et qu’est-ce qu’a fait à ce sujet le gouvernement Harper? Il n’a cessé de rejeter les appels à l’ouverture d’une simple enquête publique!

Par ailleurs, les conservateurs veulent aussi aider les victimes des «pratiques culturelles barbares» à l’étranger, dans les zones de conflit, notamment en Irak et en Syrie. C’est parfait, mais font-elles autant de ravages que la pédophilie au sein de l’Église catholique? Pourquoi la réaction des conservateurs n’a-t-elle pas été proportionnelle quand le pape François a estimé à 2 % le nombre de prêtres pédophiles au sein de l’Église catholique? Combien de victimes ont pu se retrouver dans la mire de ces pédophiles, même chez nous? Est-ce pour épargner sa base électorale que Harper n’a pas sévi?

Qu’on se le tienne pour dit, défendre les musulmans ne veut en aucun cas dire épargner l’islam. Comme pour toutes les autres croyances, il faut aussi défendre la liberté de ceux qui veulent le critiquer, mettre en cause son message ou lutter contre ses pratiques quand ils sont contre nos lois.

Et si, par malheur, un individu ou un groupe commet des exactions au nom de cette religion, il faut laisser à notre justice indépendante le soin de sévir dans le cadre de nos lois.

Politiser ce débat à des fins électoralistes et hiérarchiser les religions et les cultures, comme le font les conservateurs, sont des pratiques dangereuses qui sont à des années-lumière des valeurs canadiennes et québécoises!

La chronique de Hassan Serraji sera dorénavant publiée un mercredi sur deux.

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