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Allégation d'agression sexuelle contre un député

Des élus de l'Assemblée nationale de Québec sont la proie de menaces de violence alors que Québec resserre les mesures sanitaires
L'Assemblée nationale, à Québec Photo: Getty Images | iStockphoto
Jocelyne Richer, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

QUÉBEC — Le gouvernement Couillard est placé dans l’embarras, à la suite d’une allégation d’agression sexuelle qui met en cause le député libéral de Laurier-Dorion, Gerry Sklavounos.

L’affaire, qui a créé une véritable onde de choc à l’Assemblée nationale, a entraîné, jeudi en fin de journée, le retrait forcé du caucus libéral du député Sklavounos, qui s’est fait montrer la porte.

Le fait que M. Sklavounos, qui était leader adjoint du gouvernement, ne fasse plus partie de l’équipe, a été confirmé par le cabinet du premier ministre en début de soirée. Il siégera désormais comme député indépendant.

Dans un communiqué, le premier ministre Philippe Couillard affirme que «compte tenu des informations qui ont été publiées dans les médias» relativement à une plainte pour agression sexuelle, le député Sklavounos se retirait du caucus libéral «à la demande de la présidente du caucus du gouvernement, Nicole Ménard».

M. Sklavounos, âgé de 41 ans, est avocat de formation. Il a été élu pour la première fois en 2007. Il n’a fait aucun commentaire.

Son exclusion du caucus forcera le premier ministre à désigner un nouveau leader adjoint du gouvernement dans les prochains jours pour seconder Jean-Marc Fournier en Chambre.

Le premier ministre Couillard avait dit jeudi matin prendre la chose très au sérieux, lors d’une mêlée de presse, demandant aussitôt au whip du gouvernement, Stéphane Billette, de mener une enquête interne auprès des membres masculins du caucus libéral pour tenter de découvrir si ces allégations étaient fondées.

«Je veux qu’on fasse les vérifications», a dit le premier ministre, s’engageant à ce que chaque député libéral soit questionné à ce propos.

Quelques heures plus tard, M. Billette avait déjà entrepris un marathon d’entrevues avec ses collègues députés.

Mercredi soir, à l’Université Laval, lors d’un rassemblement en appui aux victimes d’agressions sexuelles survenues récemment dans une résidence de l’université, une jeune femme a pris la parole pour dénoncer une agression qu’elle dit avoir subie dans un restaurant de Québec durant l’été 2014, restaurant où elle avait été embauchée comme hôtesse.

Sur sa page Facebook, retirée depuis, la jeune femme a écrit que l’agresseur était un député libéral, mais elle ne le nommait pas.

Elle y affirmait que le député en question aurait par la suite exercé du chantage auprès d’elle pour qu’elle taise l’affaire, mais elle a tout de même porté plainte à la police un an plus tard. L’enquête policière n’aurait pas eu de suites, selon elle.

Le chef de l’opposition officielle, Jean-François Lisée, soupçonne un «cover-up», une tentative d’étouffer l’affaire, et demande donc une double enquête, une première de nature policière sur l’agression elle-même, une seconde sur une éventuelle tentative de camouflage de l’affaire que pourrait mener le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI).

«Il faut dénoncer ces policiers» qui ont mené l’enquête, a renchéri le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault, si effectivement les enquêteurs chargés du dossier ont tenté de dissuader la plaignante d’aller de l’avant. «Les policiers ne sont pas là pour blâmer les victimes», a-t-il ajouté, en point de presse. Il réclame que l’enquête soit rouverte, «pour aller au fond des choses».

La police de Québec a confirmé jeudi qu’elle menait une enquête sur les allégations qui circulent depuis mercredi soir. Elle a demandé la collaboration de la plaignante.

La jeune femme, qui se prénomme Alice, soutient même avoir perdu son travail à cause de cette histoire, le député en question étant, selon ses dires, un vieil ami du patron du restaurant, qu’elle n’identifie pas non plus sur son statut Facebook.

La plaignante y affirme de plus être marquée «pour la vie», tant physiquement que psychologiquement, par ces événements.

Selon une proche amie de la plaignante, Rosalie Genest, qui a donné une entrevue radiophonique, la jeune femme a subi des gestes «violents» de la part du député, au point de devoir se rendre à l’hôpital le lendemain de l’agression alléguée pour y recevoir des soins, dont des points de suture.

«J’ai une fille et une petite-fille, et quand je vois ça, ça me renverse», a commenté M. Couillard, en ajoutant son souhait que les femmes se sentent en sécurité partout, et particulièrement sur les campus étudiants.

«Ce sujet n’est pas banalisé, il n’est pas tassé. Il est traité au plus haut niveau de priorité qu’il mérite», a assuré le premier ministre.

Appelé à commenter les allégations, le député libéral de Dubuc, Serge Simard, un ancien ministre dans le cabinet de Jean Charest, a semé l’émoi dans les rangs de l’opposition en semblant banaliser les faits rapportés, jugeant que «des fois, on demande aux gens: c’est quoi le nom de ton maire et il ne le sait pas».

En Chambre, se disant indignées, la députée caquiste Nathalie Roy et la députée péquiste Mireille Jean ont exigé tour à tour que le député s’excuse.

En point de presse, cédant aux pressions, M. Simard a présenté ses excuses et a affirmé que son intention n’était pas de banaliser les faits allégués.

Québec solidaire a demandé carrément la démission de M. Sklavounos.

La ministre de la Condition féminine, Lise Thériault, s’est dite choquée par les allégations proférées par la jeune femme de l’Université Laval et elle a invité toutes les femmes victimes de telles agressions à les dénoncer.

«Personne n’est au-dessus des lois», a-t-elle rappelé, laissant entendre que le député en question, si l’histoire s’avère, n’aurait pas de traitement de faveur.

«Si des gens sont trouvés coupables, ils payeront pour leur crime», a commenté la ministre de l’Enseignement supérieur, Hélène David.

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