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«Le chandail de hockey», 70 ans plus tard

Ryan Remiorz / La Presse Canadienne Photo: Ryan Remiorz
Morgan Lowrie, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

MONTRÉAL — Il y a 15 ans, l’écrivain Roch Carrier chaussait les patins pour la dernière fois. L’aventure a viré au cauchemar lorsqu’il est tombé et s’est fracturé la rotule.

«Ma femme me disait « pourquoi portes-tu ces vieux patins? Ils sont horribles. » Et elle m’a acheté une belle paire de patins», a dit l’auteur québécois, surtout connu pour la nouvelle «Le Chandail de hockey» et le roman «La Guerre Yes Sir».

«Je suis ensuite allé à la patinoire et, bien sûr, j’ai sauté sur la glace comme un champion, j’ai fait un pas, je suis tombé et je me suis fracturé la rotule.»

Âgé de 79 ans, M. Carrier n’est plus le jeune garçon qui se peignait à la manière de Maurice Richard et pour qui le plus grand traumatisme de sa courte vie était d’avoir eu à porter le chandail bleu et blanc des Maple Leafs de Toronto, plutôt que celui de ses chers Canadiens.

Or, son récit d’un garçon de neuf ans passionné de hockey continue de captiver les lecteurs, 37 ans après sa publication et 70 après l’hiver de 1946 où se tient l’histoire.

La mère du narrateur y commande un chandail de la Sainte-Flanelle à Toronto, mais reçoit plutôt celui des plus grands rivaux du Tricolore.

Elle insiste néanmoins pour que le jeune Roch l’enfile, ce qui le mortifie et crée des frictions avec ses coéquipiers et d’autres résidants de son village natal de Sainte-Justine.

Plus de 300 000 exemplaires de cette oeuvre se sont vendus. Elle a aussi été adaptée en une symphonie narrée par M. Carrier et jouée à travers le Canada.

Le conte a aussi été adopté au cinéma, l’Office national du film produisant un court-métrage d’animation en 1980.

En 2017, l’histoire inspirera une comédie musicale, qui se produira au Centre Segal de Montréal à l’occasion du 375e anniversaire de la ville.

La petite municipalité de Sainte-Justine rendra également hommage à l’auteur à sa manière, en mettant en scène plusieurs de ses nouvelles en février prochain.

Le président de la société historique locale, Stéphane Brûlé, dit espérer que les quelque 1800 résidants de Sainte-Justine découvriront ainsi les oeuvres de la plus grande célébrité de la place.

«M. Carrier est reconnu, ici, à Sainte-Justine. Il y a beaucoup de lieux qui portent son nom, mais les gens ne connaissent pas vraiment sa littérature.»

Bien que Roch Carrier ait déménagé à l’âge de 12 ans pour fréquenter un internat, Sainte-Justine occupe une place centrale dans tous ses récits — et particulièrement dans son plus grand classique

Un extrait décrivant le village, situé non loin de la frontière du Québec avec le Maine, a même orné les billets de cinq dollars de 2001 à 2013.

«Les hivers de mon enfance étaient des saisons longues, longues. Nous vivions en trois lieux: l’école, l’église et la patinoire; mais la vraie vie était sur la patinoire.»

Si les temps ont changé, Stéphane Brûlé maintient que Sainte-Justine ressemble toujours au décor des histoires de M. Carrier.

La population est demeurée sensiblement la même, et bien que les fermes avoisinantes aient disparu, il rapporte que l’école, l’église et l’ancienne demeure des Carrier sont encore intactes.

La seule différence notable réside dans la patinoire, qui s’est transformée en amphithéâtre.

Roch Carrier, qui se rend régulièrement au village pour y visiter sa famille, décrit Sainte-Justine comme «un endroit merveilleux où grandir».

«C’était très isolé d’une certaine façon, mais chaque petit endroit (…) état rempli de vie, soutient M. Carrier, qui habite maintenant la grande région de Montréal. Les gens jouaient, dansaient, allaient à la messe.»

Même si la réalité des Canadiens a grandement évolué au fil des 70 dernières années, il se réjouit que son histoire trouve toujours écho — du moins, s’il se fie aux réactions des enfants lorsqu’il leur en fait la lecture.

Il dit toujours commencer en leur demandant s’ils sont déjà eu à porter un vêtement contre leur gré.

«Toutes les mains se lèvent et parfois l’institutrice lève la main avec les enfants. Ça fait une bonne base pour commencer l’histoire.»

Il se dit très honoré par toutes les adaptations de sa nouvelle, mais ajoute qu’il ne cherche pas à expliquer sa popularité incessante.

«Je n’essaie pas de l’expliquer et je n’aime pas parler de ça, parce que je ne veux pas détruire quelque chose d’aussi magique», a-t-il conclu.

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