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Procès avortés: une priorité, dit Couillard

Jocelyne Richer, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

QUÉBEC — L’impact des délais déraisonnables dans l’administration de la justice est hissé au rang des dossiers prioritaires du gouvernement, a indiqué mercredi le premier ministre Philippe Couillard, qui s’est engagé à faire davantage pour raccourcir ces délais et éviter que des procès avortent.

Il faut «rapidement ramener la situation sous contrôle», a convenu le premier ministre à l’Assemblée nationale.

Ce dernier était interpellé par le chef de l’opposition officielle, Jean-François Lisée, qui s’inquiétait de voir le nombre de requêtes en arrêt de procédures gonfler sans cesse.

Mardi, la ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, révélait qu’on comptait actuellement pas moins de 222 requêtes de ce genre, entraînant l’avortement éventuel de nombreux procès. Des criminels pourraient ainsi se retrouver libres comme l’air.

Ces requêtes s’appuient sur la décision de la Cour suprême, déposée en juillet dernier en relation avec l’arrêt Jordan, ayant pour effet de fixer des limites strictes à la durée des procès, dans le but d’éviter des délais indus. Le plus haut tribunal du pays décrétait alors que, sauf circonstances exceptionnelles, les procès devraient durer au maximum 18 mois pour les causes entendues en cour provinciale, et 30 mois pour celles inscrites en Cour supérieure.

M. Lisée a reproché mercredi au gouvernement d’avoir sabré 25 millions $ dans l’administration de la justice et d’avoir coupé 38 postes de procureurs au Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP), des décisions contribuant à engorger encore davantage les cours de justice.

Pour accélérer la cadence dans les palais de justice, il a demandé au gouvernement de combler au plus tôt les postes vacants de juges et de ramener en cour les juges à la retraite, de même que d’augmenter les budgets, le nombre de procureurs et de greffiers.

Le premier ministre Couillard a convenu qu’il s’agissait là d’un enjeu véritablement important pour la société et prioritaire pour son gouvernement.

«Il faut clairement faire plus, à court terme et à moyen terme également», a-t-il admis, pour espérer régler le problème des délais indus, un dossier désormais «de très haute priorité».

Le gouvernement s’engage donc à dégager les moyens et ressources nécessaires «le plus rapidement possible», a promis le premier ministre, sans toutefois fixer de montants ou préciser le type de mesures envisagées.

En octobre, la ministre Vallée avait présenté un plan d’action en ce sens, et l’opposition péquiste l’avait décrié, le réduisant à une liste de bonnes intentions sans impact réel sur le cours des choses.

Le premier ministre n’a pas fait référence à ce plan d’action mercredi.

Il a par ailleurs nié que le gouvernement ait diminué le nombre de procureurs.

De son côté, lors d’une mêlée de presse, la ministre Vallée a cherché à se faire rassurante. «Il y a des gestes qui sont posés, il y a des gestes qui vont continuer d’être posés», a-t-elle dit, sans donner de détails, en affirmant qu’il s’agissait d’un dossier «qui n’est vraiment pas pris à la légère».

Un des scénarios que l’opposition péquiste réclame, pour éviter que la situation dégénère, consisterait à examiner la possibilité de recourir à la clause dérogatoire de la Constitution canadienne. Une loi pourrait décréter qu’au cours des cinq prochaines années l’administration de la justice se fait au Québec nonobstant l’article 11 b) de la Charte canadienne.

Mme Vallée a dit mercredi que son équipe examinait ce scénario, qui semble cependant improbable. Ce n’est certainement pas son premier choix. Le recours à la clause dérogatoire ou «nonobstant», a-t-elle commenté, doit demeurer «un outil exceptionnel».

«L’étude est en cours. Mais ce n’est pas le premier réflexe qu’on a», a-t-elle noté.

La ministre fédérale de la Justice, Jody Wilson-Raybould, veut toutefois dissuader le Québec d’invoquer la clause nonobstant. «Nous devons nous engager dans le travail nécessaire pour réformer le système de justice criminelle. Ce travail est incroyablement important et doit se faire», a-t-elle dit en mêlée de presse à Ottawa.

«Je ne vois pas comment utiliser la clause nonobstant dans ce cas. Nous devons faire notre travail», a-t-elle ajouté.

Mme Wilson-Raybould assure qu’elle et ses homologues sont en contact pour tenter de remédier au problème.

Depuis le début de la semaine, l’opposition péquiste multiplie les mises en garde, craignant «une hécatombe» d’arrêts de procédures et de criminels en cavale.

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