Les étuis

Ligne d’autobus 51, direction ouest. C’est vendredi, il est 17 h. Ils entrent à tour de rôle. Trois jeunes hommes, tous munis d’un étui protégeant un instrument. Le premier semble porter une trompette. Le deuxième, par la rondeur de l’objet et les baguettes de bois qui dépassent de son sac, laisse deviner qu’il porte une caisse claire. Le dernier musicien, de loin le plus encombré de tous, pousse devant lui sa contrebasse.

Ils se suivent à la queue leu leu pour prendre place là où ils le peuvent dans le véhicule qui, en cette heure de pointe, est aux trois quarts plein. La trompette trouve un banc solo. La caisse claire s’insère entre deux bancs occupés, pendant que la contrebasse offre son dos au troisième musicien qui s’y appuie avec nonchalance. Il a l’air d’un pêcheur échoué sur une baleine.

Les jeunes hommes étudient la musique et terminent une longue semaine qui s’enfonce dans le soir qui tombe. Je comprends à mots couverts que, malgré la fatigue, ils se retrouveront plus tard pour jouer dans un bar.

Dehors, la pâleur du ciel se conjugue à celle de leur teint; on les sent épuisés par l’intensité de leurs cours, l’exigence des répétitions, des examens et de leurs engagements nocturnes… parce qu’il leur faut bien travailler pour vivre.

Je remarque alors les trois carrés rouges épinglés à leur veste. Puis reviens à leurs instruments respectifs, protégés par les étuis qui, soudainement, soulèvent cette question : si l’accès à l’éducation était à la jeunesse ce qu’un étui est à un instrument? Tout simplement une enveloppe qui protège les jeunes esprits de l’ignorance et qui, de surcroît, leur donne accès à la possibilité d’interpréter une partition des plus inspirantes; celle de la connaissance et des possibles.

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