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Trop tard pour renégocier le PTP, selon la ministre Freeland

Photo: Sébastien Tanguay/Métro

Il est désormais trop tard pour que le Canada renégocie le Partenariat transpacifique (PTP) conclu par le gouvernement précédent, a assuré hier la ministre canadienne du Commerce international, Chrystia Freeland, qui a cependant assuré que la population serait écoutée avant que le plus important accord commercial de l’histoire ne soit ratifié.

«Une des priorités de notre gouvernement sera de consulter les Canadiens et les Canadiennes au sujet du PTP, de prendre le temps d’analyser leurs préoccupations et d’en faire l’objet d’un débat approfondi aux Communes», a affirmé Mme Freeland.

La ministre, qui fut ancienne journaliste au réputé Financial Times avant d’être députée, l’a d’emblée annoncé: le gouvernement libéral fédéral croit au libre-échange et entend faire du commerce un «élément-clé» dans ses efforts de relance de l’économie canadienne, chancelante en raison du prix à la baisse du baril de pétrole.

Peu d’obstacles semblent donc se présenter sur la route devant mener à la ratification du traité, qui réunit 12 pays du littoral Pacifique autour d’un même marché commun fort de 800 millions de personnes et dont le poids économique équivaut à 40% de l’économie mondiale.

En campagne électorale, le premier ministre Justin Trudeau s’était également dit favorable au libre-échange. La ratification du PTP par un gouvernement libéral majoritaire aux Communes apparait ainsi comme une formalité, d’autant plus que les voix opposées à l’accord se sont essentiellement confinées à l’industrie laitière et automobile, le reste du tissu industriel canadien se réjouissant de l’ouverture du marché asiatique.

Mme Freeland a toutefois souligné que la signature de l’accord n’engagera aucun pays à l’adopter. «Il faut que les États-Unis, le Japon et quatre autres pays ratifient l’accord pour qu’il devienne effectif, insiste-t-elle. Tous les pays auront deux ans, à partir du moment où ils l’auront signé, pour le faire adopter par leur Parlement respectif».

Celle qui tient désormais les brides du négoce au pays était de passage à Montréal pour prononcer son premier discours en français dans la province, deux jours après le passage de son collègue des finances, Bill Morneau. Invitée par le Centre d’études internationales et de recherche internationale (CÉRIUM) de l’Université de Montréal, la ministre venait surtout marquée l’ouverture du nouveau gouvernement libéral par rapport à l’ancien caucus conservateur, réputé allergique aux questions des journalistes.

«Ce n’est qu’une première rencontre entre nous», a-t-elle indiqué aux journalistes, assurant qu’elle demeurait «toujours disponible» pour répondre aux médias en aparté de son court point de presse.

Mme Freeland a souligné à plusieurs reprises, dans un effort évident d’imprimer la nouvelle marque libérale aux Communes, l’importance d’écouter la population pour son gouvernement. L’allocution de la ministre a d’ailleurs été de courte durée, son temps de parole n’ayant pas dépassé les 20 minutes au cours de l’entretien d’une heure en raison du choix fait par l’organisation hôte de laisser une large place aux interventions du public.

«C’est un exercice très important pour moi, puisqu’il me permet d’écouter ce qui vous préoccupe», a précisé la ministre.

L’avocat spécialisé en droit des affaires internationales, Bernard Colas, assistait également à la conversation de la ministre Freeland. Selon lui, le discours de l’ancienne journaliste du réputé Financial Times devenue ministre du cabinet Trudeau s’est voulue rassurante dans son allocution.

«Elle savait que le milieu des affaires l’écoutait, et elle a voulu réitérer son engagement en faveur du libre-échange», explique-t-il.

Questionné quant à savoir si les consultations publiques promises par la ministre changeraient quoi que ce soit au contenu du PTP, dont la renégociation a été écartée par Mme Freeland, M. Colas a indiqué que le changement de garde qui se profile à Washington était à prendre en compte.

«Le Canada, ce n’est pas les États-Unis, a-t-il affirmé. La marge de manœuvre de la ministre est très limitée, et ses consultations ne pourront porter que sur une chose: l’adoption, ou non, de l’accord. Selon moi, la conclusion de ces consultations, ce sera la ratification de l’accord. Ce qui reste à savoir, cependant, c’est si le Canada ratifiera le PTP avant ou après les États-Unis».

M. Colas souligne que l’issue de l’élection américaine sera d’une «importance fondamentale» sur l’avenir du Partenariat transpacifique. «La plupart des républicains sont favorables à l’accord, mais celle pressentie pour occuper la Maison-Blanche l’année prochaine, c’est Hillary Clinton, et elle s’est opposée au traité tel qu’il est présentement. Le Canada n’a donc aucun intérêt à presser la ratification de l’accord, puisque si le prochain occupant – ou la prochaine occupante – du Bureau oval demande une modification de l’accord, le Canada pourra à son tour exiger des changements».

Quant aux chances que le Congrès américain adopte l’accord avant le changement de garde de novembre, M. Colas croit que le temps se fait court pour Barack Obama. «Il tente de faire signer l’accord avant février, soit avant la saison des primaires. Après, M. Obama sait que le cirque électoral détournera l’attention de cet enjeu.»

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