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Deux Montréalais attaquent le gouvernement pour «mourir dans la dignité»

Photo: Mario Beauregard/Métro

Deux Montréalais, en grande souffrance physique et atteints de maladies incurables, veulent obtenir une aide médicale à mourir que la loi actuelle leur prive. Avec leur avocat, Me Jean-Pierre Ménard, ils s’adresseront aux tribunaux pour obtenir gain de cause.

Les larmes aux yeux, Jean Truchon semble avoir bien du mal à écouter sa touchante déclaration, lue par une intervenante médicale, obligée de l’assister à chaque instant. «Les petits plaisirs de la vie quotidienne ne me suffisent plus. Je me regarde dans le miroir et je ne reconnais pas l’homme que j’étais avant», explique-t-il dans ce texte.

Souffrant d’une paralysie cérébrale depuis sa naissance, Jean Truchon a perdu l’usage de son unique membre, le bras gauche, en 2012, le rendant entièrement dépendant. Contraint d’utiliser sa bouche pour faire déplacer son fauteuil roulant électrique, il réclame désormais «une mort douce et digne et non mourir en martyr». Cette mort, pourtant, lui est privée par les lois actuelles.

Contester les lois
Après avoir un temps envisagé de «[se] jeter devant une voiture ou le métro» ou de «[se] faire injecter une dose létale», Jean Truchon veut désormais se battre devant les tribunaux. Accompagné dans sa lutte de Nicole Gladu, 71 ans, qui peine à se déplacer en raison d’une grave scoliose et d’une capacité pulmonaire restrictive, ces  Montréalais ont saisi les tribunaux pour contester la constitutionnalité des lois fédérale et provinciale.

«J’ai goûté autre chose de la vie et je n’en peux plus de la misère humaine.» – Jean Truchon

Ces derniers veulent notamment faire retirer l’article de la loi C-14 du Code criminel, adoptée en juin 2016, qui évoque une «mort raisonnablement prévisible» comme condition à l’obtention de l’aide médicale à mourir. Ce critère, regrettent les demandeurs, ne fait pourtant pas partie de ceux établis par l’historique arrêt Carter, rendu par la Cour suprême du Canada, en février 2015.

Selon ce texte, pour bénéficier d’une telle aide, une personne doit notamment être majeure et être affectée de problèmes de santé graves et irrémédiables. Des conditions respectées par Jean Truchon et Nicole Gladu, mais pour qui, le diagnostic vital n’est pas engagé.

«On n’a pas le droit de rester les bras croisés, a assuré leur avocat Me Jean-Pierre Ménard, avant d’évoquer «l’insensibilité» et «l’aveuglement» des deux gouvernements. Ces critères privent des droits fondamentaux à des citoyens. Ce sera une bataille difficile, mais on est prêt».

«L’usure s’est accumulée au fil des années et je ne suis plus capable. J’aimerais mourir chez moi, avec mes amis et un verre de champagne rosé à la main.» – Nicole Gladu

«Un enjeu de société»
«En colère» contre les deux paliers de gouvernement, Nicole Gladu refuse de se rendre en Suisse, où l’aide médicale à mourir pourrait lui être prodiguée. «Tant qu’à mourir toute croche, je voudrais que ma mort serve à quelque chose», a indiqué celle qui réclame, depuis 2010, «le droit de mourir dans la dignité».

«C’est un enjeu de société. Mes clients ne sont pas dans l’impulsion, ils vivent cette détresse depuis plusieurs années. Leur décision est mûrement réfléchie et ce qu’ils souhaitent, c’est garder le contrôle», a ajouté Me Ménard.

L’avocat imagine se rendre devant un juge «d’ici un an» et s’attend à poursuivre sa requête en Cour d’appel puis en Cour suprême, si nécessaire.

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