Laurence Anyways : la tête hors de l’eau

Photo: Alliance Vivafilm

Sortant simultanément en salles au Québec et au Festival de Cannes, Laurence Anyways est le film le plus ambitieux à ce jour pour le jeune cinéaste Xavier Dolan.

Un couple est mis à dure épreuve lorsque le professeur de littérature (Melvil Poupaud, convaincant) annonce à sa compagne (Suzanne Clement, trop affectée) qu’il a l’intention de changer de sexe au risque de perdre son emploi.

Idolâtré par plusieurs, Xavier Dolan est le porte-étendard de la relève du cinéma québécois. On ne peut nier le manque de talent et d’ambitions du réalisateur de J’ai tué ma mère et des Amours Imaginaires, mais ce drame sentimental très inégal sur un amour impossible est son film le moins abouti à ce jour. Avec comme trame de fond le sujet tabou de la transsexualité, Dolan évoque à nouveau le mal de vivre et le milieu de la marginalité où le personnage principal subit l’incompréhension de ses pairs et est victime d’une grande injustice. Hyper stylisée et léchée, la mise en scène sombre trop souvent dans la suffisance : saturation des couleurs, gros plans, zoom-ins, caméra subjective, musique insistante, chansons omniprésentes, direction artistique flamboyante, usage abusif des ralentis, etc.

D’une durée assommante (165 minutes), le film souffre de nombreuses longueurs. Il y a bien ci et là quelques moments forts et de belles envolées lyriques à l’occasion, mais la forme ne s’accorde pas toujours au rythme des émotions. À cet égard, la relation amoureuse et tumultueuse entre Laurence et Fred est peu perceptible. De plus, plusieurs scènes sonnent faux (la colère du personnage campé par Suzanne Clement dans le resto) ou versent carrément dans la caricature grotesque (l’exploration du milieu des transsexuels).

Je comprends la démarche du réalisateur de sortir son film en même temps qu’à Cannes. Toujours est-il que de nombreuses oeuvres par le passé ont bénéficié d’un second montage après un passage à Cannes justement et avant leur sortie commerciale (The Brown Bunny de Vincent Gallo est un bon exemple). Laurence Anyways entre malheureusement dans cette catégorie. Tel quel, le film manque cruellement de souffle et ne justifie en rien une telle durée pour un drame de la sorte. Même les plus grands maîtres du mélodrame (Fassbinder, Sirk, Almodovar) n’ont jamais osé tourner des drames sentimentaux d’une durée de près de trois heures. En enlevant une bonne heure et en resserrant son intrigue, le film mériterait probablement une étoile de plus.

Cote: ** sur 5

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