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Questions en rafale avec l’auteure Andrée A. Michaud

Photo: Collaborateur

Andrée A. Michaud a étudié la philosophie, le cinéma et la littérature. Parallèlement à sa carrière d’écrivaine, elle est réviseure et rédactrice. En 2001, elle a remporté le Prix du gouverneur général du Canada pour Le ravissement. Bondrée est son 10e livre.

En une phrase, de quoi traite votre dernier livre?
Il s’agit d’un polar se déroulant à l’été 1967, le Summer of love, dans lequel il est question de la disparition de deux jeunes filles, de la perte de l’innocence et des drames engendrés par ceux qui envoient des hommes à la guerre. Ce roman s’intitule Bondrée, pour boundary, «frontière», au cas où il y aurait des intéressés.

Que lisez-vous présentement?
J’ai des lectures très éclectiques. En ce moment, je lis le deuxième tome de Ça, un vieux Stephen King, et Paterson, de William Carlos Williams. J’ai aussi entamé Portraits de femmes, de Philippe Sollers, mais la magie n’opère plus.

Qui sont vos trois auteurs préférés?
Il me semble impossible de n’en nommer que trois, d’autant plus que nos affinités se modifient avec le temps. Allons-y quand même, côté lectures formatrices, pour le trop peu connu Robert Pinget, pour Virginia Woolf et pour Stephen King, à qui je me permettrai d’ajouter Jean-Paul Sartre et les grandes Anne Hébert, Colette et Marie-Claire Blais.

Qu’est-ce qui vous a amenée à l’écriture?
La beauté, tout simplement, la force des éléments, la fureur de vivre. Quand tu te promènes dans le bois et que ça te fait mal aux tripes tellement c’est beau, tu cherches une façon de traduire ce sentiment, de transposer la puissance des émotions qui t’habitent pour ne pas te consumer sur place. C’est en quelque sorte une façon de survivre à ce qui me dépasse.

Chaque écrivain a des routines d’écriture qui lui sont propres, quelles sont les vôtres?
Ma routine n’est pas très originale. J’écris généralement le matin, quand mon emploi du temps me permet de le faire (les écrivains, on le sait, doivent cumuler deux ou trois métiers pour joindre les deux bouts), pour ensuite me lire, me relire et me corriger en après-midi. J’ai aussi besoin de chocolat, de café et de cigarettes. Et tant pis pour ceux qui ont les fumeurs en aversion.

En tant qu’auteure, quelle est votre plus grande peur?
Je ne me suis jamais posé la question. De devenir complètement sénile, je suppose, mais je préfère ne pas y penser, car «réfléchir sur soi, c’est comme essayer de se mordre les dents», dixit Michael Collins dans La vie secrète de E. Robert Pendleton.

Quelle est votre expression ou citation favorite?
«All work and no play makes Jack a dull boy», ou alors «Simplify, simplify», de Henry David Thoreau, deux «maximes» que je n’arrive pas toujours à mettre en pratique. Mais la plus belle est la suivante: «Je suis un homme minuscule parmi les herbes hautes.» Ça, c’est de Jim Harrison.

Quel livre auriez-vous aimé écrire?
Un livre qui aurait plu à tous, aux plus littéraires comme aux lecteurs les plus modestes. Plus concrètement: La promenade au phare, de Virginia Woolf, pour sa puissance évocatrice, Monsieur Songe, de Robert Pinget, pour son minimalisme et son humour, et Le bruit et la fureur, de William Faulkner, parce que c’est l’une des plus belles histoires d’amour et de folie que je connaisse.

Quel est votre pire défaut en tant qu’auteure?
Mon perfectionnisme, qui confine à l’obsession. Je me prépare une crise cardiaque ou un internement à petit feu.

De quoi êtes-vous le plus fière en tant qu’auteure?
De n’avoir pas abandonné malgré les difficultés du métier, les fins de mois catastrophiques, la recherche continuelle de sources de revenus (avis aux mécènes qui prennent le métro, s’il y en a) et le peu de considération que les institutions et le public québécois ont pour leurs écrivains et leurs intellectuels en général. À la longue, ça devient désespérant. Comme je le dis souvent, il faut avoir une maudite tête de pioche ou être tout à fait inconscient pour persévérer dans ce métier.

Que préférez-vous dans l’écriture? Qu’aimez-vous le moins?
Ce que je préfère: le plaisir de l’écriture en tant que telle, la satisfaction que j’éprouve quand je réussis à créer une atmosphère, à rendre une émotion, à construire une phrase correspondant exactement à la pensée que je voulais exprimer. J’ajouterai à cela la possibilité de créer mille mondes, de me retrouver sur le bord d’un lac rien qu’en ouvrant mon manuscrit, d’imaginer l’été en plein hiver et d’avoir autant d’identités qu’il existe de personnages dans mes romans.

Ce que j’aime le moins: la nécessité de me prêter à certains jeux médiatiques en espérant une plus grande visibilité, tout en sachant au fond moi, ou par simple expérience, que ça ne m’amènera probablement pas un seul lecteur de plus. C’est triste. Et encore une fois, désespérant.

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