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Wonderstruck: le silence des origines

Photo: Collaboration spéciale

Aux antipodes de son précédent et majestueux Carol, Todd Haynes s’embarque avec Wonderstruck (Après la foudre) dans un conte onirique d’une virtuosité éblouissante.

«Je n’avais jamais fait un film que petits et grands peuvent regarder ensemble», admet au bout du fil Todd Haynes, ce grand spécialiste des opus pour adultes, comme Far from Heaven et Safe, qui ont marqué de nombreux cinéphiles.

Sans pour autant délaisser le drame d’époque, le cinéaste américain a décidé d’adapter le roman de Brian Selznick. Cela devient un récit initiatique sur deux enfants sourds qui partent vers la Grosse Pomme pour retrouver quelque chose d’essentiel à leur existence.

La première histoire, située en 1927, reprend l’esthétisme du film muet (noir et blanc, absence de dialogues, musique presque continue), alors que la seconde, qui se déroule en 1977, est plus naturaliste, avec cette photographie unique qui semble provenir de Midnight Cowboy et l’utilisation d’une pièce emblématique de David Bowie.

Et si, avec Wonderstruck, le créateur de Velvet Goldmine livrait son œuvre sur le cinéma, dont ces 50 années représentent sa naissance et sa mort?

«Les histoires les plus simples sont les plus vraies. Ce sont celles qui nous révèlent le plus de choses.» – Todd Haynes, réalisateur

«J’adore votre question! lance le metteur en scène. On ne me l’avait pas encore posée, et je pense que vous avez raison. C’est aussi un film dans lequel je compare l’évolution de New York à deux époques et où je m’intéresse aux changements de mentalités. Surtout à la façon qu’ont les gens de traiter, de stigmatiser ou d’accepter les personnes sourdes.»

Adoptant momentanément le mélo à la Douglas Sirk pour embrasser une quête de mystère plus près de celle d’Hitchcock, le long métrage, qui n’est pas sans rappeler le Hugo de Scorsese, en est surtout un de montage, alternant constamment entre les deux destins et les différentes temporalités.

«C’est un exercice fascinant et inspirant, se rappelle Haynes, qui pousse encore plus loin cet exercice entamé avec I’m Not There. On se demande sans cesse pourquoi il y a des coupures, en quoi les deux histoires sont liées. C’est une structure de narration pure. Évidemment, je devais éviter de me perdre là-dedans et ne jamais oublier que ce sont les personnages qui sont les plus importants.»

Se laisser aller
Sans être froids, les précédents films de Todd Haynes (Carol, I’m Not There) proposent des émotions plus distanciées, presque intellectualisées. Wonderstruck lui permet pour la première fois de verser dans une sentimentalité immédiate. Celle qui mouille les yeux. 

«J’utilise souvent l’émotion pour la retenir ou la retarder, explique le réalisateur. Dans ce cas-ci, il est surtout question d’un immense sentiment de perte et de privation. Les enfants sont isolés, ils tentent de reconquérir leur liberté, de se définir. La perception du spectateur change tout au long du film, surtout à la fin, ce qui peut expliquer les pleurs de certains.»

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