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Le problème avec La voix junior

Montage des participants de La voix junior Photo: TVA / Canoe

Bon, l’effet de nouveauté est tombé (un peu), il faut qu’on se parle de La voix junior … parce que c’est très difficile de faire autrement quand on observe la télévision d’ici.

Écartons tout de suite l’évidence : on ne peut pas affirmer que les gens participant à La voix junior sont mal intentionnés. Charles Lafortune à l’animation, Maripier Morin à l’accompagnement et les trois juges, tout ce beau monde est armé d’un camion rempli de bons sentiments et ils sont tendres, justes sans être cruels et compatissants au possible. Là-dessus, rien à redire. La production a heureusement évacué la mauvaise habitude de mettre à l’avant-plan le pathos des candidats comme il s’agit d’une cuvée jeunesse et on est toujours dans le positif, le constructif, l’inspirant.

Trop, peut-être, mais c’est difficile d’être contre la vertu. Trop de bons sentiments, ça fait à la limite du bien.

Sur ces points, La voix junior demeure une question de goût. Si la formule vous parle, vous allez embarquer c’est sûr. Pour les autres, et j’en suis, des questions s’imposent.

Pourquoi ce projet avec des jeunes?

Le cynique en moi est incapable de ne pas voir l’usine à imprimer de l’argent derrière l’aventure. En plus de l’émission, il y a la tournée de spectacles avec tous les jeunes participants aux auditions à l’aveugle – un peu pour s’excuser d’exclure de l’aventure ces jeunes qui performent devant des fauteuils qui ne se retournent pas.

Vous me direz que s’ils sont là, ils connaissent la game, mais pourquoi les soumettre à cette game justement? À l’adolescence et à la préadolescence, est-ce que c’est judicieux de s’exposer à la moquerie potentielle pour un brin de reconnaissance du grand public? C’est quoi le prix à gagner au juste de cette participation – devenir une vedette de La voix junior? N’est-ce pas là un cadeau empoisonné.

Sans faire de la mauvaise foi, je n’ai rien contre le choix d’utiliser la fenêtre qu’offre La voix pour propulser sa carrière. Mais, j’en ai un peu quand cette même fenêtre est offerte à des enfants qui ne sont pas encore à l’étape de se façonner une carrière. Donc on mise sur le plaisir des participants, sur le positif de l’expérience … mais on ne peut pas le faire sans donner du poids aux effets pervers de l’entreprise.

Être placardés dans notre vedettariat à un si jeune âge, le souhaite-t-on vraiment à ces jeunes?

Encore là, je sais que tout le monde est là sur une base volontaire. Les enfants sont souriants, les mamans pleurent de fierté, tout le monde est beau, est fin, est capable. Mais les femmes dans la cage de verre de Jean Airoldi aussi étaient là sur une base volontaire – la cage de verre n’était pas moins répréhensible pour autant.

Le problème, ce n’est pas les participants, c’est le simple fait que la possibilité existe. Parce qu’on trouvera toujours des participants volontaires pour un projet télé, aussi dégradant peut-il être. La voix junior n’est certainement pas une proposition dégradante pour les jeunes, mais elle pourrait se transformer en expérience négative très rapidement et la machine n’arrêtera pas pour autant.

L’émission se poursuivra, puis la tournée de spectacles, puis le disque, puis les couvertures de magazines, puis les passages à Salut Bonjour, etc.

La voix junior, c’est la pointe de l’iceberg et j’ai un certain malaise qu’on mette en scène des jeunes de la sorte pour alimenter la machine.

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