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De sans-abri toxicomane à prêtre

Photo: Yves Provencher/Métro

Prêtre auprès des sans-abri, des prostituées et des prisonniers, l’abbé Claude Paradis fait jaillir la chaleur humaine dans les endroits les plus sombres de notre société. Celui qui a été itinérant et toxicomane avant d’être ordonné prêtre par l’archevêque de Montréal confesse son incroyable parcours à Métro.

«La rue m’a mené à l’Église, et l’Église a fini par me ramener à la rue», raconte en souriant le père, qui a fondé l’organisme la Rue meurt, récemment rebaptisé Notre-Dame-de-la-rue. Tous ceux qui vivent dans les rues du centre-ville montréalais le reconnaissent. Portant un col romain et une chemise à manches courtes qui laisse paraître son tatouage en forme de chapelet, l’homme arpente quotidiennement les rues pour offrir nourriture et café à ceux qui en ont besoin avec son fidèle acolyte et fils adoptif, Kevin Cardin.

«Notre mission, c’est surtout d’apporter du réconfort. Contrairement aux refuges, c’est nous qui allons vers les gens, un peu comme un service porte-à-porte. On leur parle, parfois on prie ensemble avant qu’ils aillent retrouver la dureté de la rue», explique l’abbé en poussant un lourd «bac à roulettes» rempli de vêtements et de barres tendres qui attire le regard des passants de la rue Sainte-Catherine.

Claude Paradis et itinérants2

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La dureté de la rue, le père Paradis l’a bien connue. Après avoir grandi en Gaspésie et travaillé à Cowansville comme infirmier, il est arrivé à Montréal, il y a 25 ans, et n’a jamais trouvé de travail. «L’isolement et le désespoir ont pris le dessus», relate-t-il, se remémorant l’époque où il s’est retrouvé les poches vides, dans la rue. À ce moment-là, il a voulu mettre fin à ses jours. «J’ai commencé à prendre de la cocaïne, puis du crack», dit-il, admettant avoir encore parfois de fortes envies de consommer. «J’ai réalisé que je ne voulais pas mourir, que je voulais devenir un homme d’Église», ajoute-t-il.

Grâce à certaines rencontres providentielles, comme celle avec le père Christian Lépine (nommé archevêque de Mont­réal en 2012), Claude Paradis a trouvé un sens à sa vie en devenant prêtre. Après 10 années à étudier la philosophie, la théologie et la toxicomanie, c’est maintenant lui qui conseille les personnes droguées, incarcérées, mais aussi celles qui sont aux portes de la mort, notamment au centre de soins palliatifs de l’hôpital de Verdun.

L’homme de 57 ans refuse l’idée d’être assigné à une paroisse ou même de prendre un jour sa retraite. «Moi, c’est dans la rue que je veux être, et jusqu’à ma mort», proclame-t-il.

Claude Paradis et Kevin CardinRécit d’un survivant

Métro s’est entretenu avec le fils adoptif de l’abbé Paradis, Kevin Cardin, qui a vécu dans la rue près de quatre ans avant de s’en sortir.

Comment vous êtes-vous retrouvé dans la rue?
De 4 ans à 14 ans, j’ai été placé dans une famille d’adoption où nous étions très mal traités. Ensuite, j’ai été dans un centre jeunesse, et dès mes 18 ans, on m’a mis dehors avec mon sac.

Personne ne vous a aidé à trouver un emploi?
Non, je ne savais même pas ce que c’était qu’un curriculum vitæ. Je suis parti de Chambly pour me rendre à Montréal, et le soir même, un homme m’a proposé de vendre de la drogue pour lui.

Que s’est-il passé ensuite?
Au début, je faisais beaucoup d’argent, entre 500$ et 800$ par soir, je me payais une chambre d’hôtel… tellement heureux de ma liberté. Mais rapidement, j’ai commencé à consommer du crack, et tout a basculé.

Comment vous en êtes-vous sorti?
J’ai été en prison à la suite d’un vol, j’ai pu me désintoxiquer. J’ai rencontré une fille, dans la rue aussi, mais qui a réussi à se prendre un appartement. Je l’ai suivie. Les premiers temps ont été difficiles, je n’étais pas capable de dormir sur un lit, mon corps était habitué au sol dur. Je vais mieux maintenant, et nous sommes mariés.

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