Ah, Dieudonné!

Le Gala Les Olivier 2016 a été une bonne occasion de débattre sur les façons masquées de censurer la liberté d’expression. Ce fut le cas aussi de découvrir comment le public sait récompenser les humoristes qui savent se tenir debout face à la censure.

La saga de l’humoriste français controversé Dieudonné en est un autre exemple. Je ne veux même pas entrer dans le jeu des comparaisons entre les blagues de Mike Ward et Guy Nantel et celles de Dieudonné! Pourquoi? Parce que la liberté d’expression des artistes est sacro-sainte dans une démocratie libérale qui se respecte.

Ni l’État, dans sa notion la plus large, ni quiconque d’autre n’ont le droit d’ourdir des stratagèmes pour restreindre la liberté d’expression d’un artiste même au prix de tolérer les méchancetés gratuites, les incitations masquées à la haine et les amalgames!

Le public n’est pas dupe, car museler un artiste ne fait que radicaliser ses admirateurs et ses disciples, voire les démultiplier à l’infini. L’Olivier de l’année 2016 raflé par Mike Ward en est la preuve criante.

L’acharnement judiciaire qui colle à la peau de Dieudonné le confirme aussi. Plus l’État le traîne devant les tribunaux en France, plus son public – et il est nombreux parmi toutes les couches de la société et aux quatre coins de notre planète, faut-il le rappeler – est convaincu que son héros est la victime d’un complot planétaire.

Il y a plus de sept ans, j’ai eu l’occasion d’avoir un tête-à-tête avec Dieudonné, quand je l’ai interviewé pour le compte du magazine marocain Telquel. Et qu’on soit pour ou contre ses prises de position, l’humoriste français controversé n’est pas seulement un homme immensément brillant, il est aussi un artiste engagé qui a su survivre dans un monde artistique extrêmement volatile.

Alors, en cette journée de début novembre 2008, au détour de notre échange dans les coulisses du National, à Montréal, j’ai exprimé à Dieudonné mon étonnement face à sa propension à user de la controverse extrême pour exprimer son art, alors qu’il est doté d’assez de talent pour le faire avec tact.

L’humoriste marqué au fer rouge m’a alors mitraillé d’un regard foudroyant, comme s’il venait de détecter une faille louche dans mon raisonnement. Puis, subitement, un sourire malin s’est dessiné sur son visage. Ce jour-là, Dieudonné m’a tout bonnement confessé que face au boycottage de ses spectacles par les médias, il lui a suffi de serrer la main de Jean-Marie Le Pen, le chef du Front national et homme politique infréquentable à l’époque en France, pour avoir droit à toute l’attention médiatique, de tous les bulletins de nouvelles, de toutes les chaînes françaises, à heure de grande écoute et en continu! Banco!

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