PKP: le départ d’un allié du fédéralisme?

Photo: FELIX O.J. FOURNIER/TC Media

La presse anglophone a prédit tout et son contraire pour le Parti québécois (PQ) et le mouvement indépendantiste à la suite de l’annonce de la démission de Pierre Karl Péladeau lundi. D’un côté, le propriétaire de Québecor a été, à la tête du PQ, le meilleur allié du fédéralisme. De l’autre, son retrait de la vie politique signe l’arrêt de mort du projet souverainiste. Deux constats aussi tranchés qu’irréconciliables.

La palme du titre le plus étonnant revient certainement au Globe and Mail pour son éditorial intitulé «So long, PKP. You were federalism’s best friend» («Au revoir, PKP. Tu étais le meilleur ami du fédéralisme»). Le journal avance que seuls les fédéralistes vont s’ennuyer du chef péquiste. «Avec son manque d’écoute, son tempérament volcanique et son inaptitude organisationnelle, M. Péladeau représentait le meilleur argument contre un vote pour le PQ», écrit le Globe. Et de conclure :

«Historians will place his stewardship of the PQ in the pantheon of leadership mediocrity.»

Traduction libre : «Les historiens inscriront sa gouverne du PQ au panthéon de la médiocrité.»

Dans le même esprit, si tous les médias ont rappelé le «poing en l’air pour le pays» de PKP, peu l’ont fait avec autant d’enthousiasme que le National Post. «Pour les fédéralistes canadiens, c’était une bénédiction», juge le columnist Matt Gurney au sujet du moment, maintenant passé à la postérité, qui a fait dérailler la campagne de Pauline Marois.

Le départ de M. Péladeau n’a donc rien d’une bonne nouvelle pour le Parti libéral du Québec, ont soutenu les éditorialistes de la Gazette lundi. L’incertitude est maintenant dans le camp des libéraux, selon Don Macpherson, eux qui ne pourront pas se contenter de gagner la campagne de 2018 en brandissant l’épouvantail du référendum, «comme des généraux se préparant à refaire la même guerre».

Un peu plus acerbe, le commentateur James Mennie a résumé le tout ainsi :

«In fact it’s entirely possible those most devastated by Péladeau’s departure are Quebec federalists who relied on the PQ leader to regularly overreact, misspeak or make his political party seem ridiculous if not irrelevant.»

Traduction libre : «Il est tout à fait possible que les gens les plus dévastés par le départ de M. Péladeau soient les fédéralistes du Québec, qui comptaient sur le chef du PQ pour réagir de manière excessive, se mettre le pied dans la bouche ou pour faire paraître son parti ridicule, voire même inutile.»

Le cercueil de la souveraineté
Pour certains analystes, et ce d’une manière contradictoire qui sied très bien au personnage de Pierre Karl Péladeau, l’annonce d’hier laisse plutôt présager la mort du mouvement souverainiste.

L’hypothèse refait ponctuellement surface depuis des années, mais à en croire un éditorial publié dans tous les journaux de Sun, cette fois, c’est la bonne! «Le séparatisme semble être en route pour les livres d’histoire au Québec», clame le réseau de nouvelles. Le funeste sort du projet d’indépendance ne serait toutefois pas attribuable qu’à la seule démission du baron médiatique.

«For young people today, the name Rene Levesque – founder of the PQ – is more a street in Montreal or an option in a multiple choice history test than a symbol for a vibrant movement with a future.»

Traduction libre : «Pour les jeunes d’aujourd’hui, le nom de René Lévesque – fondateur du PQ – est davantage un nom de rue à Montréal ou un choix de réponse dans un examen d’histoire que le symbole d’un mouvement qui a de l’avenir.»

Le chroniqueur du Globe and Mail Konrad Yakabuski parvient à un constat tout aussi implacable. «Le départ de M. Péladeau pousse le mouvement souverainiste plus près de la mort – pas qu’il ne s’en allait pas déjà là de toute façon», déclare-t-il, prévoyant que la CAQ pourrait dorénavant récolter la part du lion des votes nationalistes francophones. Une hypothèse qui refait tout aussi ponctuellement surface que celle de la mort du «séparatisme», avec des résultats tout aussi mitigés.

Un chef biscornu
Au-delà des considérations constitutionnelles, de nombreux journalistes anglophones ont préféré insister lundi sur le caractère profondément «malaisant» de la présence de Pierre Karl Péladeau à la tête du PQ.

«Son caractère bouillant, son inaptitude oratoire, sa gestion chaotique, […] sa mauvaise compréhension de l’histoire du Québec et de la politique […] et sa vie familiale digne des tabloïds ont fait de lui un des chefs de parti les plus inappropriés que j’ai vu, a statué le journaliste Paul Wells, du magazine Maclean’s. Le PQ se portera mieux sans lui.»

Sous le titre plus ou moins édifiant de «Pierre-Karl Péladeau Makes Tearful Goodbye to Politics to Return to Being Rich as Fuck Dad» (qu’on pourrait traduire par «PKP redevient un père riche en tabar***»), Vice Canada a rappelé, notamment, les «sourires étranges» et les sorties parfois «ridicules» (une certaine tournée à vélo avec Gilles Duceppe) de M. Péladeau.

«Au final, PKP n’a jamais semblé à l’aise sur la scène publique. Il y avait toujours quelque chose de forcé et de mécanique dans son attitude, comme s’il savait quel rôle il devait jouer mais sans avoir le talent pour y arriver», a illustré le journaliste Patrick Lejtenyi.

Pour le média de gauche Ricochet, c’est essentiellement l’incompatibilité de l’ADN social-démocrate du Parti québécois avec l’anti-syndicalisme du magnat de Québecor qui a coulé la carrière politique de l’homme d’affaires. «Le dernier Québécois à avoir perdu son emploi aux mains du roi du lock-out est PKP lui-même», a ironisé le reporter Ethan Cox.

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