Soutenez

Des lettres pour tisser des liens

Photo: Patrick Sicotte/TC Media


L’art d’écrire des lettres ne s’est pas perdu au Centre d’action bénévole et communautaire (ABC) de Saint-Laurent. Depuis deux ans, des aînés passionnés par l’écriture partagent leurs connaissances et leurs expériences de vie avec de jeunes nouveaux arrivants qui leur répondent. Le projet a connu un tel succès auprès des élèves de la classe d’accueil à l’école secondaire que, cette année, il prend de l’ampleur.

«Du côté des élèves, cela leur permet d’en savoir plus sur leur société d’accueil, explique l’agente de développement du Centre ABC, Fatou Thiam. Les aînés sont souvent isolés, donc cela leur fait du bien de recevoir une lettre d’un jeune de leur communauté.»

Le projet intitulé Correspondance scolaire s’est étendu en août aux classes de francisation du cégep de Saint-Laurent et Mme Thiam espère toucher d’autres écoles.

«Je pense que la correspondance est encore plus précieuse aujourd’hui. Ce n’est pas un texto, c’est concret. Les élèves reçoivent souvent la première lettre de leur vie», souligne l’enseignante à l’école secondaire Saint-Laurent, Josée Faucher.

Les avantages de cet exercice sont multiples, tandis que les réticences, notamment à raconter sa vie à un inconnu, sont vite balayées lorsque l’autre fait le premier pas.

«J’étais déprimée quand j’ai quitté la Syrie, raconte Joelle Nadra. Les lettres m’ont donné un coup de main pour supporter mes études en français ainsi que de l’espoir. Sa sœur était malade, mon père l’était aussi, nous partagions beaucoup de choses.»

Pour d’autres, qui n’ont pas de famille au Québec, il s’agit d’un moyen de tisser de nouveaux liens.

«Mon grand-père est mort peu après ma naissance, se souvient Kuo Lieng Ly. Mon correspondant est comme mon grand-père. Il a eu une vie difficile, la guerre notamment. Je me suis rendu compte que j’avais de la chance.»

Pour les aînés, c’est une richesse d’échanger avec les jeunes et de découvrir d’autres pays, indique Jacques Levasseur, bénévole depuis plus d’un an.

L’activité est un véritable complément aux cours de français et développe aussi la créativité des élèves.

«C’est la première fois que j’écrivais une lettre, comme on voit dans les films ou dans les livres, s’enthousiasme Farzaneh Masoudianmoghaddam. J’ai toujours voulu faire ça.»

Compte tenu du succès du projet, le Centre ABC cherche de nouveaux bénévoles pour participer à cet échange intergénérationnel et multiculturel.

Des correspondants inspirants

Veaceslav Vlas, originaire de Moldavie, en profite pour raconter ses derniers mois à son correspondant de l’année dernière, Mario Motillo. «Vous m’avez dit de prendre cela calme, mais je ne vous ai pas écouté et j’ai travaillé tout l’été», confesse-t-il. «Tu me copies un peu!», rétorque M. Motillo, inquiet qu’il soit aussi ambitieux que lui. «L’école doit passer avant, car c’est ton diplôme qui te permettra d’aller plus haut», conseille celui qui avait aussi concilié études et travail.

«C’est la première fois que j’échangeais avec un jeune de cet âge, il a une idée différente de la vie», lance d’emblée Chifieu Chan. «Je veux devenir ingénieur, il m’a indiqué des pistes», précise Keyhan Nemovi, arrivé d’Iran. «Des conseils en toute humilité, raisonne M. Chan. Il m’a quant à lui donné le goût de découvrir son pays.»

«Je me suis identifiée à ma correspondante, car elle a fait sa place dans un monde d’hommes. C’est très inspirant», se rappelle l’Iranienne Naomi Norouzpour. Monique Dodier, qui était enquêteuse pour les compagnies d’assurance, reste émerveillée par l’ambition et la curiosité de Naomi. «Je suis sure qu’elle va réussir dans la vie», conclut-elle.

Jacques Levasseur trouve ses jeunes correspondants très courageux d’arriver dans un pays inconnu. À propos de Kevin Leblanc Faustino, il se souvient qu’il avait du mal à croire qu’il venait du Mexique, à cause de son nom. «Nous avons échangé sur ses choix de profession. Il a toutes les qualités pour avancer», s’enthousiasme M. Levasseur.

Pour participer au projet de correspondance scolaire, contacter Fatou Thiam au 514 744-5511, poste 221 ou à cabc@qc.aira.com.

Articles récents du même sujet

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.